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Retraites: la CGT Energie va privilégier les actions "Robins des Bois" en signe de contestation

Après avoir réalisé des coupures de courant et même évoqué la possibilité de cibler ces mesures sur certains élus, la Fédération CGT des mines et de l'énergie s'oriente davantage vers des opérations plus positives de "gratuité".

Même objectif mais moyens différents pour y parvenir. La semaine dernière, la Fédération CGT des mines et de l'énergie (FNME-CGT) a mis à exécution ses menaces de coupures volontaires limitées lesquelles ont visé une députée Renaissance du Lot, le centre-ville de Montpellier, une zone industrielle de Massy (Essonne) ainsi que des administrations dont la préfecture de Haute-Marne à Chaumont. Dès cette semaine, l'organisation syndicale ajuste sa stratégie. "Les coupures restent sur la table mais on va plus axer sur des actions positives", résume Fabrice Coudour, secrétaire général de la FNME-CGT.

Suppression du comptage ou passage en heures creuses

Discutées en interne depuis près de deux semaines, ces actions ont été évoquées publiquement hier par Renaud Henry, secrétaire général de la CGT Energie Marseille. "Concrètement, notre objectif est de faire une manipulation sur le compteur pour que les boulangers puissent avoir un tarif 50% à 60% gratuit, a-t-il expliqué ce week-end à RMC en marge de la manifestation parisienne des artisans de la profession contre la flambée de leur facture d'énergie. C’est complètement illégal mais aussi complètement moral."

"Ca a dû commencer, on a lancé l'appel la semaine dernière", a-t-il indiqué auprès de l'AFP sans être capable de préciser les nombres de boulangers concernés ou d'agents impliqués.

Déjà orchestrées ponctuellement par le passé, ces actions "Robins des bois" peuvent prendre des formes diverses en fonction du public ciblée. Il peut ainsi s'agir de la suppression du comptage de la consommation, du forçage du passage en heures creuses pour faire bénéficier de tarifs réduits ou encore du rétablissement du courant là où il a été suspendu malgré la trêve hivernale. Cette dernière option s'adresse plutôt aux particuliers contrairement au forçage du passage en heures creuses dont la portée est limitée par l'étendue des compteurs Linky qui ne permettent pas de réaliser cette transition vers les tarifs réduits sur le plan technique.

En revanche, elle est prisée, tout comme la suppression du comptage, pour réduire les factures de certains artisans boulangers mais aussi éventuellement d'écoles ou d'hôpitaux dans une logique "d'intérêt général".

L'électricité et le gaz tous deux concernés

S'il ne souhaite pas rentrer dans les détails logistiques de ce type d'opérations par souci de discrétion et de sécurité, Fabrice Coudour indique qu'elles seront décidées localement et menées par un groupe d'agents restreint. Ces interventions sont susceptibles de survenir dans toute la France, aussi bien du côté d'Enedis pour la distribution d'électricité que de GRDF pour celle de gaz. Pendant l'automne, plusieurs milliers de personnes avaient d'ailleurs été basculés en gratuité par des agents grévistes de GRDF qui demandaient une revalorisation salariale. "Les électriciens et gaziers maîtrisent parfaitement l'outil de travail, rappelle-t-il. C'est un acte très technique et on n'invite pas les citoyens à effectuer ce type d'opérations qui sont très risquées."

"C'est également risqué pour les salariés grévistes qui peuvent perdre leur emploi mais ça donne une image plus positive que les coupures."

Deux facteurs, liés selon le secrétaire général de la FNME-CGT, motivent ces actions: d'une part, le niveau excessif des prix de l'énergie qui pèse sur un grand nombre de Français et d'autre part, la réforme des retraites contre laquelle l'organisation syndicale espère mobiliser le plus grand nombre possible de manifestants alors que le texte prévoit la suppression du régime spécial de la profession. "Tout se rejoint, on demande des efforts à tout le monde sauf aux entreprises du CAC 40, déplore Fabrice Coudour. C'est un moyen pour dire qu'il faut nous entendre, on sait pour qui on agit."

"On construit un 31 janvier encore plus fort que le 19."

"C'est le contribuable qui paye"

Des membres du gouvernement ont réagi dès ce matin à cette nouvelle menace brandie par la FNME-CGT. "Ce n'est pas la CGT qui décide en France", "ce n'est pas la CGT qui décide des tarifs", "ce n'est pas à la CGT de faire la loi" mais "aux parlementaires", a martelé Bruno Le Maire sur Europe 1. Sur le plateau de BFMTV, Agnès Pannier-Runacher La ministre de la Transition énergétique a de son côté rappelé que ce serait le contribuable qui paierait ces actions au final.

"C’est certainement illégal, je ne sais pas si c’est moral mais la conséquence de ce type de coupures, c’est que c’est le contribuable qui paye puisque aujourd’hui nous sommes l’actionnaire dominant dans EDF. Que l’on parle de couper le courant sur des compteurs EDF ou de changer le tarif sur des compteurs EDF, c’est l’Etat qui paye", a souligné la ministre de la Transition énergétique qui a inviter à porter plainte contre les coupures volontaires.

Fabrice Coudour dénonce un gouvernement qui oeuvre pour habituer les Français à payer plus cher à terme et qui détourne l'attention du sujet prioritaire, la réforme des retraites. En charge de 95 % du réseau de distribution d'électricité en France, Enedis fait savoir qu'elle dépose systématiquement plainte auprès des services de police et de gendarmerie. "Elle respecte bien évidemment le droit de grève de ses salariés mais condamne fermement tout acte de malveillance sur le réseau public de distribution d'électricité pouvant conduire à des coupures de courant pour ses clients, et portant atteinte à la sécurité des biens et des clients", ajoute la filiale d'EDF.

Timothée Talbi