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Après des débuts "timides" à l'Assemblée, les alliés de LFI espèrent sortir de l'ombre des insoumis

Le secrétaire national du Parti communiste français (PCF) Fabien Roussel et le Premier secrétaire du Parti socialiste (PS) Olivier Faure lors de la Fête de l'Humanité, le 10 septembre 2022.

Le secrétaire national du Parti communiste français (PCF) Fabien Roussel et le Premier secrétaire du Parti socialiste (PS) Olivier Faure lors de la Fête de l'Humanité, le 10 septembre 2022. - Thomas SAMSON / AFP

Moins visibles que les élus LFI lors des premières semaines de la nouvelle assemblée, les écologistes, les socialistes et les communistes veulent désormais jouer leur propre partition avec la reprise des débats parlementaires ce lundi.

Tout un symbole. Lors de leur installation au Palais-Bourbon, fin juin, impossible de rater les insoumis. Les députés LFI arrivent groupés, brandissent le poing et chantent "Macron on est là". Les écologistes suivent un peu plus tard, en ordre dispersé, la tête souvent vissée sur leur écran de téléphone.

"C'était un peu deux salles, deux ambiances", fait remarquer un administrateur de l'Assemblée nationale.

Sur les bancs de la Nupes, les premières semaines ont ainsi vu les troupes de Jean-Luc Mélenchon prendre la lumière, quand leurs alliés écologistes, socialistes et communistes se sont fait très discrets. "On ne va pas se plaindre mais on s'est un peu demandé où ils étaient passés", sourit un député de la France insoumise.

Des élus "un peu timides" au départ

"On a eu un départ un peu timide et on a été à la traîne", reconnaît sans ambage le député écologiste Benjamin Lucas auprès de BFMTV.com.

En plein examen du texte sur le pouvoir d'achat, Sandrine Rousseau a par exemple défendu, relativement seule, les amendements de son groupe. Pendant ce temps, les insoumis multipliaient les coups d'éclat dans l'hémicycle, en rebaptisant la prime Macron en l'appelant la "prime enfumage".

Il faut dire que dans le groupe des écologistes qui comptent 23 élus, après cinq ans sans aucun député, rares étaient ceux à déjà connaître l'Assemblée nationale - les premières semaines ont donc notamment été consacrées au recrutement de leurs collaborateurs.

Avec désormais 75 élus, les insoumis en sont, eux, à leur deuxième mandature, avec un quart de députés sortants. Ce qui leur a permis de décrocher en tout début de mandature certain des postes-clés du Palais-Bourbon.

Les jets privés récupérés par les insoumis

Au sein d'EELV, c'est finalement Julien Bayou - coprésident du groupe jusqu'à sa récente démission - qui a sorti le parti de la torpeur. En plein été, l'élu parisien annonce à Libération son intention de "bannir les jets privés". "Un très beau coup médiatique", selon Marie Pochon, députée écologiste de la Drôme.

Mais à la rentrée, ce sont bien les insoumis et le député Thomas Portes qui ont dégainé en premier une proposition de loi pour interdir l'usage de ces modes de transport. De quoi donner l'impression que les insoumis n'ont pas l'intention de laisser de la place aux écologistes?

"C'est vrai que ça aurait mérité plus de concertations, mais l'essentiel est de mettre le sujet dans le débat public", évacue Christophe Bex, député LFI de Haute-Garonne.

Qu'importe, pour Marie Pochon, militante des mouvements climats, c'est plutôt dans la rue que doivent se faire les coups médiatiques. L'élue cite notamment les happenings du collectif Ibiza, composé principalement de militants EELV, qui ont par exemple récemment piégé Gérald Darmanin lors de l'un de ses déplacements.

"On s'est laissé enfermer"

Les socialistes ne sont guère mieux lotis. Ils ont beau compter dans leur rang des députés sortants, ils n'ont pas pris plus la lumière que leurs homologues d'EELV.

"Nous devons réfléchir à une stratégie pour exister, être répérés, être crédibles", admet le député Guillaume Garot, ancien ministre de François Hollande.

"On travaille beaucoup mais on s'est peut-être laissé enfermer dans des sujets trop techniques", poursuit l'ancien ministre de François Hollande. Les socialistes ont, certes, été actifs, du lancement d'une mission transpartisane sur les déserts médicaux à la proposition de référendum d'initiative partagée sur une taxe sur les "super profits" d'Olivier Faure, mais ils n'ont pas forcément marqué les esprits.

Leur congrès prévu cet hiver ne facilite pas les choses. Si Olivier Faure, qui a farouchement soutenu l'accord avec LFI, est conforté dans ses fonctions de Premier secrétaire, les roses continueront de jouer de leur proximité avec les insoumis, sans surjouer leur différence. En cas de victoire de la maire de Vaulx-en-Velin Hélène Geffroy qui a pris, elle, ses distances avec la Nupes, la donne pourrait changer.

Roussel joue sa partition

Chez les communistes, la stratégie est différente, quitte à créer de la division. Dans le rôle de celui qui excelle à être sous les feux de la rampe, on trouve Fabien Roussel, secrétaire général du PCF. À la rentrée, l'ex-candidat à la présidentielle a plaisanté en parlant du "sexe des escalopes" sur Europe 1 pour répondre à l'écologiste Sandrine Rousseau qui avait estimé que le barbecue était un "symbole de virilité".

Avant de cliver à la Fête de l'Humanité, début septembre. Face aux différentes composantes de la Nupes présentes, le député du Nord a opposé la "gauche du travail" à celle des "allocs", s'attirant les foudres de tous ses partenaires.

"Ce que montre bien cette séquence, c'est que le PC est dans la lumière! Même si on souhaiterait que ce soit d'une façon différente", reconnaît Barbara Gomes, porte-parole de Fabien Roussel.

"On doit continuer à jouer avec nos propres baskets", assume l'un de ses proches. S'il est favorable à des textes communs avec la Nupes, il souhaite à tout prix "garder l'identité" des communistes. "On veut être utile aux gens avant tout", assure Yannick Monnet, député PCF de l'Allier.

Quitte à faire des alliances surprenantes. En guise de démonstration, les communistes évoquent la hausse du montant des pensions agricoles obtenue par le président de groupe, André Chassaigne, lors de la dernière législature, avec des voix de la gauche mais aussi du parti Les Républicains (LR) et de la majorité gouvernementale.

Face au RN, "il faut s'entendre"

Reste à trouver le bon dosage pour se faire entendre sans se fâcher avec ses partenaires et sans insulter l'avenir. Sur les bancs des insoumis, certains pointent du doigt le risque de l'arrivée au pouvoir de Marine Le Pen en 2027 pour tenter de maintenir l'union derrière eux, évoquant la victoire aux législatives italiennes de Giorgia Meloni.

"Si on ne veut pas d’un avenir à l’italienne, il faut s’entendre", insiste le député LFI Christophe Bex. "Sinon on laisse le Rassemblement national comme alternative."

Baptiste Farge et Marie-Pierre Bourgeois