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50 centimes par utilisateur: pourquoi Apple veut faire payer des fortunes à Google, Tiktok ou Netflix

Contraint de lâcher du lest sur son écosystème et ses commissions par l'Union européenne, Apple annonce de nouvelles règles. Elles pourraient coûter cher aux autres géants du numérique. Ou les contraindre à privilégier l'App Store.

Ce 25 janvier 2024, Apple a dévoilé le fonctionnement de son écosystème iOS à partir du mois de mars, avec l'arrivée de la version 17.4. Une version historique pour l'entreprise: pour la première fois, elle devra se conformer au DMA, une réglementation européenne de protection de la concurrence, qui va forcer Apple à accepter d'autres magasins d'applications que son App Store sur ses iPhone.

Dans un communiqué de presse, Apple a dénoncé cette nouvelle réglementation européenne, estimant qu'elle faisait peser de nouveaux risques sur ses clients. Pour Apple, des magasins d'applications concurrents de l'App Store sont davantage susceptibles d'abriter des applications malveillantes.

Liberté conditionnelle

Selon les nouvelles règles, Apple permettra à des entreprises tierces de créer leur propre magasin d'application sur iOS - comme Amazon, Microsoft, Google, Meta ou Epic. Les millions de développeurs seront ensuite libres de distribuer leurs applications sur l'App Store, comme sur tout autre magasin d'applications. Du moins, dans une certaine mesure.

Concrètement, Apple offre deux choix aux développeurs. Le premier consiste à conserver le régime actuel, avec une contrainte de taille: réserver l'exclusivité de ses applications à l'App Store. Un contrat qui impose une commission de 30% sur les achats et abonnements pour les grandes plateformes et 15% pour les petites.

Le second choix consiste à opter pour un nouveau cadre, qui propose de distribuer son application sur l'App Store, mais aussi sur d'autres magasins d'applications. Avec en prime une commission réduite (10, 13, 17 ou 20% selon les cas de figure).

Mais ce second choix s'accompagne d'une nouvelle contrainte financière: chaque plateforme cumulant plus d'un million de téléchargements sur un an et décidant de distribuer ses applications ailleurs que sur l'App Store devra régler 50 centimes par utilisateur et par an à Apple.

Droit d'accès aux iPhone

Apple justifie cette nouvelle commission, baptisée "Core Technology Fee" ("Commission liée à technologie de base"), comme un droit d'accéder à ses iPhone. Elle s'appliquera à toutes les installations d'applications, que ces dernières proviennent d'un magasin tiers ou de l'App Store.

Dans les faits, cette commission fixe reviendra donc à faire payer chaque année des millions de dollars aux géants comme Google, Meta, Tiktok, Netflix, ou Spotify, si ces derniers venaient à être tentés de faire une infidélité à l'App Store d'Apple.

Avec de nombreuses applications gratuites - par exemple chez Google, le coût potentiel de 50 centimes par an et par utilisateur pourrait vite décourager les géants du numérique de changer de système.

La stratégie d'Apple pourrait surtout limiter l'intérêt de magasins d'applications tiers privés des principales têtes de gondole de l'App Store. Ce qui réduirait très largement les effets du DMA, qui vise justement à encourager ce type de concurrence.

Après ces annonces, Thierry Breton, commissaire européen, a déjà averti: les nouvelles règles d'Apple seront étudiées de près par l'Union européenne, pour vérifier qu'elles respectent bien l'esprit du DMA.

https://twitter.com/GrablyR Raphaël Grably Rédacteur en chef adjoint Tech & Co