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Parlement

Prostitution: le Sénat supprime la pénalisation des clients

Un panneau signalant aux clients de prostituées qu'ils sont filmés par des caméras de vidéo-surveillance, le 13 février 2014 à La Madeleine, près de Lille.

Un panneau signalant aux clients de prostituées qu'ils sont filmés par des caméras de vidéo-surveillance, le 13 février 2014 à La Madeleine, près de Lille. - -

Le Sénat a adopté mardi 8 juillet le projet de loi visant à renforcer la lutte contre la prostitution. Un aspect-clé du texte a cependant été supprimé: la pénalisation des clients.

Il s'agissait de l'une des dispositions principales de la proposition de loi renforcant la lutte contre la prostitution en France.

La commission spéciale du Sénat a supprimé la pénalisation des clients en adoptant ce projet de loi mardi, après "plus de deux heures de discussion" selon la sénatrice EELV Esther Benbassa, membre de la commission.

Cette disposition prévoyait de punir d'une contravention de 1.500 euros l'achat d'actes sexuels. 16 voix ont voté pour sa suppression au sein de la commission, contre 12 contre et deux abstentions.

"Nous avons mis en avant la précarisation des prostituées que la pénalisation entraînerait forcément, avec des clients plus rares qui pourraient imposer leurs désirs et des prostituées obligées de se cacher. L'exemple de la Suède nous montre que cela ne fonctionne pas", a affirmé Esther Benbassa.

Un amendement possible mais peu probable

Plusieurs membres de la commission spéciale, dont le sénateur PS Jean-Pierre Godefroy, président de la commission, avaient fait part à plusieurs reprises de leurs réserves sur cette partie du texte.

La pénalisation des clients peut cependant revenir par un amendement en séance au Sénat. Mais la proposition de loi, déjà adoptée en décembre par l'Assemblée nationale, n'est pas encore programmée au Sénat. Après ce vote, Esther Benbassa estime qu'il ne sera "pas programmé en séance".

La proposition de loi se base sur l'exemple suédois qui pénalise les clients depuis 1999. Le texte prévoit aussi l'abrogation du délit de racolage, ainsi que des mesures d'accompagnement social et professionnel pour celles qui veulent quitter la prostitution. Le Sénat a renforcé ces mesures, a précisé la sénatrice Esther Benbassa.

"Réduire la demande"

Mais pour les partisans de la pénalisation, dont la ministre des Droits des femmes Najat Vallaud-Belkacem, ceux qui ont recours à la prostitution ne doivent pas ignorer qu'ils alimentent les réseaux criminels.

Dans un communiqué commun, deux députées PS membres de la Commission spéciale "système prostitutionnel" de l'Assemblée nationale, Maud Olivier, auteur de la proposition de loi, et Catherine Coutelle, ont également souligné que "si la loi ne prend pas en compte la nécessité de réduire la demande autant que les autres aspects, la loi ne sera pas efficace".

La ministre de la Justice, Christiane Taubira, avait cependant souligné qu'il ne fallait pas sous-estimer les inquiétudes des associations, lors de son audition devant la commission spéciale. En cas de pénalisation des clients, plusieurs associations craignent en effet de voir les prostituées se retirer dans des lieux plus cachés.

V.P. avec AFP