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Âge, sexe, corpulence: pourquoi certains d'entre nous sont-ils plus frileux?

Des températures froides touchent cette semaine une bonne partie du pays. Certains, plus "frileux", subiront plus difficilement la baisse du mercure. Les raisons de ces écarts sont biologiques.

Êtes-vous plus frileux que les autres? Cette semaine, la France est touchée par un épisode de fraîcheur exceptionnel, au milieu d'un hiver autrement plutôt doux. Si certains grelottent sous leur écharpe, d'autres arpentent les rues avec une tenue légère.

Une différence de ressenti du froid qui s'explique sur le plan biologique et physiologique, comme le décrypte pour BFMTV.com Cédric Moro, directeur de recherche à l'Inserm et docteur en physiopathologie.

"Il existe différents facteurs expliquant les différences de sensations ou perception du froid".

Le premier élément déterminant: le sexe. Oui, les femmes sont plus frileuses que les hommes, à un certain degré. Leur masse musculaire est, d'une manière générale, plus faible que celle d'un homme, or, elle joue un rôle prédominant dans la production de chaleur.

Respectivement, les muscles représentent 28% et 35% des compositions. Ce qui n'empêche pas que des femmes soient plus musclés que des hommes - ou l'inverse.

Une question d'hormones

Autre écart lié au sexe, du côté des hormones. Dimitra Gkika, professeure en physiologie à l'université de Lille et membre du Laboratoire Canther, a étudié le rôle de la testostérone chez les animaux:

"La testostérone va inhiber le récepteur au froid TRPM8. Il détecte normalement la baisse de température au niveau des neurones sensoriels de la peau. La testostérone peut inhiber l'activité de ce récepteur jusqu'à 70%" (Gkika et al 2022 Faseb Journal).

Ce phénomène explique tant la différence entre les deux sexes qu'entre les hommes plus jeunes et plus âgés. Une fois la testostérone en baisse dans l'organisme, une frilosité 30 à 50% plus importante peut apparaître.

"Le taux de testostérone chez l'homme augmente pendant la puberté avec un pic à la vingtaine. Il commence à chuter à la trentaine en fonction des profils, mais nous pouvons observer une diminution assez importante après la cinquantaine", précise la chercheuse lilloise.

"Graisse brune"

Toujours sur la question de l'âge, la masse musculaire entre à nouveau en compte. Comme le note Cédric Moro, à partir de la trentaine, celle-ci diminue de 3 à 5% par décennie chez les individus. Or, la perte de ce "site crucial de production de chaleur" entraîne une plus forte sensation de froid.

L'âge implique aussi la disparition de notre "graisse brune", un tissu adipeux qui brûle des calories pour fabriquer de la chaleur. Une graisse peu présente chez les personnes en surpoids et obèse, qui ont davantage de "graisse blanche".

"Cette 'graisse blanche' joue toutefois un rôle isolant chez les personnes en surpoids. Elle agit un peu comme le feraient plusieurs couches de vêtements", résume le chercheur de l'Inserm.
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En compilant tous ces facteurs, des températures idéales différentes se dessinent en fonction des individus. Un homme moyen âgé de 20 à 30 ans, d'un poids normal, connaît une "thermoneutralité" à 22 à 24°C. Chez une femme, elle se situe à 24-25°C. D'où la difficulté de s'accorder sur la température idéale dans des bureaux, par exemple.

Évolution et pilosité

Un dernier élément peut intervenir, l'évolution et les spécificités génétiques. Il a par exemple été constaté que les Inuits connaissent des taux de graisse blanches et brunes plus importantes. Potentiellement une réponse à la vie dans un milieu hostile en raison des températures glaciales.

Dans une moindre mesure, les personnes finlandaises semblent moins frileuses, potentiellement en raison de leur exposition "aux stress thermiques importante", selon Cédric Moro. Leur seuil de reconnaissance du froid serait donc plus élevé.

Un trait semble cependant dérisoire, la pilosité. Ce vestige de l'évolution jouerait désormais un intérêt "marginal" dans la perte de chaleur chez l'Homme, et donc, le sentiment de froid.

Tom Kerkour