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Flow et Flowcarbon: que font les deux nouvelles sociétés d'Adam Neumann, le fondateur de WeWork?

Après avoir été éjecté de la direction du géant du coworking en pleine débandade, l'entrepreneur a lancé deux concepts qui combinent notamment immobilier et cryptomonnaies.

Il est celui qui a réinventé avec succès le concept d'espaces de travail partagés avec WeWork, présent dans 119 villes dans le monde. Mais Adam Neumann, 44 ans, est aujourd'hui surtout considéré comme le principal artisan de la chute brutale de cette entreprise qui a déposé le bilan mardi.

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Accusé d'une gestion néfaste et d'ambitions jugées délirantes, il est mis à la porte en 2019 par son conseil d'administration avant que l'entreprise ne sombre. Ce qui ne l'empêche pas de se lancer dans de nouveaux projets avec l'appui d'importants investisseurs.

En 2022, Adam Neumann lance donc Flow, toujours dans l'immobilier. Malgré une réputation très écornée, l'entrepreneur est soutenu par un investissement de 350 millions de dollars de la part du fonds d’investissements californien Andreessen Horowitz (a16z) qui signe un chèque quasiment les yeux fermés. L'investissement valorise Flow à un milliard de dollars, un record pour un premier tour de table.

Outre la "vista" dont bénéficie l'entrepreneur auprès du fonds, Flow s'appuie surtout sur un parc de 4.000 appartements, détenu par Adam Neumann, dans plusieurs villes aux États-Unis.

"Nous pensons qu’il est naturel que, pour sa première entreprise depuis WeWork, Adam revienne sur le thème de la connexion des personnes en transformant leurs espaces physiques et en construisant des communautés là où les gens passent le plus de temps: leur maison", explique Marc Andreessen, figure tutélaire de l'investissement dans la tech et à la tête d'a16z.

Concrètement, Flow se positionne toujours dans le secteur de la proptech (soit les nouvelles technologies pour repenser l'usage d'immeubles) et a pour objectif de faciliter l'accession à la propriété aux États-Unis pour les primo-accédants. Comment? En proposant de la location-vente (leasing) comme la LOA (location avec option d'achat) dans le secteur automobile.

Le locataire d'un des 4.000 appartements d'Adam Neumann obtient ainsi progressivement une décôte sur le prix de l'appartement au fur et à mesure qu'il paye son loyer. Au terme d'une période déterminée, il peut devenir propriétaire du bien à un prix inférieur à celui du marché.

Mais le concept introduit surtout l'idée de "dortoir pour adultes" et de flexibilité avec des services de conciergerie pour les locataires, avec gardiennage d’animaux de compagnie, services de déménagement et d’emménagement, de nettoyage, de création d’événements, de gestion de l’administratif, d'entretien prédictif du logement, le tout via une application. Mais aussi de partage d'appartements (coliving) sans que l'on sache vraiment comment tout cela va fonctionner, si ce n'est son slogan "Live life in flow".

Flow proposerait également un portefeuille numérique prenant en charge des cryptomonnaies et des devises classiques afin, selon le magazine Forbes, de réaliser des "transactions externes" et d'abriter un "programme de récompenses en tokens".

Une chose est sûre, à date, Flow n'est toujours pas lancé et on sait finalement peu de chose sur cette start-up qui est pourtant déjà une licorne. Sur son site, une seule mention est indiquée: "coming soon" ("c'est pour bientôt").

En 2023, Adam Neumann annonce, toujours avec le soutien d'a16z, le lancement de Flowcarbon. L'idée cette fois est de "tokéniser" le crédit carbone en s'appuyant sur la blockchain.

"La demande de crédits carbone a augmenté ces dernières années parmi les entreprises qui les utilisent pour compenser les émissions de carbone, mais la capacité d’augmenter le volume de crédits disponibles a été limitée par l’infrastructure de marché opaque et fracturée de ce marché", explique la jeune pousse qui a levé 38 millions de dollars auprès d'a16z lors d'un tour de table total de 70 millions.

"La mission de Flowcarbon est de conduire des milliards de dollars directement vers des projets qui réduisent ou éliminent leurs émissions de carbone en créant le premier protocole ouvert pour la tokénisation de crédits carbone certifiés. Grâce au protocole, les développeurs de projets peuvent immédiatement accéder à une place de marché d’acheteurs intéressés par leurs crédits en les apportant sur la blockchain", souligne le communiqué de presse.

"Les token peuvent être retirés en tant que compensation, vendus, utilisés pour emprunter et prêter, ou rachetés pour un crédit sous-jacent du monde réel", précise la société.

Comme nous l'expliquions en mai 2022, certains observateurs doutent du projet, le média Vox allant même jusqu'à parler d'"arnaque dans une arnaque".

"Je pense qu'ils essaient de résoudre quelque chose qui n'est pas un problème", a déclaré Robert Mendelsohn, professeur de politique et d'économie forestières à Yale, interrogé par Vox. "Le genre de choses pour lesquelles les blockchains sont bonnes, qui est en quelque sorte de s'assurer que rien ne se perd, n'est pas vraiment un problème avec le marché actuel. Ce qui ne va pas, c'est que les crédits eux-mêmes n'entraînent pas forcément une réduction du carbone."

Toujours selon Vox, "faciliter l'achat et la vente de crédits carbone ne résout en rien le vrai problème des crédits carbone et des compensations, à savoir qu'ils ne fonctionnent pas".

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business