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Procès du déraillement mortel d'un TGV à Eckwersheim: les images de l'accident projetées à l'audience pour la première fois

Le deuxième jour du procès du déraillement mortel de ce TGV, qui a fait 11 morts et 42 blessés le 14 novembre 2015, a été teinté d'émotion ce mardi 5 mars. La salle a visionné les images des caméras embarquées du train accidenté.

L'émotion était vive pour ce deuxième jour du procès du déraillement du TGV à Eckwersheim ce mardi 5 mars. Pour la première fois, les victimes et leurs familles ont découvert les images du drame, qui a fait 11 morts et 42 blessés le 14 novembre 2015.

D'emblée, la présidente du tribunal l'annonce: les vidéos qui vont être projetées seront dures à voir pour les parties civiles. Le crash ne dure qu'une poignée de secondes, trop difficiles pour certains parents de victimes qui quittent la salle, submergés par l'émotion.

"On était à la bonne vitesse!"

Lorsque le TGV sort de la courbe qui précède le pont de l'accident, la cabine de conduite perd le contrôle, la locomotive percute la rambarde et termine sa route une centaine de mètres en contre-bas la voie ferrée.

L'effroi qui gagne un instant la cabine, se transforme en un désarroi total. Comment le TGV a-t-il pu dérailler? Une option jamais envisagée, comme le raconte l'enquêteur venu témoigner ce même jour. 

Outre les gémissements de douleur, la caméra embarquée à bord de la cabine de conduite témoigne de la confusion de l'équipage. "On était à la bonne vitesse!", s'étonne une voix. Une autre plus sceptique lui répond "Ça a pas freiné", un troisième interlocuteur estime :"On était à moins de 200 km/h. On verra ça grâce à la machine." Pourtant, lorsque le train entame cette courbe fatale, il circule à une vitesse de 265km/h, bien au-dessus de la limite fixée à 176km/h sur ce tronçon.

L'équipe remarque que tous les autres wagons se sont disloqués. Au bout de la rame, le wagon laboratoire a été propulsé à plusieurs dizaines de mètres des rails. Dans cette voiture, les sièges ont été remplacés par des tables et des chaises non fixées au sol. Autant de mobilier ayant alourdi le bilan humain de l'accident. Le laboratoire comptera le plus grand nombre de morts de ce drame.

Un freinage trop tardif

Au-delà de témoigner de la violence de l'accident, ces vidéos révèlent des inquiétudes antérieures quant au passage du pont d'Eckwersheim. Trois jours avant l'accident, alors que le train est déjà en route, un débat anime la cabine de conduite.

On se demande à quel endroit freiner alors que le train doit passer de 330 km/h à 176km/h en seulement quelques kilomètres. "Des tâtonnements, des approximations" qui "posent question" sur le sérieux de l'opération, d'après l'enquêteur auditionné ce mardi 5 mars.

Cette fois-ci, le conducteur freine trop peu. Rappelé à l'ordre par son supérieur, le train réussit tout de même à franchir le pont malgré une frayeur dans la cabine. "On fera mieux samedi", conclut le cadre traction, responsable de l'équipe de conduite.

Samedi 14 novembre, une minute et trente secondes avant le même passage, alors que le TGV circule à une vitesse de 330 km/h, un débat autour du point de freinage s'entame une fois de plus. Faut-il commencer à ralentir au kilomètre 401 ou au kilomètre 402?

La seconde option est choisie mais à cette distance, impossible de ralentir suffisamment. Lorsque le conducteur entame le freinage, il est déjà trop tard. Quelques instants plus tard, le train déraille.

Revoir ces images était "dur mais nécessaire pour comprendre", a confié à la fin de la projection Agnès Mianney, blessée dans l'accident, et dont le mari, Christophe, salarié de la SNCF est mort dans la voiture-labo.

"Il y a eu une erreur et on espère que les personnes qui ont commis cette erreur le reconnaissent", a-t-elle ajouté dans des propos rapportés par l'AFP. Le procès est prévu jusqu'au 16 mai.

Léo Fleurence avec Fanny Rocher