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Mouvement des contrôleurs SNCF: la droite et le centre s'attaquent au droit de grève

Au Sénat, les Républicains soutiennent une proposition de loi de l'UDI visant à interdire pendant 60 jours le dépôt de préavis de grève, tandis qu'à l'Assemblée, d'autres textes vont être déposés.

Vers une limitation du droit de grève, pourtant inscrit dans la Constitution? La mobilisation des contrôleurs SNCF en pleine période de vacances scolaires fait réagir à droite et au centre de la classe politique. Républicains, Modem et même LIOT (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires) ont tous une bonne idée pour mettre fin à ces grèves "qui prennent en otage" les Français, selon les mots de Gérard Larcher sur BFMTV jeudi 15 février.

Soixante jours d'interdiction à répartir sur l'année

Le président Les Républicains du Sénat soutient la proposition de loi du sénateur UDI Hervé Marseille, qu'il souhaite voir inscrite au plus vite à l'ordre du jour.

Le président du groupe centriste au Sénat, allié de la droite à la chambre haute, propose d'instaurer un délai allant jusqu'à soixante jours où il ne pourra pas y avoir de dépôt de préavis de grève.

L'idée de cette loi déposée mercredi: donner sa chance à la négociation et sacraliser "les départs en vacances, Noël, Pâques, les vacances de février", selon les souhaits du sénateur des Hauts-de-Seine .

"La grève, ça doit être l’arme ultime (...) à l'issue d’une négociation sociale", juge Gérard Larcher. "Là on le voit bien, c'est devenu un instrument de négociation", a regretté jeudi sur BFMTV-RMC celui qui fut ministre délégué à l'Emploi, au Travail et à l'Insertion professionnelle des jeunes, sous Jacques Chirac, entre 2005 et 2007.

Un projet de loi "travaillé avec des constitutionnalistes"

Cette loi veut s'appuyer sur le modèle italien qui permet de limiter la grève sur les périodes de vacances scolaires. Pour le centriste Hervé Marseille, cette proposition de loi ne porte pas atteinte au droit de grève, droit à valeur constitutionnelle en France.

"Tous les droits sont égaux", s'est expliqué ce jeudi Hervé Marseille sur France info. Il veut "concilier les droits des uns et des autres".

Tout comme "le droit d'entreprendre, le droit au travail, le droit de circuler", a-t-il précisé. Droits qui peuvent, selon lui, être bafoués lors des grèves dans les transports publics.

Une fois dans l'hémicycle, cette loi a toutefois peu de chance de séduire la gauche, historiquement réfractaire aux lois sur le droit de grève. Ensuite, elle risque de se cogner à la censure du Conseil constitutionnel. Pour se prémunir de ce dernier obstacle, le sénateur UDI a pris soin de "travailler avec des constitutionnalistes", a-t-il annoncé.

Dans l'hypothèse d'une adoption, cette loi permettrait au gouvernement de prendre un décret trois mois avant le 1er janvier, en septembre, après discussions avec les syndicats, "pour neutraliser des dates où il ne pourrait pas y avoir de préavis de grève", a encore indiqué le sénateur des Hauts-de-Seine .

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Nouvelles propositions à l'Assemblée

Une ligne qui séduit Les Républicains. Le député Éric Ciotti avait ainsi précédé médiatiquement Gérard Larcher en annonçant sur TF1 jeudi 15 février qu'il allait déposer plusieurs textes sur le dossier. "Il faut dire stop aux prises d'otage", a-t-il tonné. Ces grèves sont selon lui "indignes des Français".

Cest une "surenchère permanente", a-t-il encore dénoncé avant d'indiquer: "Nous allons très clairement poser des textes législatifs pour encadrer le droit de grève".

En déplacement à Vénissieux (Rhône), le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes Laurent Wauquiez va dans le même sens: "Aujourd'hui, on a des Français en colère par rapport à cette grève. Les Républicains vont assumer leur responsabilité en déposant une proposition de loi destinée à interdire les grèves sur les périodes scolaires".

En février 2020, les sénateurs Les Républicains avaient déjà déposé une proposition de loi "tendant à assurer l'effectivité du droit au transport, à améliorer les droits des usagers et à répondre aux besoins essentiels du pays en cas de grève". Le texte n'avait pas prospéré au Parlement.

Le groupe LIOT, enfin, s’apprête à emboîter le pas de ses confères LR. Selon les informations de Politico, le député Christophe Naegelen va déposer un texte "allant dans le sens de celui de Marseille, avec qui il s’est coordonné", leur indiquait un cadre du groupe. Dans le but de permettre aux familles là aussi de s'organiser au mieux.

Le RN soutient le mouvement

À contre-courant, le Rassemblement national donne de la voix aux côtés des contrôleurs. Invité sur BFMTV mardi 13 février, Sébastien Chenu a admis comprendre le mouvement "sur le fond", mais en désapprouver "la forme".

"Je ne reprocherai jamais à des Français qui se lèvent tôt de défendre leur pouvoir d'achat", s'est expliqué le vice-Président de l'Assemblée nationale, assumant de porter le costume social de ce mouvement à droite.

De son côté, Jean-Philippe Tanguy a regretté sur notre antenne jeudi soir que les revendications des contrôleurs ne soient pas suivies d'une plus grande solidarité de la part des usagers, arguant que la défense des salaires prime sur tout. Une façon pour les députés RN de se démarquer des Républicains dans l'hémicycle.

Selon une enquête Elabe pour BFMTV publiée mercredi 14 février, 27% des Français ont une opinion positive du mouvement contre 52% qui y sont opposés. Le tout à l'approche des Jeux olympiques de Paris.

Hortense de Montalivet