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"Une offensive" contre la République: les professeurs d'Histoire en première ligne face au terrorisme

L'homme ayant attaqué vendredi le lycée d'Arras "cherchait un professeur d'Histoire", selon un témoin. Trois ans après l'assassinat de Samuel Paty, ces enseignants chargés d'expliquer la laïcité ou d'éclairer les conflits en cours demeurent des cibles du terrorisme.

Trois jours après l'attaque du lycée Gambetta d'Arras où le professeur Dominique Bernard a perdu la vie, les enseignants sont en deuil. Trois ans après l'assassinat de Samuel Paty à Conflans-Sainte-Honorine, une triste musique se répète.

Ce qui lie ces deux actes: leur cible. À Arras, dans le Pas-de-Calais, le tueur présumé "cherchait un professeur d'histoire", comme l'a expliqué l'un des témoins de la scène vendredi. C'est finalement à un agrégé en Lettres modernes qu'il a fauché la vie, tout en blessant deux autres personnes dans l'enceinte de l'école.

"En France, le jihadisme se projette contre l'école (...), une offensive contre l'Éducation nationale qui est perçue comme le coeur, le fondement et le symbole même de la République. Celle que les jihadistes veulent mettre à terre", a analysé sur France Inter le chercheur en sciences politiques et spécialiste du jihadisme Hugo Micheron.

Pour l'enseignant à Sciences Po, la "logique jihadiste" est celle d'une attaque contre le système éducatif, perçu comme "le point fort de la République". Une agression qui passe par ceux qui sont perçus comme un "point faible", les représentants de l'école, les professeurs.

Professeur d'histoire, de laïcité et de société

Ce qui a coûté la vie à Samuel Paty: un cours d'enseignement moral et civique à des élèves de quatrième. Le professeur a enseigné à ses élèves la liberté d'expression, aidé de deux caricatures de Mahomet issues du journal satirique Charlie Hebdo.

Les professeurs d'Histoire ne se contentent pas d'apprendre aux élèves le passé, ils ouvrent une fenêtre sur le présent et l'avenir, notamment dans ces cours d'éducation civique, mais aussi lorsque l'actualité le demande, notamment depuis les attaques du Hamas en Israël.

"À chaque fois qu'il y a une guerre, à chaque fois qu'il y a un événement traumatique, on doit expliquer, décrypter pour que les élèves comprennent ce qu'il se passe, les amener à comprendre le fonctionnement de l'information et des fake news", résume sur BFMTV Christine Guimonnet, la secrétaire générale de l'association des professeurs d'histoire-géographie.

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Mais dans cette mission, les professeurs confient parfois se sentir seuls, voire démunis, face à des questions pouvant provoquer des remous ou de la violence dans les classes. Malgré ces difficultés, Christine Guimonnet affirme que sa profession n'est "jamais dans le renoncement".

Un soutien "insuffisant"

Les enseignants estiment que l'Éducation nationale n'accorde pas suffisamment de reconnaissance face à ces sacrifices consentis. "On a demandé au minimum une demi-journée pour pouvoir encaisser le choc, on se retrouve avec deux heures. C'est tout à fait insuffisant", déplore la secrétaire générale.

"Notre nation doit montrer en actes qu’elle est derrière nos professeurs", a aussi assuré le ministre de l’Éducation nationale, Gabriel Attal, en déclarant lundi une "journée de solidarité" envers les enseignants.

Au-delà des mots, les enseignants cherchent les actes. "Combien de temps faudra-t-il pour se rendre compte que le climat anti-prof, au travail depuis des années, ouvre la porte aux passages à l'acte les plus abjects?", s'interrogent sur X les professeurs d'histoire-géographie de la Loire.

Tom Kerkour