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La nouvelle coentreprise entre Stellantis et Foxconn rebat un peu plus les cartes dans l’automobile

Les compteurs numériques de la Peugeot 308.

Les compteurs numériques de la Peugeot 308. - Peugeot

Les deux partenaires ont annoncé ce lundi la création d’une joint-venture à 50/50 dans le cockpit du futur, Mobile Drive. Au cœur du projet, le logiciel, soit l’une des clés des marges automobiles des prochaines décennies.

"Mobile Drive". En deux termes anglo-saxons se trouve résumé le virage stratégique pris par deux géants chacun dans leur domaine, deux géants désormais partenaires: Stellantis et Hon Hai Precision Industry, plus connu sous le nom de Foxconn.

Infodivertissement, services cloud, cockpit intelligent

Créée officiellement le 23 août, après la signature d’un protocole d’accord en mai dernier, la nouvelle coentreprise Mobile Drive est détenue à 50/50 par le constructeur automobile et l’équipementier. Son but: développer "des solutions d'infodivertissement et de télématique ainsi qu’une plate-forme de services cloud qui visera à fournir une solution complète de cockpit intelligent", précise le communiqué.

Ce cockpit intelligent embarquera à terme "des applications basées sur l'intelligence artificielle, la navigation, l'assistance vocale, les opérations de magasin de commerce électronique et l'intégration de services de paiement".

Devenir leader dans le monde du logiciel embarqué

Mobile Drive doit ainsi permettre à Stellantis de se positionner en leader du logiciel et de la connectivité, "la prochaine évolution majeure dans notre secteur" selon son directeur général Carlos Tavares. Si ces futurs services et cockpits intelligents sont dans un premier temps à destination des marques de Stellantis – de Fiat à Peugeot en passant par Jeep ou Maserati – ils pourront aussi équiper demain des véhicules de marques "tiers".

Constructeur automobile, Stellantis flirte ici avec la sous-traitance. Une pratique déjà courante lorsque des constructeurs vendent par exemple des moteurs ou des boites à d’autres, mais qui désormais s’exercera avec l’intelligence embarquée des véhicules. De quoi contrer les ambitions des géants du numérique et tirer parti de ce qui fera la valeur du véhicule de demain, en plus de la batterie: le logiciel.

Pour y parvenir, Stellantis n’a pas choisi de s’allier aux GAFA, bien en avance dans cette maitrise de la nouvelle échelle de valeur de l’automobile, mais avec Foxconn, le partenaire des GAFA, aussi à l’aise avec ses partenaires outre-Atlantique qu’Asiatiques, notamment dans le monde de l’électronique. Foxconn dispose aussi d’un impressionnant outil industriel qu’il souhaite étoffer dans un nouveau secteur: l’automobile.

Foxconn s'installe dans le monde automobile

Le logiciel et la télématique représentent une porte d’entrée idéale pour Foxconn. Après avoir noué en janvier un accord avec Geely puis en février un autre avec Fisker, pour assembler leurs voitures électriques, Foxconn va désormais travailler avec un des plus grands groupes mondiaux sur l’une des briques clés du véhicule de demain.

En juillet, le groupe taïwanais avait également annoncé être en pourparlers avec le japonais Nidec, pour une éventuelle coentreprise sur le moteur électrique, comme le détaille L’Usine Nouvelle. Le groupe envisage aussi le lancement d’une batterie solide d’ici 2024, comme le rapporte le Taipei Times.

S’allier à Stellantis ouvre à Foxconn un marché potentiel de près de 8 millions de véhicules (selon les chiffres de ventes mondiales 2019 des groupes PSA et FCA) et par là, une crédibilité. Car plus qu’un assembleur reconnu d’objets technologiques, Foxconn veut ici s’imposer comme un acteur à part entière dans un secteur en plein bouleversement, dont la nouvelle répartition de l’échelle de valeur n’est pas encore clairement définie entre constructeurs et sous-traitants historiques, GAFA et nouveaux venus.

Aucune date n’a été donnée pour la sortie des premiers cockpits de la nouvelle coentreprise. Mais cette alliance entre Stellantis et Foxconn incarne pleinement le chamboulement du monde automobile où les frontières traditionnelles se brouillent.

"Tout converge mais personne ne sait qui va en sortir gagnant, nous résume un fin connaisseur du secteur. Tous les acteurs font évoluer leur chaîne de valeur pour capter la marge dans le véhicule de demain, c’est-à-dire dans l'électronique et le logiciel. Mais le champ de bataille ne sera pas conventionnel".
Pauline Ducamp
https://twitter.com/PaulineDucamp Pauline Ducamp Rédactrice en chef adjointe web