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Porno, identité numérique, cyberharcèlement: comment la loi SREN veut "sécuriser" internet

Ce mercredi 4 octobre, le projet de loi sur la sécurisation et la régulation de l'espace numérique (SREN) arrive à l'Assemblée nationale. Voici les mesures censées rendre le web plus sûr.

C'est au tour des députés de plancher sur internet. Le projet de loi sur la sécurisation et la régulation de l'espace numérique (SREN) est examiné à partir de ce mercredi 4 octobre à l'Assemblée nationale. Auparavant, une commission spéciale s'est chargée d'étudier le texte et d'y intégrer plus de 200 amendements.

Cette loi doit en partie servir à retranscrire dans le droit français les nouvelles réglementations européennes: le Digital Service Act (DSA) et le Digital Market Act (DMA), tout en allant au-delà sur certains points. Mais quels sont les dispositifs légaux qui doivent rendre la navigation des Français sur le web plus sûre?

Eviter les arnaques en ligne

Parmi les différentes approches, il est proposé de créer un filtre anti-arnaque. Il vise à éviter de se retrouver sur un site malveillant après avoir cliqué sur un lien, généralement reçu par mail ou SMS. Le dispositif permettrait aux internautes d'être redirigés vers un avertissement les alertant du danger.

A terme, l'objectif est d'aboutir au blocage administratif des sites illégaux en question. Pour ce faire, une liste de sites frauduleux ainsi que des accords avec les opérateurs d'accès à internet et les éditeurs de navigateurs web doivent être établis.

Mais la Cnil a déjà prévenu qu'elle resterait vigilante à la mise en œuvre de ce dispositif. Le gendarme des données personnelles a notamment émis des réserves sur les solutions techniques pour attribuer les sanctions.

Vérifier l'âge sur les sites pour adultes

Un volet du projet de loi SREN porte sur le blocage des sites pornographiques. Malgré une précédente loi qui oblige les acteurs du milieu à vérifier l'âge de leurs visiteurs, les démarches de blocage patinent. Notamment en raison de l'absence d'un procédé technique à appliquer.

C'est d'ailleurs pour cette raison que la justice n'a pas bloqué les sites pornographiques début juillet. Qu'à cela ne tienne, le texte débattu par les députés veut donner le pouvoir à l'Arcom. Le gendarme du numérique aurait ainsi directement la possibilité de décider du blocage d'un site pour adultes sans devoir passer par un juge.

La loi prévoit que le pouvoir donné à l'Arcom puisse également servir à bloquer des sites de propagande étrangère. Cela permettrait de faire respecter les interdictions appliquées dans l'Union européenne, notamment à l'encontre des chaînes pro-russes Russia Today et Sputnik. Certains sites de streaming (Rumble et Odysee) avaient diffusé des contenus malgré leur bannissement.

Créer une identité numérique

Une autre partie du projet SREN est consacrée au cyberharcèlement. Au-delà de reprendre des mesures présentes dans le règlement européen du DSA, une mesure de bannissement a été introduite. Un harceleur pourra voir ses comptes supprimés et être empêché de créer un nouveau compte sur un réseau social.

Mais c'est bien la création d'une identité numérique qui devrait animer le plus les discussions. Si elle vise à lever l'anonymat en ligne et limiter le sentiment d'impunité sur internet, certains lui reprochent une "logique liberticide", comme le député RN Aurélien Lopez-Liguori.

Mais le projet de loi intègre également des mesures plus économiques, inspirées des travaux de parlementaires. Ainsi, le gouvernement souhaite permettre aux entreprises de "changer beaucoup plus facilement" de fournisseur d'infrastructure et de services informatiques, également appelés opérateurs cloud. Un secteur dominé par les acteurs américains AWS (filiale d'Amazon), Microsoft Azure et Google Cloud.

Réguler les jeux à objets numériques monétisables

Le texte prévoit notamment de permettre une "portabilité" des données entre les services de ces différentes entreprises et limite l'utilisation des "crédits cloud", des bons d'achat gratuits aujourd'hui utilisés par les acteurs pour fidéliser leur clientèle.

Le Sénat a ajouté lors de l'examen du texte, adopté à l'unanimité le 5 juillet, un volet législatif concernant la réglementation des jeux à objets numériques monétisables (Jonum), supprimant l'habilitation à légiférer par ordonnance prévue par le gouvernement. Le texte propose une première définition en droit de leurs spécificités, entre jeux d'argent et de hasard d'un côté et jeux vidéo de l'autre.

Le Sénat a autorisé à titre expérimental, pour une durée de trois ans, la création des Jonum, tout en l'encadrant pour s'assurer de la protection des mineurs et pour se prémunir des risques de création détournée de casinos en ligne.

Pierre Monnier avec AFP