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Ukraine: Ianoukovitch sort du silence, sur fond de tensions en Crimée

Des pro-russes défilent avec un drapeau russe géant, le 27 février, à Simféropol, capitale de la Crimée, région autonome du sud de l'Ukraine.

Des pro-russes défilent avec un drapeau russe géant, le 27 février, à Simféropol, capitale de la Crimée, région autonome du sud de l'Ukraine. - -

Malgré l'accalmie observée à Kiev depuis la destitution du président Viktor Ianoukovitch, les tensions restent vives en Ukraine, et notamment en Crimée, où des hommes armés pro-russes se sont emparés de bâtiments officiels de cette république autonome russophone située dans le sud du pays, ce jeudi.

Cinq jours après la destitution du président ukrainien, de nouvelles tensions ont éclaté en Ukraine, ce jeudi. Alors que le leader pro-européen Arseni Iatseniouk a été officiellement désigné Premier ministre par le Parlement, à Kiev, des hommes armés se sont emparés de bâtiments officiels en Crimée, région autonome et russophone du Sud du pays. De son côté, le président déchu Viktor Ianoukovitch s'est exprimé pour la première fois depuis son départ forcé du pouvoir.

> Tensions en Crimée

Le drapeau russe hissé sur le Parlement de Crimée, jeudi 27 février.
Le drapeau russe hissé sur le Parlement de Crimée, jeudi 27 février. © -

• L'assaut d'un commando. Si le calme est revenu dans la capitale ukrainienne, les événements se sont accélérés en Crimée, péninsule russophone du sud du pays, où des heurts se sont déjà déroulés mercredi, provoquant l'inquiétude des Occidentaux. Dans la nuit de mercredi à jeudi, un commando de plusieurs dizaines d'hommes armés s'est emparé du siège du Parlement et du gouvernement local, à Simféropol, sur lesquels il a hissé le drapeau russe (voir photo ci-contre). La Crimée, peuplée majoritairement de russophones, est la région d'Ukraine la plus susceptible de s'opposer aux nouvelles autorités en place à Kiev.

• Situation politique confuse. Le Parlement de la Crimée a voté, ce jeudi, la tenue d'un référendum pour plus d'autonomie le 25 mai prochain, jour de l'élection présidentielle anticipée organisée au niveau national.

• Pression russe. Le ministre ukrainien de l'Intérieur par intérim, Arsen Avakov, a annoncé la mise en alerte de l'ensemble de la police et des forces spéciales afin d'éviter "un bain de sang parmi la population civile" et "l'évolution de la situation en affrontements armés". Au Parlement, le président par intérim Olexandre Tourtchinov a mis en garde Moscou contre la tentation de faire intervenir sa flotte, basée dans la ville voisine de Sébastopol. "Je m'adresse aux dirigeants militaires de la flotte de la mer Noire: tous les militaires doivent rester sur le territoire prévu par les accords. Tout mouvement de troupe armée sera considéré comme une agression militaire", a-t-il déclaré.

La Russie a répliqué jeudi qu'elle respectait les accords signés avec l'Ukraine. "La flotte russe de la mer Noire applique strictement les accords en question", a indiqué le service de presse du ministère russe des Affaires étrangères.

> Le pro-européen Iatseniouk désigné Premier ministre

Le nouveau Premier ministre Arseni Iatseniouk, jeudu 27 février, à la Rada, le Parlement ukrainien.
Le nouveau Premier ministre Arseni Iatseniouk, jeudu 27 février, à la Rada, le Parlement ukrainien. © -

• Un nouveau Premier ministre pro-européen. A Kiev, le Parlement ukrainien a désigné jeudi, à l'unanimité, le leader Arseni Iatseniouk comme Premier ministre du gouvernement de transition. "L'Ukraine voit son futur en Europe, en tant que membre de l'Union européenne", a-t-il lancé devant les députés.

• Une élection présidentielle le 25 mai. A 39 ans, cet ancien ministre de l'Economie et des Affaires étrangères, membre du parti de l'égérie de la Révolution orange de 2004 Ioulia Timochenko, va diriger le gouvernement d'union nationale jusqu'à l'élection présidentielle anticipée, prévue le 25 mai. Arseni Iatseniouk n'a pas fait mystère de la gravité de la situation dans laquelle se trouve le pays, sur tous les fronts. "L'intégrité territoriale est menacée, on assiste à des manifestations de séparatisme en Crimée", a-t-il souligné en allusion aux événements de la matinée à Simféropol.

• Une situation économique catastrophique. Sur le plan économique, Arseni Iatseniouk a été formel: "les comptes publics sont vides, tout a été volé. Je ne promets pas d'amélioration, ni aujourd'hui ni demain. Notre objectif principal est de stabiliser la situation". Selon lui, la dette publique s'élève à 75 milliards de dollars maintenant, soit le double de son niveau de "2010, quand Ianoukovitch est arrivé au pouvoir". Et le nouveau Premier ministre de lancer: "nous n'avons pas d'autre solution que de prendre des mesures impopulaires". Jeudi, le Fonds monétaire international a indiqué avoir reçu une demande d'aide officielle de la part de l'Ukraine.

> L'ancien président Ianoukovitch protégé par la Russie

L'ancien président ukrainien Viktor Ianoukovitch, destitué samedi dernier, s'est exprimé pour la première fois jeudi.
L'ancien président ukrainien Viktor Ianoukovitch, destitué samedi dernier, s'est exprimé pour la première fois jeudi. © -

• Ianoukovitch brise le silence... Parallèlement, l'ex-président Viktor Ianoukovitch, qui n'avait pas donné signe de vie depuis sa destitution par le Parlement, samedi dernier, et qui est recherché en Ukraine pour "meurtres de masse", a refait surface en Russie, dont il a réclamé et obtenu la protection face aux "extrémistes".

•... et se dit toujours le président de l'Ukraine. "Je me considère toujours comme le chef légitime de l'État ukrainien", a-t-il dit dans une déclaration "au peuple ukrainien" transmise aux agences de presse russes. "Tout ce qui se passe actuellement au Parlement d'Ukraine est illégitime", a-t-il ajouté. "Je me vois contraint de demander aux autorités de la Fédération de Russie d'assurer ma protection personnelle face aux actions menées par des extrémistes", a-t-il ajouté. Une demande "satisfaite" par la Russie, selon une source proche du pouvoir.

• Une déclaration vendredi depuis la Russie. Réagissant aux derniers événements en Crimée, Viktor Ianoukovitch a estimé "que le peuple dans le sud-est et en Crimée n'accepte pas le vide du pouvoir et l'arbitraire qui règne dans le pays, quand les ministres sont désignés par la foule sur la place publique". Aucune indication n'a été donné sur le lieu exact où se trouverait Viktor Ianoukovitch, qui s'exprimera face à la presse russe vendredi.

> Washington et l'OTAN inquiets

Face à l'accélération des évènements en Ukraine et la montée des tensions en Crimée où est stationnée la flotte russe, Varsovie et Londres ont exprimé jeudi leur préoccupation tandis que Washington et l'OTAN exhortaient Moscou à éviter l'escalade.

• L'OTAN dénonce l'"irresponsabilité des groupes armés pro-russes". A Bruxelles, le secrétaire général de l'Otan, Anders Fogh Rasmussen, s'est déclaré "extrêmement inquiet des évolutions les plus récentes en Crimée", jugeant "dangereuse et irresponsable" l'action de groupes armés pro-russes. Il a appelé jeudi toutes les parties à éviter l'"escalade", au second jour d'une réunion des ministres de la Défense de l'alliance.

• Washington renouvelle sa mise en garde. "Nous examinons de près les manoeuvres militaires de la Russie le long de la frontière ukrainienne, annoncées hier", a déclaré le porte-parole du président Barack Obama, Jay Carney. "Nous attendons de la Russie qu'elle soit transparente sur ces activités et s'abstienne d'actes de provocation. Nous pressons (les autorités russes) de ne pas prendre de mesures qui pourraient être mal interprétées ou mener à des erreurs dans une période très délicate", a-t-il ajouté.

A.S. avec AFP