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Afghanistan

Afghanistan: les talibans interdisent aux femmes de travailler pour des ONG

Une femme marche devant une université afghane dans la province de Kandahar, le 21 décembre 2022

Une femme marche devant une université afghane dans la province de Kandahar, le 21 décembre 2022 - STRINGER / AFP

Le ministère de l'Economie a évoqué des "plaintes sérieuses" selon lesquelles femmes travaillant dans des ONG respectaient pas un code vestimentaire approprié.

Une nouvelle restriction des droits des femmes en Afghanistan. Les autorités talibanes ont ordonné aux organisation non gouvernementales (ONG) nationales et internationales de ne plus travailler avec des femmes après des "plaintes sérieuses" selon lesquelles elles ne respectaient pas un code vestimentaire approprié, a indiqué samedi à l'AFP le ministère de l'Economie.

"Il y a eu des plaintes sérieuses concernant le non-respect du hijab islamique et d'autres règles et règlements relatifs au travail des femmes dans les organisations nationales et internationales", a affirmé le ministère, chargé d'approuver les licences des ONG opérant en Afghanistan, dans une lettre obtenue par l'AFP.

Un porte-parole du ministère a confirmé que le ministère de l'Economie avait envoyé cet ordre aux ONG.

"En cas de négligence de la directive (...) la licence de l'organisation qui a été délivrée par ce ministère sera annulée", précise le courrier.

Quel impact sur les agences de l'ONU?

L'impact de cette décision sur les agences des Nations unies, qui sont très présentes en Afghanistan dans le contexte de la crise humanitaire, n'était pas connu dans l'immédiat.

Interrogé sur les règles qui s'appliquaient aux agences des Nations unies, le porte-parole du ministère de l'Économie, Abdulrahman Habib, a répondu que la lettre était
destinées aux organisations relevant de l'organisme afghan de coordination des organisations humanitaires, connu sous le nom d'ACBAR. Cet organisme ne comprend pas les Nations unies, mais regroupe plus de 180 ONG locales et internationales.

Toutefois, les Nations unies passent souvent des contrats avec des ONG enregistrées en Afghanistan pour mener à bien leurs missions. Pour les travailleurs humanitaires, ces employées sont essentielles pour garantir que les femmes en Afghanistan puissent accéder à leurs aides.

L'ONG International Rescue Committee (IRC), qui compte plus de 3.000 femmes dans son personnel en Afghanistan, a affirmé être "consternée". "Notre personnel féminin est essentiel à l'acheminement de l'aide humanitaire en Afghanistan", a-t-elle ajouté sur Twitter.

Plusieurs pays condamnent la décision

Le coordonnateur humanitaire de l'ONU pour l'Afghanistan, Ramiz Alakbarov, a dénoncé dans un tweet une "violation manifeste des principes humanitaires".

"Cette décision peut être dévastatrice pour le peuple afghan", a tweeté le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken, se disant "très inquiet de l'interdit des talibans pour les femmes de distribuer de l'aide humanitaire vitale pour des millions de personnes en Afghanistan".

"L'Union européenne condamne fermement la décision récente des talibans d'interdire aux femmes de travailler dans les ONG nationales et internationales", a affirmé dans un communiqué transmis à l'AFP une porte-parole du chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell.

Les femmes bannies des universités

Cette annonce intervient quatre jours seulement après la décision du gouvernement taliban d'interdire aux femmes afghanes de suivre des cours dans les universités publiques et privées du pays pour une durée indéterminée.

Le ministre de l'Enseignement supérieur, Neda Mohammad Nadeem, a expliqué dans un entretien télévisé avoir pris cette décision car les "étudiantes qui se rendaient à l'université (...) ne respectaient pas les instructions sur le hijab".

"Le hijab est obligatoire dans l'islam", a-t-il insisté, faisant référence à l'obligation faite aux femmes en Afghanistan de se couvrir le visage et entièrement le corps.

En dépit de leurs promesses de se montrer plus souples, les talibans sont revenus à l'interprétation ultra-rigoriste de l'islam qui avait marqué leur premier passage au pouvoir (1996-2001).

Depuis leur retour au pouvoir en août 2021, les mesures liberticides se sont multipliées en particulier à l'encontre des femmes qui ont été progressivement écartées de la vie publique et exclues des collèges et lycées.

S.C avec Reuters avec AFP