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Guerre en Ukraine: Twitter bannit "par erreur" des comptes publiant des vidéos de l'invasion russe

Une femme regarde son téléphone mobile près d'une file d'attente de voitures à la frontière entre l'Ukraine et la Russie, au point de passage d'Avilo-Uspenka, le 19 février 2022

Une femme regarde son téléphone mobile près d'une file d'attente de voitures à la frontière entre l'Ukraine et la Russie, au point de passage d'Avilo-Uspenka, le 19 février 2022 - Andrey BORODULIN © 2019 AFP

Plusieurs spécialistes de la vérification d'information ont vu leur compte Twitter temporairement supprimé, alors qu'ils partageaient des vidéos relatant l'évolution des forces russes en Ukraine.

Les réseaux sociaux sont devenus un vecteur d'information essentiel pour documenter le conflit en cours entre l'Ukraine et la Russie. Alors que celui-ci s'est dramatiquement intensifié ces dernières heures avec l'invasion du pays par l'armée russe, de nombreux spécialistes de la vérification d'information authentifient des vidéos, glanées sur TikTok, Snapchat ou encore Telegram, relatant l'évolution des troupes russes sur le territoire ukrainien.

Depuis le 22 février, ce travail est mis à mal par des suppressions temporaires de leurs comptes Twitter, sans explication de la part du réseau social.

Selon le média américain spécialisé The Verge, plusieurs de ces spécialistes de l'Osint, une méthode de recherche qui permet, en s'appuyant sur des informations publiquement accessibles, de mener une enquête en ligne, sont concernés. Parmi eux, Nick Waters, du média d'investigation Bellingcat, spécialisé sur l'Osint, a listé sur Twitter près d'une dizaine de comptes concernés.

Bannissements temporaires

La plupart de ces comptes sont suivis par plusieurs milliers d'abonnés, à l'image de Conflicts, un média anglophone proposant de l'actualité sur les conflits internationaux, suivi par plus de 357.000 internautes. Son bannissement a toutefois été temporaire: le compte est actuellement de nouveau actif. Le compte francophone Neurone Intelligence en a également été victime.

Alexander Oliver, analyste en sécurité, a également été banni deux fois en 24 heures. Comme les autres utilisateurs dans ce cas, il a reçu un email de la part du réseau social, indiquant que plusieurs de ses tweets allaient à l'encontre de ses conditions d'utilisation.

"Selon le support de Twitter, ma publication infirmant la propagande russe va à l'encontre de leurs règles d'utilisation", explique le chercheur dans son tweet.

Twitter s'est exprimé, et explique avoir supprimé les comptes "par erreur".

"Nous avons activement surveillé les formats émergents pouvant aller à l'encontre de nos règles de conduite, et, dans ce cadre, nous avons pris des initiatives contre un certain nombre de comptes par erreur. Nous nous pressons de revenir sur ces actions, et avons déjà commencé à réactiver des comptes affectés. L'affirmation selon laquelle ces erreurs seraient l'oeuvre d'une campagne coordonnée de robots à l'origine de signalements massifs est une erreur", assure une porte-parole de Twitter dans un communiqué relayé par The Verge.

A l'heure actuelle, une majorité des comptes concernés ont effectivement été réactivés par les services de modération de la plateforme. Cette dernière n'a cependant pas mentionné les raisons précises qui ont menées à l'exclusion des comptes.

Aric Toler, directeur de recherche du site Bellingcat, temporise auprès de The Verge. Il indique en effet que ces bannissements sont temporaires, et que les informations partagées ne sont que de la "seconde-main": les vidéos partagées par les spécialistes peuvent être retrouvées sur d'autres réseaux sociaux, tels que Telegram, WhatsApp ou TikTok.

Toutefois, dans le contexte actuel, la communauté des "fact-checkeurs" craint l'action d'une campagne de censure par la Russie, qui se montre très active sur le front de la cyberguerre. Le pays est en effet pointé du doigt pour ses offensives numériques envers l'Ukraine, que cela soit sous forme de cyberattaques ou de campagnes de désinformation en ligne.

Victoria Beurnez