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En copiant TikTok, Facebook est-il en train de faire disparaître les réseaux sociaux?

Mark Zuckerberg le créateur de Facebook a rebaptisé la maison mère "Meta" fin 2021 pour marquer le tournant vers le métavers

Mark Zuckerberg le créateur de Facebook a rebaptisé la maison mère "Meta" fin 2021 pour marquer le tournant vers le métavers - Chris DELMAS © 2019 AFP

L’entreprise modifie en profondeur le fonctionnement de sa plateforme et de sa filiale Instagram. Les interactions entre proches ne sont plus sa priorité.

Ne dites plus “réseau social”, mais “moteur de découverte”. Devancé par TikTok, notamment auprès des plus jeunes, Facebook définit désormais sa nouvelle page d'accueil de cette manière. La plateforme qui a, à elle seule, popularisé le concept de réseau social, change de fonctionnement, par le biais d'une nouvelle version de son application.

Désormais, les utilisateurs seront confrontés à des publications suggérées, sponsorisées ou sélectionnées par ses algorithmes. L’immense majorité des publications de leurs proches seront reléguées sur une fenêtre secondaire. Il en est de même pour Instagram, filiale de Meta (maison mère des deux plateformes), qui n’affiche désormais les publications de ses amis que dans de rares cas.

Comme l’a confié Mark Zuckerberg ce 27 juillet, la part des contenus suggérés qui sont affichés sera au moins doublée d’ici à la fin de l’année 2023. Ces derniers représentent actuellement 15% des publications sur Facebook et davantage sur Instagram (le chiffre n’est pas précisé).

“L’intelligence artificielle trouve des contenus que les gens trouvent intéressants, ce qui augmente l’engagement et la qualité de nos flux” assure Mark Zuckerberg.

Adieu ses amis, adieu les photos

Si le patron de Facebook met tant l’accent sur l’engagement (le temps passé sur l'application), c’est que son rival chinois TikTok fait désormais bien mieux que lui: chez les jeunes, les utilisateurs américains y passent trois fois plus de temps que sur Instagram. Deux fois plus, en France. Son discours auprès des investisseurs est avant tout destiné à rassurer les marchés, qui ont divisé la valeur de l’entreprise par deux depuis le début de l’année.

Cette évolution s’accompagne - là encore sur Facebook et Instagram - d’un autre changement: la mise en avant du format vidéo, aux dépens de la photo. Toujours dans l’optique de happer l’attention des jeunes utilisateurs, l’entreprise privilégie l’affichage des contenus en plein écran, au format vertical, incompatible avec la plupart des clichés que nous avons l'habitude de prendre.

Là encore, ce choix, calqué sur le fonctionnement de TikTok, est fait pour privilégier le contenu et non son émetteur, là où à leurs débuts, Instagram et Facebook avaient vocation à aider les internautes à suivre leurs amis ou les personnalités qu’ils apprécient. Cette décision, qui ampute Facebook et Instagram de leur volet social, a été critiquée par de nombreux utilisateurs d’Instagram, à commencer par Kim Kardashian et Kylie Jenner, les deux femmes les plus suivies de la plateforme.

Zuckerberg contre Zuckerberg

Mais le plus critique de cette politique désormais choisie par Mark Zuckerberg est peut-être... Mark Zuckerberg. Du moins, le Mark Zuckerberg de 2018. Alors que l'entreprise était alors visée pour sa gestion de la désinformation et de l'enfermement des utilisateurs dans des bulles de filtres, le patron de Facebook avait à l'époque voulu se recentrer sur l'essentiel, promettant que les utilisateurs verraient davantage de contenus de leurs amis.

"La recherche montre que lorsqu'on utilise un réseau social pour communiquer avec les gens qui comptent pour nous, cela peut nous faire du bien. On peut alors se sentir davantage connecté, moins seul, et tout cela est lié aux mesures de long-terme pour être heureux et en bonne santé. A l'inverse, lire des articles ou regarder des vidéos de façon passive - même si ces contenus sont divertissements ou informatifs - ne semble pas aussi bénéfique" argumentait alors Mark Zuckerberg, dans une publication mise en ligne le 12 janvier 2018.

Dans le même message, il reconnaissait que le fait conserver Facebook comme un réseau social en premier lieu ne serait peut-être pas optimal, d'un point de vue purement financier.

"En effectuant ces changements, je m'attends à ce que le temps passé et l'engagement sur Facebook diminuent. Mais je m'attends aussi à ce que le temps passé sur Facebook soit plus qualitatif" avançait alors Zuckerberg.

Une promesse qui semble ne pas avoir résisté à l'explosion du modèle de TikTok, plus performant, entièrement basé sur la recommandation de contenus, et à la pression des marchés financiers.

https://twitter.com/GrablyR Raphaël Grably Rédacteur en chef adjoint Tech & Co