Élections présidentielles américaines 2024
Élections américaines

Élection américaine 2024: comment expliquer la popularité de Trump malgré les ennuis judiciaires

L'ancien président Donald Trump, candidat pour un nouveau mandat, est donné comme favori dans les sondages au niveau national pour les élections de 2024. Les accusations dont il fait l'objet, notamment pour fraude financière, ne semblent pas affaiblir sa popularité.

Une popularité qui ne faiblit pas, malgré les ennuis judiciaires. L'ancien président des États-Unis (2017-2021) Donald Trump fait largement la course en tête dans les sondages pour être le candidat du parti républicain à la présidentielle en novembre prochain, alors que se déroule ce lundi 15 janvier le caucus de l'Iowa, marquant le début du processus de désignation des candidats à la présidentielle américaine.

Selon un sondage Ipsos pour Reuters, paru mercredi 10 janvier, Donald Trump est donné vainqueur des primaires républicaines avec 49% des voix, contre seulement 12% pour sa première adversaire, l'ancienne ambassadrice des États-Unis aux Nations unies Nikki Haley et 11% pour le gouverneur de Floride Ron DeSantis.

L'ex-chef d'État est aussi donné à peu près à égalité des intentions de vote avec Joe Biden, selon différents sondages, si les deux hommes politiques devaient s'affronter dans la course à la Maison Blanche.

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20:33

Début 2021, Donald Trump quitte avec fracas la Maison Blanche après quatre ans au pouvoir. Cette année là, certains de ses partisans ont mené le 6 janvier une insurrection au Capitole, symbole de la démocratie américaine, assaut qu'il est accusé d'avoir encouragé.

Si l'épisode a choqué, aux États-Unis et à l'international, il n'a pas entamé les ambitions politiques de Donald Trump, puisqu'il candidate à un second mandat cette année. Depuis, Donald Trump connaît d'importants ennuis judiciaires puisqu'il est poursuivi entre autres pour fraude financière et tentative d'inverser illégalement les résultats de l'élection de 2020, scrutin qu'il a perdu face à Joe Biden, et qu'il est menacé d'être déclaré inéligible. Pas de quoi pourtant entamer la popularité de l'homme d'affaires.

"Les 91 chefs d'accusation visant Donald Trump pour le moment n'ont fait que le renforcer", analyse la politologue, journaliste et spécialiste des États-Unis Marie-Christine Bonzom pour BFMTV.com.

Selon celle qui a aussi été correspondante à Washington pour la BBC, l'ex-président a non seulement réussi à conserver son électorat, mais aussi à l'élargir par rapport à 2017. "Trump gagne du terrain parmi les jeunes, les noirs et les latinos qui, pourtant, constituent les trois grands piliers de la coalition électorale du parti démocrate", développe-t-elle.

En cause principalement, la perception de son principal rival Joe Biden, selon Marie-Christine Bonzom. "C'est un président encore plus impopulaire que Donald Trump au même moment", dit-elle, soulignant qu'il est passé sous la barre des 40% d'opinions favorables dans la population américaine, une première pour un président en exercice depuis Jimmy Carter (1977-1981).

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Pour la spécialiste des États-Unis, "le bilan de Biden est très mal jugé par les Américains, y compris par une bonne partie de ses partisans" ", notamment sur les questions de l'immigration, de l'économie et de politique étrangère.

"Joe Biden est dans le rouge sur les gros dossiers", résume-t-elle.

Le bilan du mandat de Donald Trump est à l'inverse "réévalué positivement par certains électeurs indépendants, mais aussi par certains électeurs noirs et latinos qui pensent que le bilan économique de Trump était meilleur pour eux que celui de Biden", explique la journaliste, qui a couvert sept élections américaines.

La stratégie de campagne de Donald Trump s'avère par ailleurs payante. Le candidat aux primaires républicaines a choisi de ne participer à aucun débat électoral, comme d'ailleurs Joe Biden, préférant laisser ses adversaires s'écharper entre eux.

"Donald Trump joue la contre-programmation" en organisant ses meetings pendant les débats de ses rivaux, note la politologue.

"Trump et Biden ont ridiculisé les débats et leurs rivaux à l'intérieur de leurs partis respectifs. On se demande même à Washington s'il y aura un débat entre Trump et Biden au cas où les deux hommes sont effectivement investis par leur parti. Ce serait une première depuis 1960", indique la politologue. Habituellement, trois débats ont lieu entre les deux principaux candidats à une élection présidentielle aux États-Unis."Les arguments de Donald Trump (concernant le procès qui le vise NDLR), en se disant victime d'un acharnement, notamment de la part des juges démocrates de New York et d'Atlanta (où il a comparu NDLR) semblent fonctionner", juge également Marie-Christine Bonzom. Jeudi, il a encore accusé Joe Biden d'être un "escroc" et a dénoncé une "chasse aux sorcières" et un "procès très injuste" mené contre lui.

Face à Donald Trump, aucun autre candidat républicain n'a jusqu'à présent réussi à tirer son épingle du jeu. S'il a un temps semblé pouvoir concurrencer l'homme d'affaires, "(le gouverneur de Floride) Ron DeSantis n'a jamais fait la transition entre la figure locale et la figure nationale", estime la spécialiste des élections américaines. "Il est probablement parti trop tôt en campagne aussi"."Il a aussi sans doute fait une erreur politique en attaquant Donald Trump par sa droite", alors "qu'entre Trump et son aile droite, il y a peu de place", analyse-t-elle.

"Il se voulait plus Trump que Trump", assure-t-elle.

Alors que Chris Christie, le seul candidat aux primaires républicaines qui critiquait Donald Trump sans ménagement a abandonné la course à la Maison Blanche, une autre candidate, Nikki Haley, parvient peu à peu à gagner du terrain. Pour cela, elle adopte une stratégie différente en se plaçant "plus au centre" de l'échiquier politique. Très populaire au sein des milieux des affaires, l'ancienne gouverneure de Caroline du Sud défend notamment un "interventionnisme politique et militaire", qui la distingue de l'isolationnisme prôné par Donald Trump quand il était président.

"Elle apparaît comme une alternative à Donald Trump. Et c'est une bonne oratrice, une battante", avance Marie-Christine Bonzom.

De quoi menacer la large avance dans les sondages de l'ancien président qui prétend retrouver la Maison Blanche? "Elle bat Joe Biden dans les États clés de façon plus flagrante que Donald Trump" dans les derniers sondages, souligne la politologue.

En attendant novembre, le milliardaire part bien avec une avance confortable, mais la décision que prononcera la justice sera déterminante pour la suite de sa campagne. "S'il y a une condamnation, ça éroderait sans doute le soutien pour Donald Trump d'une partie des indépendants qui s'étaient tournés vers lui et peut-être même de certains républicains", estime Marie-Christine Bonzom.

Juliette Desmonceaux