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Après le ministère de la Culture, la mairie de Paris dans le viseur de Rachida Dati en 2026

S'il semble désormais évident pour l'opposition que Rachida Dati reviendra en 2026 briguer la mairie de Paris, la gauche parisienne ne s'inquiète pas de cette probable candidature, estimant au contraire que celle-ci va "fracturer" la droite et les macronistes parisiens.

Aujourd'hui "madame la ministre", demain... "madame le maire"? Le gouvernement a créé la surprise générale ce jeudi 11 janvier en nommant Rachida Dati, maire du 7e arrondissement de Paris, au poste de ministre de la Culture, alors même que les Parisiens l'attendaient sur un tableau beaucoup plus local.

"La culture, c'est étonnant", s'accordent-ils au micro de BFM Paris Île-de-France, un habitant admettant volontiers sa surprise de voir Rachida Dati "prendre ce poste-là, alors qu'on l'attendait plutôt à la mairie de Paris".

Si la maire du 7e arrondissement met pour le moment sa carrière locale entre parenthèses, ni les habitants ni les élus parisiens ne sont dupes. Beaucoup gardent les yeux rivés sur 2026 et s'attendent à voir Rachida Dati revenir pour briguer la mairie de Paris lors des prochaines municipales.

"Paris n'est pas un tremplin"

L'opposition voit dans cette nomination au gouvernement une stratégie pour élargir l'électorat de Rachida Dati et pointe un "pacte" avec Emmanuel Macron afin de présenter une candidature unique Renaissance-Les Républicains aux élections municipales de 2026.

Invité ce vendredi 12 janvier sur le plateau de BFM Paris Île-de-France, le conseiller de Paris et coprésident du groupe Indépendants et progressistes Pierre-Yves Bournazel dénonce même un "deal assez politicien qui a été passé pour la mairie de Paris", lui-même surpris d'avoir vu Rachida Dati se faire offrir le ministère de la Culture.

"En 15 ans, je ne l'ai jamais entendue parler de culture à Paris, je ne l'ai jamais entendue parler de soutien à la création, aux artistes, se mobiliser sur un sujet culturel", martèle-t-il.

L'élu parisien estime par ailleurs que l'actuelle maire du 7e arrondissement a tourné le dos aux Parisiens en acceptant ce poste à la culture.

"Je me pose la question: comment peut-on trahir à ce point les Parisiennes et les Parisiens? Leur dire pendant des années "C'est Paris", et d'un coup privilégier ses ambitions personnelles et nationales (...) Quand on aime Paris, on ne l'abandonne pas pour une mission ministérielle", conclut Pierre-Yves Bournazel.

Accusant Rachida Dati d'avoir utilisé ses fonctions parisiennes comme un "tremplin" pour accéder par la suite au gouvernement, l'élu a lui-même fait savoir son intention de se présenter aux élections municipales de 2026, et ce comme candidat pour qui Paris serait la seule préoccupation.

"J'ai envie d'être ce candidat. (...) On a le sentiment que c'est utilisé comme un tremplin, mais Paris n'est pas un tremplin. Et Paris mérite des personnes qui s'en occupent fidèlement, loyalement, à 100%."

La gauche n'est pas inquiète

Du côté de l'opposition, beaucoup dénoncent le supposé "pacte" passé entre Rachida Dati et Emmanuel Macron. Moins de 24 heures après la nomination de Rachida Dati au ministère de la Culture, de nombreuses anciennes déclarations de l'élue parisienne ressortent sur les réseaux sociaux, notamment un passage chez nos confrères de France Inter dans lequel Rachida Dati qualifiait la majorité présidentielle de "traîtres de gauche, et des traîtres de droite".

Alors malgré l'objectif qui semble désormais quasi-certain des municipales de 2026, la gauche parisienne ne tremble pas pour le moment face à la potentielle candidature de Rachida Dati.

"Cet objectif ne sera pas du tout atteint, bien au contraire, ça va fracturer la droite parisienne, et ça va fracturer les macronistes parisiens", assure Rémi Féraud, sénateur PS de Paris.

Une dévision déjà marquée, puisque dans la foulée de sa nomination au gouvernement, Rachida Dati a été exclue de son parti Les Républicains par Éric Ciotti, ce dernier ayant estimé qu'elle "se place en dehors de (leur) famille politique".

À Paris, d'autres élus estiment que la politique de Rachida Dati ne fera pas le poids aux municipales face aux attentes des Parisiens, qui sont "attachés à ce qu'on ait une action extrêmement forte pour l'écologie, et tout ça, c'est que le gouvernement ne fait pas", explique Éric Lejoindre, maire PS du 18e arrondissement de Paris. Il assure que la probable candidature de Rachida Dati à la mairie de Paris "ne (l')inquiète pas, bien au contraire".

La majorité parisienne réagit

Mais avant de revenir briguer la mairie de Paris d'ici un peu plus de deux ans, Rachida Dati va déjà devoir rendre son écharpe de maire d'arrondissement. Car si rien ne l'empêche légalement de cumuler son mandat avec ses fonctions de ministres, Emmanuel Macron avait toutefois annoncé en 2017 que les ministres récemment nommés devraient démissionner de leurs fonctions exécutives locales.

Rachida Dati ne laisse en tout cas pas derrière elle sa rivalité avec l'actuelle maire de Paris, Anne Hidalgo. Les échanges musclés entre les deux élues étaient devenues monnaie courante lors des séances du Conseil de Paris, et la nomination de Rachida Dati est loin d'y mettre un terme.

Jeudi, Anne Hidalgo a ainsi partagé un message souhaitant "bon courage aux acteurs du monde de la culture, compte tenu des épreuves qu'ils vont traverser". Le premier adjoint à la mairie de Paris, Emmanuel Grégoire, a lui aussi pointé du doigt la nomination au gouvernement de Rachida Dati, rappelant quant à lui les déboires juridiques de la nouvelle ministre de la Culture.

"Rachida Dati est mise en examen pour corruption, c’est désormais un critère pour être nommée ministre. C’est faire un pied de nez aux magistrats", a-t-il dénoncé sur son compte X, alors même qu'il soulignait ce jeudi matin chez nos confrères de franceinfo que Rachida Dati "ne connaît rien à la culture".

Une réaction partagée par bon nombre d'élus, et ce pas uniquement au niveau local, mais bien à travers tout le pays. La déléguée départementale RN du Cher Julie Apricena estime ainsi que "la culture mérite mieux", tandis que la députée des Hautes-Pyrénées Sylvie Ferrer rappelle elle aussi la mise en examen de Rachida Dati, déclarant qu'"à force d'y ramener des casseroles, on ne sait plus si c'est un gouvernement ou une cuisine".

Jean-Baptiste Graziani avec Laurène Rocheteau