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Les Américains veulent retourner sur la Lune, mais pourquoi?

Le pôle sud de la Lune photographié par la Nasa.

Le pôle sud de la Lune photographié par la Nasa. - NASA - AFP

Face aux avancées de la Chine sur la Lune, les Américains ont en vue le pôle sud du satellite et la glace logée dans ses cratères, qui pourrait être utilisée comme carburant.

Cinq ans. C'est le temps qu'a la Nasa pour renvoyer des Américains sur la Lune, a jugé mardi soir le vice-président des Etats-Unis Mike Pence. Accusant l'agence spatiale américaine d'"inertie bureaucratique" et appelant un "nouvel état d'esprit", il a exigé que les astronautes posent à nouveau le pied sur le satellite avant 2024, contrairement à la date de 2028 avancée jusque-là par la Nasa.

Mike Pence a même un objectif précis: le pôle sud. "Ce siècle-ci, nous retournons sur la Lune avec de nouvelles ambitions. Pas juste pour voyager, mais aussi pour extraire de l'oxygène des roches lunaires qui permettront de réalimenter nos vaisseaux, d'utiliser le nucléaire pour extraire de l'eau des cratères toujours ombragés du pôle sud, et de lancer une nouvelle génération d'engins grâce auxquels nous pourrons atteindre Mars en plusieurs mois, et plusieurs années", a-t-il développé.

Vaste programme donc, poussé par la volonté de Donald Trump de renvoyer des hommes sur la Lune d'ici la fin de son premier ou, plus vraisemblablement, de son éventuel deuxième mandat, mais aussi par les récentes prouesses de la Chine.

Le duel avec la Chine

Dès janvier, celle-ci a fait atterrir sur la face cachée de la Lune un robot, Chang'e-4, pour faire diverses expériences biologiques, des études sur les fréquences radio et prendre des clichés à la surface. La France devrait d'ailleurs envoyer des instruments scientifiques à bord de la mission lunaire chinoise Chang'e-6, à l'horizon 2023-2024.

Les informations collectées sur place devraient servir à la future base lunaire que Pékin envisage de construire. Le documentaire Lune, le huitième continent, réalisé par Véronique Préault et diffusé en janvier sur Arte, expliquait ainsi que la Lune pourrait servir de "marchepied", de plateforme pour aller vers Mars ou plus loin dans le système solaire.

Face à l'éventualité d'une prédominance chinoise sur la Lune, pas question que les Etats-Unis prennent du retard. Mike Pence a confirmé mardi soir à Huntsville, dans l'Alabama, vouloir "renvoyer des astronautes américains sur la Lune dans les cinq prochaines années par tous les moyens nécessaires, établir une présence permanente sur la Lune et se préparer à envoyer des astronautes américains sur Mars".

Le vice-président met pourtant là la charrue avant les boeufs, ou tout au moins avant la grande fusée (Space Launch System) SLS, en cours de construction par Boeing pour la Nasa et marquée par les retards et dépassements de budget. Dans un communiqué, le chef de l'agence spatiale a répondu qu'elle serait prête en 2020, avec un an d'avance.

"Si les sous-traitants actuels ne peuvent atteindre cet objectif, nous en trouverons d'autres qui y parviendront", a menacé Mike Pence. "Si les fusées privées sont la seule façon de ramener des astronautes américains sur la Lune dans cinq ans, alors ce seront des fusées privées", a-t-il lâché, sans citer SpaceX qui a pourtant récemment réussi le retour sur Terre d'un module censé transporter des Américains vers la station spatiale internationale (ISS) d'ici la fin de l'année.

Reste le problème du pôle sud en lui-même. "Le pôle sud est un endroit formidable pour y envoyer des humains et nous devons le faire", reconnaît dans les colonnes de Wired Ryan Watkins, chercheur au Planetary Science Institute de l'Arizona. Néanmoins, son orientation pourrait interférer dans les communications entre la Terre et les astronautes, et le terrain est plus accidenté que d'autres régions.

La Nasa s'estime "à la hauteur"

Sans même parler de la consistance de la glace qui s'y trouve, de la manière de l'extraire et de comment la transformer en carburant. "Avant de poser les pieds sur les pôles, nous devons absolument une mission robotisée pour étudier la glace d'eau sur les pôles lunaires", avertit Jack Burns, un astrophysicien ayant travaillé pour la Nasa, auprès de Wired.

"Je sais que la Nasa est à la hauteur pour relever le défi de retourner sur la Lune, cette fois-ci pour y rester", a pourtant réagi mardi soir l'administrateur de la Nasa, après le discours de Mike Pence.
Liv Audigane