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Tunisie

Tunisie : le Premier ministre "a creusé une impasse politique"

Le Premier ministre tunisien lors d'une allocution télévisée mercredi.

Le Premier ministre tunisien lors d'une allocution télévisée mercredi. - -

Le parti islamiste d'Ennahda, au pouvoir en Tunisie depuis l'automne 2011, se retrouve divisé et affaibli après les dissensions publiques entre le Premier ministre et les cadres du parti.

La Tunisie continue de s'enliser jeudi dans une situation politique et sociale explosive. Mercredi, au soir de l'assassinat du leader d'extrême gauche Chokri Belaïd, le Premier ministre, Hamadi Jebali, a répondu au peuple en proposant la démission de son gouvernement et l'organisation de nouvelles élections législatives dans les plus brefs délais.

Problème : le parti islamiste au pouvoir, Ennahda, dont il est lui-même issu, lui a opposé une fin de non-recevoir jeudi. "Nous avons refusé cette proposition (...) le chef du gouvernement a pris cette décision sans consulter la coalition gouvernementale ni le mouvement Ennahda". Faute de Constitution, le Premier ministre n'a juridiquement pas "le droit de démettre de leurs fonctions les membres du gouvernement", a indiqué le chef du groupe parlementaire islamiste.

"Il a signé un aveu d'échec"

Désavoué par son propre camp, mais aussi par une partie du peuple, qui impute aux autorités la responsabilité de la mort de Chokri Belaïd, le Premier ministre se retrouve au pied du mur.

"Il a creusé une impasse politique terrible", estime Khadija Mohsen-Finan, chercheuse à l'Institut de relations internationales et stratégiques. "En évoquant l'idée d'une demission, il a signé l'aveu d'échec du gouvernement. Lui voulait poser la démission de son équipe et nommer un nouveau gouvernement lui-même, composé de technocrates apolitiques, pour faire tourner le pays et détourner l'attention de l'assassinat de Chokri Belaïd. Or, la question la plus urgente n'est pas de faire tourner le pays, mais de stabiliser la situation politique. Quelle aurait été la légitimité politique de ce gouvernement de technocrates, qui n'aurait pas été issu des urnes ?"

Pour cette specialiste du Maghreb, le Premier ministre a envenimé la situation. "Il a reconnu l'échec du gouvernement, mais n'a pas l'aval de son parti pour faire démissionner les ministres. D'un autre côté, il ne peut démissionner lui seul : ce serait comme reconnaître avoir une responsabilité dans l'assassinat de Chokri Belaïd."

Alexandra Gonzalez