Tech&Co
Facebook

Pourquoi l’UE risque d’interdire l’abonnement payant de Facebook

La Commission européenne a lancé une enquête sur Meta à propos de son abonnement payant permettant de ne plus voir des publicités sur Facebook et Instagram.

Lancé en novembre 2023, l’abonnement payant de Meta pourrait bientôt être interdit en Europe. Coûtant 10 euros par mois, il permet aux utilisateurs de Facebook et Instagram de ne plus être pistés en ligne et de ne plus voir de publicités sur les deux plateformes. Soupçonnant que cet abonnement ne soit pas conforme au Digital Markets Act (DMA), la Commission européenne a annoncé ce 25 mars lancer une enquête contre l’entreprise américaine.

L’objectif avec cette procédure est de "déterminer si le modèle "payer ou consentir" récemment introduit pour les utilisateurs dans l’UE est conforme à l’article 5, paragraphe 2 du DMA", indique Bruxelles dans un communiqué.

Ce dernier exige que les "contrôleurs d’accès", soit les entreprises incontournables en raison de leur poids sur des marchés essentiels, "obtiennent le consentement des utilisateurs lorsqu’ils ont l’intention de combiner ou d’utiliser de manière croisée leurs données personnelles dans différents services de la plateforme principale".

Violation du RGPD

Meta a en effet lancé cet abonnement payant après avoir été sanctionné pour son approche concernant le traitement des données personnelles des utilisateurs par les autorités européennes. En vertu du règlement général sur la protection des données (RGPD), les plateformes sont en effet tenues de traiter les informations personnelles des internautes en toute légalité, en obtenant leur consentement par exemple.

Craignant que les utilisateurs refusent, Meta a plaidé la collecte de ces données aux fins de la simple exécution du contrat conclu entre l’entreprise et ses utilisateurs, lors de leur inscription, ce qui lui a valu une amende de 390 millions d’euros en 2022 par les autorités irlandaises qui estimaient que cette solution n’était pas adaptée.

La société s’est alors basée sur l’intérêt légitime, autre solution du RGPD stipulant qu’une plateforme n’est pas obligée d’obtenir le consentement de l’internaute si l’utilisation de ses données est nécessaire au fonctionnement de son service.

"Pas de véritable alternative" pour les utilisateurs

Meta a pu utiliser cette solution pendant quelques mois seulement, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) ayant estimé en juillet 2023 que la diffusion de la publicité ciblée n’est pas indispensable au fonctionnement de Facebook. Elle a ainsi obligé la société à obtenir le consentement des utilisateurs pour cette collecte de données tout en lui ouvrant une brèche: la possibilité de les faire payer pour ne plus être pistés et ne plus voir de publicités.

Meta a donc lancé son abonnement pour se conformer à la loi européenne, mais sans la faire valider par les autorités irlandaises de protection de la vie privée. Non seulement l’entreprise pourrait enfreindre le RGPD avec cet abonnement, son montant pourrait également ne pas être considéré comme "une rémunération appropriée" par la CJUE, soit ne pas être dissuasif pour les internautes.

Face à la Commission européenne, Meta a d’ailleurs récemment proposé de réduire le prix de sa formule payante. La société n’a cependant pas convaincu Bruxelles, qui "craint que le choix binaire imposé par le modèle "payer ou consentir" de Meta n’offre pas de véritable alternative au cas où les utilisateurs ne donneraient pas leur consentement, ce qui ne permettrait pas d’atteindre l’objectif consistant à empêcher l’accumulation de données à caractère personnel par les contrôleurs d’accès". Raison pour laquelle la Commission a lancé une procédure en vertu du DMA.

Kesso Diallo