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"Risque pour la santé mentale", non-respect du DSA... Pourquoi Tiktok Lite est dans le viseur de l'UE

La Commission européenne menace de suspendre le système de récompenses addictives de Tiktok Lite. L'application est accusée d'aggraver les risques d'addiction aux écrans, et de ne pas respecter le DSA.

Gagner de l'argent en utilisant Tiktok, c'est possible. Lancée en toute discrétion en France à la fin du mois de mars, TikTok Lite a pour spécificité de rémunérer ses utilisateurs en pièces virtuelles. Le principe est simple: plus on regarde de vidéos, plus on reçoit de pièces qui peuvent ensuite être échangées contre des cartes-cadeaux Amazon de 500 euros maximum.

Un système de rémunération loin de plaire à Bruxelles. La Commission européenne a ouvert ce lundi 22 avril une enquête visant l'application. Elle menace de suspendre dès jeudi la fonctionnalité du réseau social chinois qui récompense le temps passé devant les écrans au risque d'augmenter l'addiction. Le tout, pendant 60 jours.

Des risques d'addiction

En effet, la Commission européenne estime que le mécanisme pose "des risques graves pour la santé mentale des utilisateurs". Concrètement, la nouvelle application est accusée de créer des incitations financières pour passer plus de temps sur les applications et donc, d'accroître le temps d'écran des internautes.

"Les flux incessants de vidéos courtes et rapides peuvent sembler amusants, mais ils exposent nos enfants à des risques d'addiction, d'anxiété, de dépression, de troubles alimentaires, de réduction des capacités d'attention", a estimé le commissaire européen au Numérique Thierry Breton.

"Nous soupçonnons TikTok Lite d'être aussi toxique et addictif que les cigarettes light", a-t-il dit, cité dans un communiqué relayé par l'AFP. "Nous ne ménagerons aucun effort pour protéger nos enfants", a-t-il mis en garde.

L'application est également accusée de ne pas respecter le Digital Service Act (DSA). En effet, Tiktok, comme tous les grands réseaux sociaux, est soumis en Europe au règlement sur les services numériques (DSA). Or, malgré les sollicitations de la Commission européenne, "Tiktok n'a pas été en mesure de fournir dans les 24 heures le document dans les délais", ajoute un collaborateur de Thierry Breton à Tech&Co.

Des inquiétudes partagées par l'exécutif

Des inquiétudes partagées par certains membres du gouvernement et des députés européens. La secrétaire d’État chargée du numérique, Marina Ferrari, a été la première à tirer la sonnette d'alarme. "J’accueille avec inquiétude la version Lite de l’application mobile de partage de courtes vidéos TikTok.", écrit-elle dans un tweet publié le 11 avril. "Le mécanisme de rémunération - bien que plafonné à une heure et interdit aux mineurs - est une dérive incontestable et est à l’opposé des principes de la société numérique que nous voulons bâtir", a souligné la secrétaire d’État,

"TikTok Lite est un piège à addiction", s'insurge de son côté la députée européenne Stéphanie Yon-Courtin dans une vidéo sur la plateforme X, anciennement Twitter.

Tiktok devra fournir avant ce mardi 23 avril au plus tard son rapport d'évaluation des risques et répondre à d'autres questions d'ici le 3 mai. Si elle ne parvient pas à convaincre, l'entreprise risque une très lourde amende, représentant 1% de son chiffre d'affaires annuel mondial et des astreintes pouvant atteindre 5% du chiffre d'affaires quotidien.

Une décision qui intervient alors que le réseau social chinois est en mauvaise posture. En effet, la Chambre des représentants américaine a voté, samedi 20 avril, en faveur de l'interdiction de Tiktok aux Etats-Unis, si ce dernier ne coupe pas les liens avec sa maison mère ByteDance.

Salomé Ferraris