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Renault-Nissan: fumée blanche imminente pour l'Alliance

Le conseil opérationnel de l'Alliance se réunit ce jeudi matin. Il devrait entériner l'accord trouvé la semaine dernière entre Renault et Nissan sur le rééquilibrage de leur attelage. La fin d'un feuilleton de plusieurs mois, aux multiples rebondissements.

Ce jeudi, les dirigeants de Renault, de Nissan et de Mitsubishi ne se retrouveront pas autour de la table pour leur traditionnel et mensuel conseil opérationnel. La réunion se fera par visioconférence. "Nous n'avons pas besoin de faire le déplacement au Japon" explique-t-on chez Renault, "tout se passe bien, nous allons nous épargner un aller-retour express". 

Cette visioconférence doit permettre d'entériner les derniers détails techniques de l'accord trouvé la semaine dernière entre les deux constructeurs. Il sera ensuite soumis aux conseils d'administration de Renault et de Nissan. L'accord devrait être officiellement signé dans les jours qui viennent, sans doute début février, mais la date n'est pas encore décidée. "Il faut faire matcher les contraintes d'agendas de chacun ainsi que les contraintes réglementaires", précise-t-on chez Renault. Si Jean-Dominique Senard et Luca de Meo ne feront pas le déplacement au Japon ce jeudi, les équipes opérationnelles de Renault sont, elles, sur place pour "finaliser les dossiers".

Des discussions débloquées la semaine dernière

Les négociations, qui durent depuis plusieurs mois entre Renault et Nissan, se sont débloquées la semaine dernière. Les administrateurs indépendants de Nissan, réputés anti-alliance, ont finalement donné leur go à une restructuration de l'Alliance. Celle-ci consiste en un rééquilibrage des participations croisées des deux constructeurs. Renault ne détiendra plus que 15% du capital de Nissan, contre 43% aujourd'hui, soit le même niveau que Nissan détient dans Renault. Les deux sociétés seront chacune pourvues de droits de vote au sein du conseil d'administration de l'autre, ce qui n'était pas le cas auparavant et générait beaucoup de frustation de part et d'autre.

Les discussions ont longtemps buté sur des questions de propriété intellectuelle, Nissan craignant de partager ses brevets avec les nouveaux partenaires de Renault. Le constructeur français a en effet annoncé au mois de novembre dernier la création de deux nouvelles entités, une thermique "Horse", avec le constructeur chinois Geely comme actionnaire, l'autre 100% électrique "Ampère", qui comptera le géant américain Qualcomm à son capital.

Ces questions techniques réglées, c'est sans doute le politique qui a fini de convaincre les plus fervents détracteurs de l'Alliance chez Nissan. Emmanuel Macron a reçu le premier ministre japonais, Fumio Kishida, la semaine dernière et lui a assuré que l'Etat Français soutenait l'accord. Dans le même temps, Bruno Le Maire a écrit à ses collègues du METI, le ministère de l'économie japonais, leur garantissant que l'Etat allait acter le rééquilibrage des participations et que surtout, cela ne bougerait plus.

"Avoir une trace écrite était importante pour Nissan", glisse-t-on chez Renault.

Des questions toujours en suspens

Une question cependant, n'a pas été tranchée et ne le sera sans doute pas avant la signature de l'accord: celle de la participation de Nissan dans Ampère. Le constructeur japonais fera son entrée au capital de l'entité 100% électrique de Renault mais le montant de sa participation n'est pas encore décidé.

"Nissan estime qu'Ampère ne vaut pas 10 milliards d'euros de valorisation comme le calcule Renault", explique un connaisseur de l'Alliance.

Le constructeur japonais, comme évoqué un temps, ne prendra donc pas 15% du capital d'Ampère, ce qui équivaudrait à mettre 1,5 milliard d'euros sur la table. "Nissan ne peut pas se permettre de débourser autant", continue cette même source.

L'accord qui se profile entre Renault et Nissan est donc encore rempli d'interrogations. "Le plus important pour Renault est que Nissan fasse partie de l'aventure Ampère, déterminer le montant de leur participation est important mais cela n'est pas bloquant", assure-t-on du côté du constructeur français. Ce dernier point laissé en suspens, et qui devra être réglé avant l'introduction d'Ampère à l'automne 2023, fait douter certains observateurs du dossier. "Renault a cédé sur presque tout, il n'avait pas la main dans les négociations. Luca de Meo, le directeur général du groupe, voulait aller vite pour réorganiser l'entreprise, il s'est retrouvé en position de faiblesse", juge toujours ce connaisseur de l'alliance.

"Pas vraiment le choix"

Qui de Renault ou Nissan a gagné le combat? La réponse ne va pas de soi. Les deux entreprises font aujourd'hui chacune figure de petit poucet dans le monde de l'automobile. La marque Renault, par exemple, a vendu un peu plus d'1,4 million de voitures en 2022, quand Tesla tourne autour d'1,3 million.

"Nissan et Renault n'avait pas vraiment le choix, conclue notre connaisseur de l'Alliance. Ils ont besoin l'un de l'autre pour survivre et rester dans la course."
Justine Vassogne