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Tunisie : nouveau mouvement de colère à la veille d'une journée cruciale

Des manifestants affrontant la police, jeudi 7 février, à Tunis.

Des manifestants affrontant la police, jeudi 7 février, à Tunis. - -

Au lendemain de l’assassinat du leader politique d’extrême-gauche, Chokri Belaïd, qui a provoqué la colère et le soulèvement d’une partie de la population, la Tunisie a vécu une nouvelle journée de tensions, ce jeudi.

Seconde journée de soulèvement, en Tunisie. De nombreux mouvements de protestation ont marqué la journée de jeudi, au lendemain du meurtre de Chokri Belaïd, leader de l’opposition laïque. Cet assassinat amorce un nouveau tournant dans la vie politique du pays, deux ans seulement après la Révolution de jasmin, et installe la confusion au sommet de l’Etat.

Alors que le Premier ministre a annoncé la dissolution du gouvernement et la tenue d’élections, le parti au pouvoir, Ennahda, a refusé la proposition d’un nouveau gouvernement apolitique.

Retour sur les évènements qui ont marqué la journée, à la veille d'un vendredi de grève générale sous haute tension.

Seconde journée de soulèvement, en Tunisie. De nombreux mouvements de protestation ont marqué la journée de jeudi, en Tunisie, au lendemain du meurtre de Chokri Belaïd, leader de l’opposition laïc. Cet assassinat marque un nouveau tournant dans la vie politique du pays, deux ans seulement après la révolution de Jasmin, et installe la confusion, au sommet de l’Etat. Alors que le Premier ministre a annoncé la dissolution du gouvernement et la tenue prochaine d’élections, le parti Ennahda a refusé la proposition d’un nouveau gouvernement apolitique. Retour sur les évènements qui ont marqué la journée de jeudi.

> Nouveaux heurts à Tunis

Foule contenue par la police. Une foule de plusieurs centaines de manifestants réclamant la chute du régime s’est à nouveau rendue avenue Bourguiba, à Tunis, ce jeudi, pour protester aux abords du ministère de l’Intérieur. Mais la police, mobilisée en nombre, a barricadé les abords du bâtiment officiel et a rapidement contenu les mouvements de foule, en jetant des bombes de gaz lacrymogène.

Les manifestants ont été dispersés dans le courant de l’après-midi et un calme précaire est revenu sur les lieux, où les commerces avaient baissé leurs rideaux de fer, selon des témoins.

Violences. Parallèlement, des heurts ont éclaté dans d’autres villes du pays, notamment à Gafsa (centre-ouest) ou des cocktails Molotov ont été jetés sur la police, qui a répliqué par des tirs massifs de gaz lacrymogène.

A Monastir (centre-est), les protestataires ont manifesté pacifiquement tandis que des témoins ont rapporté des pillages non loin de là, à Sfax.

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> Grève générale sur fond de funérailles

Appel à une grève massive. En début d’après-midi, après une réunion de plusieurs heures, le syndicat UGTT (Union générale tunisienne du travail) a lancé un appel à la grève générale dans tout le pays. Fort de ses 500.000 membres, le principal syndicat tunisien est un farouche opposant à Ennahda. La mobilisation de vendredi, jour des funérailles de Chokri Belaïd, devrait donc être massive.

Et ce d’autant plus qu’il s’agit du premier appel à la grève générale formulé par l’UGTT depuis 1978. Pendant la Révolution de jasmin, début 2011, le mouvement n’avait duré que deux heures, le 14 janvier.

Grève des avocats. De leur côté, les avocats et magistrats du pays ont entamé leur grève dès jeudi, pour crier leur colère contre les tentatives de mainmise du pouvoir et dénoncer l’assassinat de leur collègue. Chokri Belaïd était lui-même un avocat au barreau de Tunis, défenseur des droits de l'Homme.

> Mesures de sécurité

Fermeture des écoles françaises. Face aux risques de soulèvement qui menacent la journée de vendredi, l’ambassade de France en Tunisie a pris des mesures de sécurité et a annoncé la fermeture de ses écoles sur place, vendredi et samedi.

Une ONG demande des mesures de protection. La Ligue tunisienne pour la défense des droits de l’homme (LTDH) a, quant à elle, appelé les autorités à protéger les personnalités politiques du pays, plusieurs d’entre elles ayant reçu des menaces de mort.

Sur RTL, jeudi matin, le chef du Parti républicain tunisien, Ahmed Nejib Chebbi, a révélé l’existence d’une liste noire d’opposants à assassiner (sur laquelle il figure) et qui lui vaut une protection officielle.

> Confusion politique

Le Premier ministre désavoué par son parti. En à peine plus de 24 heures, la Tunisie a sombré dans le chaos politique. Alors que le Premier ministre, Hamadi Jebali, a annoncé, mercredi soir, en réponse aux manifestations de la journée, la dissolution du gouvernement en place et la formation d’un "gouvernement de compétences nationales sans appartenance politique", dans l’attente d’élections, le parti Ennahda, dont Jebali fait pourtant partie, a déclaré jeudi matin ne pas accepter cette proposition. 

"Le Premier ministre n'avait pas sollicité l'opinion de son parti", a indiqué le vice-président du parti, Abdelhamid Jelassi, mettant ainsi le leader du gouvernement en situation de désaveu.

Aucune démission en vue. Pour Didier Billion, directeur adjoint de l’Institut de relations internationales et stratégiques, interrogé par BFMTV.com, ce refus de la décision du Premier ministre pourrait s’avérer dangereux et indiquerait qu’il y a "une incapacité à gérer le pays" et un "manque de légitimité préoccupant".

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Jeudi soir, la présidence tunisienne a indiqué n’avoir reçu aucune lettre de démission et aucune information de mise en place d’un gouvernement apolitique.

Adrienne Sigel