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Anne Hidalgo, un programme économique axé sur la "revalorisation du travail" et l'écologie

Parmi les principales mesures économiques inscrites au programme de la candidate socialiste: la hausse du Smic de 15%, la mise en place d'un ISF climatique ou encore celle d'un "bouclier logement".

Un programme de 70 mesures. Candidate à l’élection présidentielle, Anne Hidalgo a dévoilé le mois dernier son projet pour la France. Salaires, emploi, fiscalité… Tour d’horizon des principales propositions économiques de celle qui défendra les couleurs du Parti socialiste lors du scrutin du 10 avril.

Salaires

Si elle accède à l’Elysée, Anne Hidalgo souhaite "commencer par revaloriser le travail". Pour ce faire, elle promet d’augmenter le Smic de 15%, soit d’environ 200 euros nets par mois, puis de convoquer une "conférence sur les salaires avec les organisations patronales et syndicales".

L’actuelle maire de Paris veut aussi réduire les inégalités salariales en limitant à 1 à 20 l’écart dans les entreprises entre la rémunération la plus basse et la plus élevée. Les salaires qui dépasseront cette limite ne seront plus déductibles de l’impôt sur les sociétés.

Toujours dans un souci d’égalité, Anne Hidalgo promet de publier la liste des entreprises qui laissent perdurer les discriminations salariales entre hommes et femmes et de leur attribuer des pénalités. Cette proposition semble proche de ce qui se fait déjà aujourd’hui avec l’Index de l’égalité homme-femme publié chaque année et qui prévoit que les entreprises de plus de 50 salariés ayant obtenu une moyenne inférieure à 75 points sur 100 puissent être sanctionnées financièrement à hauteur de 1% de la masse salariale maximum.

Travail/Emploi

Sur le front de l’emploi, Anne Hidalgo prévoit d’abroger la très controversée réforme de l’assurance-chômage qui a durci les conditions d’accès aux allocations chômage, en laissant aux partenaires sociaux le soin de négocier un nouveau système "adapté aux besoins de notre temps". Il devra notamment améliorer "l’indemnisation démissionnaire des travailleurs indépendants et des salariés précaires".

Les jeunes de plus de 18 ans, sous condition de ressources, pourront par ailleurs bénéficier d’un "minimum jeune" qui sera assorti d’un "accompagnement garanti vers l’emploi, la qualification et l’autonomie". 5000 euros seront également versés à tous les jeunes de 18 ans pour financer des projets professionnels et personnels.

Anne Hidalgo reprend aussi à son compte une mesure partagée par plusieurs candidats de gauche: la réduction du temps de travail. Sans pour autant l’imposer, la candidate socialiste dit vouloir "inciter les entreprises qui le souhaitent à avancer vers la réduction du temps de travail". Le compte-épargne temps sera en outre "rendu universel et mieux doté". Enfin, pour les jeunes parents, Anne Hidalgo veut s’inspirer de ce qui se fait en Espagne en portant le congé paternité à 16 semaines (contre 4 aujourd’hui), dont 6 obligatoires.

Retraites

Sur le sujet explosif des retraites, Anne Hidalgo prend le contrepied du gouvernement en expliquant que le système actuel "n’est menacé ni à court terme ni à long terme". Pour autant et contrairement au candidat le mieux placé à gauche, Jean-Luc Mélenchon, la maire de Paris ne souhaite pas abaisser l’âge légal de départ à la retraite mais simplement le "plafonner" aux 62 ans actuels. En outre, le minimum vieillesse ainsi que le minimum contributif seront respectivement portés à 1000 et 1200 euros nets.

Fiscalité

Le programme d’Anne Hidalgo est particulièrement axé sur la transition écologique. Transition qu’il faut bien entendu financer. C’est pourquoi la candidate socialiste suggère la création d’un impôt de solidarité sur la fortune Climat et Biodiversité qui vise à "mettre à contribution les plus fortunés", lesquels sont régulièrement montrés du doigt pour leurs émissions de CO2 plus élevées que la moyenne.

Anne Hidalgo ne détaille en revanche pas les contours de ce nouvel impôt. Pas plus qu’elle ne précise sa méthode pour "renforcer la lutte contre la fraude fiscale" qui doit pourtant rapporter 6 milliards d’euros supplémentaires chaque année à l’Etat, selon ses calculs.

Droits de succession

Autre sujet brûlant de la campagne présidentielle, les droits de succession figurent dans le programme d’Anne Hidalgo. Afin de faciliter les transmissions, celle-ci souhaite abaisser la fiscalité des successions pour 95% des Français. A l’inverse, elle prévoit d’augmenter les impôts de succession pour les très hauts patrimoines, soit ceux "supérieurs à 2 millions d’euros". Une mesure qui devrait rapporter 8 milliards de recettes supplémentaires.

Cette proposition est en phase avec les préconisations du Conseil d’analyse économique qui préconisait dans un rapport rendu en décembre dernier une réforme des droits de succession qui serait gagnante pour 99% des héritiers mais pas pour les 1% les plus riches. L’organisme indépendant rattaché à Matignon anticipait grâce à cette refonte entre 9 et 19 milliards d’euros de ressources nouvelles.

Financement prévu du programme d'Anne Hidalgo:

Dépenses (montant annuel en milliards d'euros):

- Travail: 3
- Ecologie et réindustrialisation: 15
- Education et jeunesse: 14
- Nouvelles sécurités sociales: 14
- Justice, séceurité, démocratie et diplomatie: 4

Total: 50


Recettes (montant annuel en milliards d'euros):

- ISF Climat et Biodiversité: 5
- Imposition des très hautes successions: 8
- Fiscalité des multinationales: 6
- Lutte contre la fraude fiscale: 6
- Réduction des dépenses néfastes à l'environnement: 10
- Réorientation des fonds européens de relance: 5
- Recettes liées au surplus de croissance: 10

Total: 50

> Entreprises/Compétitivité

Alors que la France enregistre un déficit commercial record après des années de désindustrialisation, Anne Hidalgo souhaite mettre en œuvre un "plan de relocalisation des activités économiques", en commençant par les plus stratégiques. Cette "reconquête économique" passera par un fonds de réindustrialisation doté de 3 milliards d’euros et sera couplée à une ambition écologique à travers un plan d’urgence de réduction des émissions de Co2 à hauteur de 50% dans le secteur industriel d’ici à 2035. Ajoutée à cela, la création d’un livret de développement industriel par l’écologie "afin de flécher l’épargne des Français vers les projets industriels créateurs d’emplois et décarbonant notre économie".

Dans la France d’Anne Hidalgo, les aides publiques aux entreprises seront par ailleurs conditionnées au respect de critères sociaux et environnementaux. Les salariés devront également être mieux associés aux décisions. Pour ce faire, les entreprises de plus de 1000 salariés devront compter 50% d’administrateurs salariés (33% pour les entreprises de moins de 1000 salariés) dans les conseils d’administration et de surveillance. Un système de bonus/malus sera enfin mis en place en fonction de la part de la valeur ajoutée qui sera consacrée aux salariés.

> Transports

Pour développer les "mobilités durables", Anne Hidalgo veut mettre en place un système de "leasing social" en partenariat avec les constructeurs et loueurs de voitures afin que des véhicules électriques soient accessibles aux particuliers "pour un coût mensuel inférieur aux frais d’un véhicule à essence". La présidente Hidalgo installerait également un million de bornes électriques supplémentaires et renforcerait les aides à l’acquisition de véhicules électriques avec la création d’un prêt à taux zéro pour la mobilité durable.

Le train sera par ailleurs favorisé avec un taux de TVA réduit, tandis que les liaisons en avion seront pénalisées par une "taxe empreinte carbone" lorsqu’il existe une "alternative ferroviaire comparable".

> Logement

Au cœur de la transition écologique, la rénovation énergétique des logements fera l’objet d’un "grand plan pluriannuel" en cas de victoire d’Anne Hidalgo en avril. Un nouveau dispositif sera mis en place afin de rénover 760.000 logements privés par an. Concrètement, aucun frais ne sera à avancer au moment des travaux, "le remboursement, dont l’ampleur dépendra du niveau des revenus, se fera au moment de la revente ou de la succession".

Comme elle l’a fait à Paris, Anne Hidalgo veut généraliser l’encadrement des loyers dans toutes les zones tendues. Cet encadrement sera fonction de la performance énergétique du logement. La candidate socialiste souhaite également relancer la construction de 150.000 logements sociaux par an.

Parmi les mesures phares de son programme, Anne Hidalgo veut également un "bouclier logement" pour qu’aucun ménage ne soit "contraint de dépenser plus du tiers de ses revenus pour se loger". Ce dispositif prendra la forme d’une "allocation logement complémentaire, sous condition de ressources, pour ceux qui seraient au-delà de ce seuil malgré les efforts sur les loyers et la construction". Selon une étude de France Stratégie, le logement (loyers, charges…) représente aujourd'hui 40% des dépenses des locataires du parc privé et 36% de celles des locataires du parc social.

> Energie

Si Emmanuel Macron a annoncé un programme de construction de 6 nouveaux réacteurs EPR, Anne Hidalgo veut au contraire stopper le développement de la filière nucléaire. Estimant que l’atome ne doit servir que d’énergie de transition, la candidate socialiste promet de ne construire aucun EPR ni même de petits réacteurs SMR.

Pour les consommateurs dans un contexte de flambée des prix de l’énergie, la maire de Paris propose de baisser la TVA sur la facture de gaz naturel et d’électricité. Une baisse qui sera également appliquée sur les carburants en cas de forte de hausse des prix à la pompe.

> Agriculture

100.000. C’est le nombre d’exploitations agricoles que la France a perdues en dix ans. Pour enrayer la tendance, Anne Hidalgo veut faire adopter une "loi de régulation, de partage et de protection du foncier agricole ainsi qu’un plan décennal de renouvellement des générations" afin d’aider les jeunes agriculteurs à s’installer.

La candidate socialiste mise par ailleurs sur l’agroécologie pour améliorer la production alimentaire et assurer une meilleure rémunération des producteurs "par la diminution des dépenses d’intrants, une plus grande autonomie des exploitations, et la valorisation de la qualité des produits par une commercialisation collectivement maîtrisée par les producteurs".

C’est grâce à l’agroécologie qu’Anne Hidalgo veut engager "de manière rapide" la sortie de l’usage des "engrais de synthèse et des pesticides" dont le glyphosate et les néonicotinoïdes qu’elle promet d’interdire dans les 100 premiers jours de son quinquennat.

https://twitter.com/paul_louis_ Paul Louis Journaliste BFM Eco