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Désinformation: malgré la "loi fake news", Facebook et Twitter refusent de répondre à l'Arcom

Logos de Facebook et Twitter.

Logos de Facebook et Twitter. - Pixabay

Les plateformes ont un devoir de transparence sur leurs actions de lutte contre la désinformation depuis 2018. Mais elles ont été peu loquaces dans leur déclaration annuelle remise à l'Arcom.

"Données non disponibles". C'est en substance ce qu'il ressort des déclarations annuelles de Meta (maison-mère de Facebook et Instagram) et Twitter, publiées par l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) mardi 5 juillet.

Ces déclarations découlent de l'application de la loi "fake news", adoptée en 2018. Cette loi a notamment instauré un "devoir de coopération" pour les plateformes en matière de lutte contre la diffusion de fausses informations.

Concrètement, elles doivent rendre publiques leurs actions sur le sujet, ainsi que les moyens associés. Au total, douze plateformes ont communiqué à l'Arcom des déclarations annuelles pour l'année 2021.

Dans le questionnaire adressé aux plateformes, l'Arcom cherche à savoir - entre autres - le nombre de contenus identifiés comme étant des fausses nouvelles, ceux ayant été détectés par un algorithme ou suite à un signalement d'utilisateur.

L'Arcom réclame par ailleurs l'audience moyenne des fausses nouvelles, le délai moyen de traitement d'un signalement, le nombre de personnes chargées du traitement des signalements en France, ou encore le budget alloué au traitement des signalements et des recours des utilisateurs, en euros.

Difficultés "techniques"

Si Twitter écrit en préambule "apprécier l'opportunité (...) de détailler son travail de longue date" sur le sujet, dans les faits, le réseau social américain est peu loquace.

Sur les huit tableaux d'informations demandés, seulement 2 ont été remplis. La plateforme précise ainsi avoir identifié et supprimé plus de 63 700 contenus comportant une fausse information sur le Covid-19 en France.

Twitter écrit également avoir reçu 219 905 signalements pour fausses informations de la part des utilisateurs, mais aucun chiffre n'est ensuite précisé. Toutes les cases sont remplies par l'annotation "NA", signifiant "non available" en anglais ("non disponible", en français). L'entreprise refuse notamment de communiquer le nombre de signalements qui ont été pris en compte par l'entreprise.

Extrait de la déclaration annuelle 2022 pour l'année 2021 de Twitter à l'Arcom
Extrait de la déclaration annuelle 2022 pour l'année 2021 de Twitter à l'Arcom © BFMTV

De façon étonnante, Twitter assure ne pas disposer des données concernant le budget alloué à la modération des fausses informations, ou du nombre de personnes dédiées au traitement des signalements en France.

“Certaines des données demandées dans le questionnaire sont difficiles à récupérer et à produire pour Twitter", se dédouane l'entreprise en préambule.

Meta retoque les questions de l'Arcom

De son côté, Meta se contente de communiquer quelques chiffres globaux - sans donner le détail pour la France, sans toutefois répondre aux mêmes demandes chiffrées de l'Arcom sur les moyens déployés contre la désinformation. Plus audacieuse que Twitter, l'entreprise va jusqu'à faire disparaître les tableaux du document de réponse.

"Nous ne considérons pas que le nombre de signalements reçus soit un indicateur significatif, en particulier lorsqu’il s’agit de contenu lié à la désinformation” assure Meta, retoquant ainsi les questions de l'Arcom.

Concernant le budget alloué à la modération, Meta refuse une fois de plus de communiquer les chiffres demandés par l'Arcom.

"Notre budget lié à la sécurité est supérieur à l’ensemble des revenus de notre entreprise au moment de notre introduction en bourse au début de la décennie” tente de justifier Meta.

Lors de son introduction en Bourse en mai 2012, les revenus annuels de Facebook s'élevaient à plus de 5 milliards de dollars.

Le bilan annuel de l'Arcom publié à l'automne

"Nous avons au titre de l’article 19 de la loi du 30 septembre 1986 la possibilité de nous rapprocher à nouveau des opérateurs pour obtenir les informations manquantes et requises par la loi", explique l'Arcom, contactée par BFMTV.

Et de rappeler: "Au titre du devoir de coopération qui leur est imposé, les opérateurs sont tenus de faire preuve de transparence quant à l’application et l’effectivité des mesures mises en œuvre pour lutter contre la manipulation de l’information."

L’Arcom assure enfin qu'elle "fera état de sa position quant au respect des obligations de Twitter et Facebook à l’issue de l’instruction de leurs déclarations et à l’occasion de son bilan annuel qui sera publié l’automne prochain."

Anaïs Cherif