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Un électeur européen sur trois vote désormais pour un parti populiste

Marine Le Pen, entourée de Louis Aliot (à gauche) et Jordan Bardella (à droite), devant l'université d'été du Rassemblement national à Agde (Hérault) le 18 septembre 2022.

Marine Le Pen, entourée de Louis Aliot (à gauche) et Jordan Bardella (à droite), devant l'université d'été du Rassemblement national à Agde (Hérault) le 18 septembre 2022. - Pascal GUYOT © 2019 AFP

Les partis anti-systèmes séduisent de plus en plus les Européens: en 2022, ils ont recueilli le vote de 32% d'entre eux, révèle The Guardian. La tolérance des extrêmes chez la population et les élites grandit.

Sur tout le continent européen, la tendance est claire: les partis populistes attirent de plus en plus d'électeurs. Près d'un tiers des Européens votent pour des partis dits anti-systèmes, d'extrême droite ou d'extrême gauche, révèle The Guardian.

Lors des élections l'année dernière, un record a été atteint: dans 31 pays, 32% des électeurs ont voté pour des partis anti-systèmes, d'après une étude menée par Matthijs Rooduijn, politologue à l'université d'Amsterdam pour le média britannique. Ils étaient 20% au début des années 2000 et 12% au début des années 1990. Un chiffre qui continue de grimper car ces partis élargissent leur base.

"Les partis d'extrême droite, en particulier, (...) forment des coalitions d'électeurs ayant des préoccupations très différentes", constate Daphne Halikiopoulou, politologue comparatiste à l'université de York au "Guardian".

"Des personnes qui n'ont jamais voté à l'extrême droite et qui ne s'y attendraient pas votent désormais à l'extrême droite: les femmes âgées, les électeurs urbains, la classe moyenne éduquée", décrit-elle, ajoutant qu'ils ont souvent l'espoir d'obtenir une stabilité économique.

Une tolérance accrue chez la population et les élites

Même si pour les détracteurs, le populisme est un danger pour les démocraties, le système judiciaire, la liberté de la presse ou encore le droit des minorités, les partis anti-systèmes sont de plus en plus tolérés dans la population dans son ensemble.

"Ce qui s'est développé, c'est le groupe d'électeurs qui les tolère", déclare Cas Mudde, professeur d'affaires internationales à l'université de Géorgie.

"Ceux qui ne voteraient pas Le Pen au premier tour des élections présidentielles françaises, mais qui le font au second. Ce groupe a vraiment, vraiment grandi".

Un changement s'est aussi opéré du côté des élites: "La dynamique de la concurrence politique est en train de changer", affirme Daphne Halikiopoulou. "Il y a quelques années encore, par exemple, aucun parti traditionnel n'aurait rêvé de jouer au ballon avec les Démocrates de Suède".

Des coalitions de gouvernement entre partis populistes et partis de droites se sont en effet formées dans plusieurs pays comme en Suède donc, en Finlande ou encore en Lettonie.

Les partis centristes se radicalisent

Le mantra des 234 partis anti-systèmes identifiés, dont 61 classés à l'extrême gauche et 112 à l'extrême droite? Privilégier le citoyen ordinaire plutôt que les élites dites "corrompues". Cela séduit car les autres partis centristes se sont progressivement détachés des demandes sociétales et ne "répondent pas aux préoccupation des gens" d'après Andrea Pirro, coauteur de l'étude et politologue à l'université de Bologne en Italie.

Les exemples sont légion: Viktor Orbán en Hongrie, le parti Droit et Justice en Pologne, Fratelli d'Italia avec Giorgia Meloni en Italie, Vox en Espagne.

En Autriche, à un an des élections, le parti autrichien de la liberté (FPÖ) est largement en tête des sondages, l'AfD allemand a doublé sa part de voix potentielle et se place désormais en deuxième position. En France, près d'une personne sur deux estime que Marine Le Pen du Rassemblement national a les qualités nécessaires pour être présidente, selon un sondage Elabe réalisé pour BFMTV.

Autre observation: en Europe, les partis de centre-droit traditionnel se radicalisent et s'aventurent sur des sujets, jusqu'ici chaise gardée des partis populistes, comme l'immigration. La frontière est de plus en tenue.

Juliette Brossault