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Procès du déraillement mortel du TGV Est: le rôle du chef d'essais au centre des débats

Le TGV victime d'un accident lors d'un essai le 14 novembre 2015, à Eckwersheim

Le TGV victime d'un accident lors d'un essai le 14 novembre 2015, à Eckwersheim - FREDERICK FLORIN / AFP

Le tribunal judiciaire de Paris a examiné, ce lundi 25 mars, le rôle du chef d'essais présent au sein de la rame du TGV qui a déraillé le 14 novembre 2015.

Le chef d'essais de la rame du TGV qui a déraillé le 14 novembre 2015, causant la mort de 11 personnes, avait-il les compétences nécessaires pour occuper cette fonction cruciale? Cette question a préoccupé le tribunal judiciaire de Paris ce lundi 25 mars.

"On ne peut rien reprocher à Freddy M.", a affirmé à la barre Xavier D., lui-même ancien chef d'essais de Systra, la société maître d'œuvre des essais sur la ligne à grande vitesse Est-européenne où s'est produit l'accident.

Freddy M. n'est pas sur le banc des prévenus. Il fait partie des onze victimes de l'accident. Il avait 39 ans. Le tribunal aimerait cependant en savoir davantage et les questions fusent sur sa formation.

Appel au conducteur

Si le tribunal s'intéresse au cas du chef d'essais, c'est parce que ce dernier était "la plus haute autorité à bord". C'est lui qui autorise l'essai. Il peut l'arrêter s'il estime que les conditions de sécurité ne sont plus réunies et il est la seule personne autorisée, pendant la marche d'essai, à communiquer avec l'équipe de conduite.

Lors des débats, il a été démontré que Freddy M., qui se trouvait dans l'avant-dernière voiture de la rame, la "voiture-laboratoire" où 7 des 18 passagers ont trouvé la mort, a contacté par interphone le cadre SNCF en cabine de pilotage chargé de donner les consignes de freinage et d'accélération au conducteur de la rame.

Cet appel, parfois qualifié d'"inopportun" par des témoins, est survenu à un moment où le cadre SNCF devait justement donner ses consignes de freinage au conducteur. Selon l'avocat de la SNCF, Me Emmanuel Marsigny, le chef d'essais aurait demandé à la cabine de pilotage de maintenir une vitesse de 330 km/h, bien au-delà de la vitesse prévue à ce moment-là.

"Peut-on considérer cela comme une erreur?", demande l'avocat. "Oui", concède le témoin. "Sauf danger immédiat, la communication est interdite", ajoute-t-il.

La cause de l'accident est due à une vitesse excessive et à un freinage tardif de la rame, qui transportait 53 personnes, dont 16 agents de Systra et de la SNCF "non opérationnels" et 19 "invités extérieurs", parmi lesquels deux enfants. Au cours des débats, les experts judiciaires ont relevé que Freddy M. "n'avait pas d'expérience dans les essais en survitesse".

Pas de formation spécifique

Lors de son témoignage, Xavier D. a reconnu que Freddy M. n'avait pas reçu de formation spécifique, mais, a-t-il ajouté, "il a reçu un accompagnement sur la description du poste et le rôle qu'il allait occuper".

Interrogée également sur le chef d'essais de la rame, l'ancienne cheffe de projet chez Systra, Hélène E., s'est montrée évasive. "Je ne me souviens pas trop de son parcours et de son CV", a-t-elle dit à la barre.

Systra, la SNCF, SNCF Réseau (gestionnaire des voies) ainsi que trois personnes -Denis T., 57 ans, conducteur titulaire, Francis L., 64 ans, le cadre chargé de lui donner les consignes de freinage et d'accélération, et Philippe B., 65 ans, technicien de Systra chargé de renseigner le conducteur sur les particularités de la voie- sont sur le banc des prévenus.

Ils sont poursuivis pour "homicides et blessures involontaires par maladresse, imprudence, négligence ou manquement à une obligation de sécurité". Le tribunal commencera à les interroger le mois prochain. Le procès est prévu jusqu'au 16 mai.

A.T. avec AFP