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Finances publiques

Déficit public: quelles sont les économies déjà actées et celles qui sont envisagées?

Assurance chômage, aides sur l'apprentissage, arrêts maladie dans la fonction publique… Le gouvernement cherche de nouveaux postes d'économie pour tenter de résorber le déficit de la France.

La chasse aux milliards est lancée. L'Insee a dévoilé mardi matin le chiffre du déficit public, qui a atteint 5,5% du PIB en 2023. L'État, qui tablait sur une croissance plus élevée, a vu ses recettes baisser, à des montants inférieurs à ce qui était prévu.

Dans ce contexte, l'objectif fixé par le gouvernement d'un retour à un déficit autour de 3% du PIB en 2027 s'annonce difficile. Pour y parvenir, l'exécutif devra effectuer un nouveau tour de vis alors que dix milliards d'euros de crédits ont déjà été annulés pour 2024. Le gouvernement entend poursuivre dans cette voie. 20 milliards d'euros de coupes budgétaires ont été annoncées pour 2025, sans être détaillées. Tour d'horizons des économies déjà actées, et des possibilités envisagées.

Les économies déjà prévues

Dix milliards de coupes ont déjà été actées pour le budget de 2024. L'État va tout d'abord rogner sur ses dépenses de fonctionnement. Cela inclut une réduction des surfaces des bureaux et des déplacements des fonctionnaires. L'exécutif va également serrer la vis en matière de recrutement.

Du côté des dépenses sectorielles, c'est le ministère de la Transition écologique qui paie le plus lourd tribut avec deux milliards de crédits en moins. Le budget alloué au dispositif MaPrimeRénov' va notamment moins augmenter que ce qui était prévu.

Selon le décret gouvernemental publié le 22 février, les missions "Enseignement scolaire" et "Recherche et enseignement supérieur" connaissent respectivement des annulations de 691 millions d'euros et de 904 millions d'euros. L'aide à l'accès au logement perd 300 millions d'euros.

Le gouvernement a aussi décidé de partager les frais liés au compte personnel de formation (CPF), afin d'économiser 200 millions d'euros. Pour en bénéficier, les salariés devront désormais participer financièrement.

Par ailleurs, un certain nombre de mesures étaient déjà actées, avant que Bercy ne propose son plan d'économies de 10 milliards. Parmi elles: la suppression du dispositif loi Pinel, le doublement des franchises médicales, la baisse de 1.000 euros du bonus écologique pour les plus aisés, le recentrage du prêt à taux zéro, et la suppression de la CVAE, qui a été étalée dans le temps.

Ce qui est sur la table du gouvernement

Après les dix milliards sur le budget 2024, l'exécutif prévoit un coup de rabot de 20 milliards en 2025 (contre 12 milliards prévus initialement). Pour cela, Bruno Le Maire et Gabriel Attal ont évoqué certaines pistes.

En premier lieu, le gouvernement veut entreprendre une réforme de l'assurance chômage, que le Premier ministre Gabriel Attal devrait détailler au 20 heures de TF1 mercredi soir. Dans son viseur, les droits des demandeurs d'emplois.

"On est déjà passé de 24 à 18 mois, on peut encore la réduire. On peut aussi accentuer la dégressivité des allocations, cela fera partie des discussions", avait déclaré le Premier ministre fin février.

Bruno Le Maire lui avait emboité le pas, déclarant qu'"une réforme de l’assurance-chômage est nécessaire pour atteindre le plein-emploi", dans une interview au Monde début mars.

Et ce n'est pas tout pour les chômeurs. Matignon envisage aussi de rehausser la CSG sur les indemnités chômage, selon Les Echos. Actuellement, les allocataires bénéficient d'un taux réduit (de 6,2% ou 3,8% selon leur situation, contre 9,2% pour les salariés).

Bruno Le Maire veut aussi se pencher sur les dépenses de la Sécurité sociale. Parmi elles figurent les affections longue durée (ADL), qui permettent une prise en charge des soins à 100% par l'Assurance maladie. Le ministre de l'Économie veut aussi s'attaquer aux dépenses de transport sanitaire. "Est-il possible de continuer à dépenser 5,7 milliards d’euros par an pour le transport médical des patients?", s'interrogeait-il dans le journal Le Monde.

Ce sur quoi l'exécutif pourrait plancher ensuite

Pour continuer à réduire la dépense publique, certains sujets pourraient revenir sur la table. Notamment la poursuite des taxes sectorielles déjà mise en place, dont certaines devaient être ponctuelles, comme l'explique notre éditorialiste sur BFM Business, Nicolas Doze.

Il cite notamment "la taxe sur le streaming musical pour le Centre national de la musique, qui va certainement continuer, la taxe sur "la rente des producteurs d'énergies, principalement d'électricité, qui voient leurs profits progresser de manière complètement magique" et "la taxe sur les autoroutes et les grands aéroports".

Le gouvernement pourrait aussi s'intéresser aux arrêts maladies dans la fonction publique. Du côté des impôts locaux, la taxe foncière augmentera au minimum de 3,9% en 2024, mais certaines villes ou inter-communalités pourraient décider d'une plus forte hausse.

Une hausse des impôts, dont Bruno Le Maire ne veut pas, est tout de même évoquée par certains responsables politiques. Marc Fesneau, le ministre de l'Agriculture, estime qu'il n'y a pas de sujets tabous, y compris sur les questions fiscales. Dans ce contexte, Nicolas Doze s'attend à voir resurgir certaines anciennes batailles, notamment sur le crédit impôts recherche.

Déficit: faut-il augmenter les impôts ? – 21/03
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Alors que chaque ministère devra trouver des pistes d'économies, la facture de l'apprentissage devrait intéresser l'exécutif. Elle s'élève à 20 milliards d'euros. "Le gouvernement pourrait par exemple sortir les bac +4 et +5 du dispositif pour éviter les effets d'aubaine et gagner peut-être cinq ou six milliards", anticipe Nicolas Doze.

Autre idée afin de tailler dans la dépense publique: ne pas indexer les retraites et d'autres aides sur l'inflation. L'hypothèse était évoquée fin février par le ministre délégué chargé des Comptes publics, Thomas Cazenave. Mais il s'est fait recadrer entre temps par Emmanuel Macron. En tout cas sur les retraites, le chef de l'État a fermé la porte à une sous-indexation des pensions. Mais alors que l'ambiance est aux économies, le débat pourrait revenir par la fenêtre.

Marine Cardot