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Gouvernement

Simplification, transmission des exploitations... Un projet de loi présenté pour répondre à la colère des agriculteurs

Le Premier ministre Gabriel Attal et le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau au Salon de l'Agriculture le 27 février 2024

Le Premier ministre Gabriel Attal et le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau au Salon de l'Agriculture le 27 février 2024 - Dimitar DILKOFF / AFP

Ce texte, repoussé à plusieurs reprises, a été modifié devant l'explosion de la colère agricole cet hiver. Il comprend des réponses aux demandes de simplification des agriculteurs, mais aussi des mesures concernant la transmission des exploitations.

Le texte était annoncé en début d'année... Mais sa première mouture avait été jugée très insuffisante dans le contexte de grogne grandissante dans la profession. Un projet de loi sur l'agriculture est présenté ce mercredi 3 avril en Conseil des ministres.

Il doit apporter de nouvelles réponses en matière de simplification, mais aussi sur le sujet sensible de la transmission des exploitations. Avec l'espoir, au passage, de satisfaire une partie des revendications du syndicat majoritaire FNSEA, alors que des agriculteurs sont de nouveau mobilisés ces dernières heures dans les Côtes-d’Armor à l'appel du syndicat. 

"Le compte va y être"

Lors du congrès de l'organisation la semaine dernière à Dunkerque (Nord), le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau a été confronté à la persistance de doléances du monde agricole, en dépit d'une moisson inédite de concessions gouvernementales (une soixantaine d'engagements sur des fonds d'urgence, des simplifications, une "pause" dans l'élaboration du plan de réduction de l'usage des pesticides...).

"Le compte va y être quand la loi d'orientation agricole sera votée (...) Quand les décrets finiront de se déployer", a alors estimé Marc Fesneau. La FNSEA attend toujours de son côté une prise de parole d'Emmanuel Macron, dont elle réclame "une vision" pour l'avenir du secteur, après le rendez-vous manqué du Salon de l'agriculture où le chef de l'État a été copieusement hué.

"Renouveler les générations"

Le texte s'appelle désormais "projet de loi d'orientation pour la souveraineté en matière agricole et le renouvellement des générations en agriculture". Il trouve son origine dans "deux défis d'une ampleur historique", a souligné le cabinet de Marc Fesneau: l'urgence de remplacer plus du tiers des agriculteurs qui seront partis à la retraite dans la décennie et le changement climatique.

"On a une espèce de mur démographique où on doit aller chercher des bras et des compétences pour renouveler les générations", poursuit le cabinet, selon lequel "on a besoin de 30% d'apprenants en plus immédiatement pour faire le renouvellement des générations en agriculture".

Le projet de loi permet aussi de créer des "groupements fonciers agricoles d'investissement" ou GFAI qui vont lever de l'argent auprès d'investisseurs afin d'acheter des terres pour les louer à de nouveaux agriculteurs.

Le but du gouvernement, qui ne fixe pas d'objectif chiffré de nouvelles installations, est aussi de "former plus et former mieux": il ne devrait guère susciter de débats au Parlement, à l'inverse des mesures introduites à la faveur de la crise.

Le premier article de la loi, ainsi que l'exigeait la FNSEA, consacre l'agriculture, la pêche et l'aquaculture au rang d'"intérêt général majeur en tant qu'elles garantissent la souveraineté alimentaire de la Nation".

Cette disposition est destinée à "nourrir la réflexion du juge administratif" quand il aura à trancher un litige autour d'un projet agricole, selon le cabinet de Marc Fesneau. Autrement dit, quand il faudra mettre dans la balance production de nourriture et impératif de protection de la nature.

Mesures de simplification

Le texte vise aussi à réduire les procédures autour des constructions de réserves d'eau pour l'irrigation et de bâtiments d'élevage. "L'idée n'est pas de changer la nature de la décision [d'autoriser ou non le projet], mais bien de donner de la visibilité aux acteurs agricoles" engagés dans un projet "pour savoir s'ils doivent le poursuivre, l'adapter ou l'abandonner", affirme le cabinet du ministre.

En l'état, le texte autorise le gouvernement à revoir par ordonnance l'échelle des peines en cas d'atteinte à l'environnement (destruction de haie par exemple). "Vous avez parfois des peines et des procédures qui sont disproportionnées, qui sont vécues comme infamantes ou humiliantes par les agriculteurs", explique le cabinet. Il s'agit de montrer "la volonté de l'État d'accompagner, d'expliquer, de faire réparer si besoin" plutôt que d'être "dans une logique punitive et inefficace au final".

"Cela ne veut pas dire qu'il n'y aura plus de peines pour des destructions ou pour des atteintes à l'environnement qui sont graves. Cela veut dire qu'on va essayer d'adapter les sanctions et l'échelle des peines (...) à la réalité des situations", assure le cabinet.

Ce projet de loi doit être examiné à partir du 13 mai en séance à l'Assemblée nationale, puis pendant la deuxième quinzaine du mois de juin au Sénat, pour une adoption espérée dans la foulée.

Baptiste Farge avec AFP