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Gouvernement

"Ne pas brusquer les choses": pour Élisabeth Borne, "le pays a besoin d'apaisement"

La Première ministre prend quelques distances avec la stratégie du président de la République, concernant les oppositions et les syndicats. "Nous devons être extrêmement attentifs à ne pas brusquer les choses, il faut laisser reposer. Le pays a besoin d’apaisement", avertit-elle.

Un pas de côté d'Élisabeth Borne. Dans Le Monde et Le Point, La Première ministre fait savoir, entre les lignes, ses désaccords avec Emmanuel Macron. Ce dernier lui avait donné une feuille de route le 22 mars dernier lors d'une interview télévisée, en l'appelant notamment à reprendre langue avec les syndicats et à "élargir la majorité".

Ces mots peuvent "crisper" les oppositions, selon la cheffe du gouvernement, qui souhaite conserver la méthode utilisée depuis le début de la législature, soit la recherche d'accord texte par texte.

"Il n’y a pas d’autre alternative à court terme", d'après elle.

La droite refuse toute coalition

Il faut dire que la feuille de route que lui a confiée le président de la République a tout d'une mission impossible. La droite, qui a voté plusieurs textes des macronistes depuis le début de la législature, refuse quelconque coalition avec le camp présidentiel.

Éric Ciotti, l'a rappelé dans un entretien au Figaro, le président du parti Les Républicains prévenant au passage que "tout débauchage individuel contribuera à une radicalisation des positions".

A gauche, où les élus du Parti socialiste sont surtout "des enfants de la Nupes (Nouvelle union populaire écologique et sociale), Matignon n'a guère d'espoir, non-plus, apprend-on encore dans Le Monde.

Pour autant, la Première ministre s'est entretenue avec Nicolas Mayer-Rossignol, numéro deux du PS, représentant d'une ligne très critique de la Nupes, comme l'ont relevé plusieurs médias. Le maire de Rouen a confié à Libération qu'il n'avait pas été question d'éventuelles relations pour la suite, en écartant toute "compromission" ou "ambiguïté".

"Redonner du souffle et du sens à l'action"

Concernant les syndicats, Élisabeth Borne fait, là-aussi, entendre sa petite musique. L'ancienne ministre des Transports appelle à "respecter une période de convalescence".

"Nous devons être extrêmement attentifs à ne pas brusquer les choses, il faut laisser reposer. Le pays a besoin d’apaisement", dit-elle.

Tout en avertissant: "Il ne faut pas que les syndicats sortent humiliés de cette séquence". Difficile de ne pas faire un lien avec l'attitude d'Emmanuel Macron, qui ne cesse - par la voie de son entourage ou lors de son interview sur France 2 et TF1 - de tacler Laurent Berger. En retour, le numéro 1 de la CFDT l'appelle à "garder ses nerfs".

Pour la suite, Élisabeth Borne souhaite redonner "un cap" au pays.

"Avant d’aller chercher des alliés pour voter les textes, c’est important que l’on dise où l’on veut aller, Il faut redonner du sens et du souffle à l’action. Je ne suis pas simplement là pour administrer le pays", lâche-t-elle.

Réponse lapidaire de l'Élysée: "Le président de la République coordonne avec la Première ministre. Le cap a été donné par le président de la République lors de son interview du 13 heures sur France 2 et TF1". Tout sauf une inflexion donc.

"Ce n'est pas le moment de donner des coups de volant"

À l'Élysée, tous les scénarios sont examinés, y compris un départ de l'actuelle locataire de Matignon, indique Le Monde. Mais si la principale intéressée refuse d'en "faire une question de personne", elle pense que le temps n'est pas au chant du cygne, mais plutôt à la stabilité.

"On sort d’une opposition frontale. Le pays est en état de sidération, les gens sont un peu K.-O., il faut respecter un temps de décantation. Ce n’est pas le moment de donner des coups de volant."

En substance, Élisabeth Borne confie avoir quelques remords, dont celui de ne pas s'être rendue compte assez tôt de l'ampleur des divisions du parti Les Républicains, lesquelles ont empêché la macronie de s'assurer une majorité absolue sur son texte.

"On sera plus prudents pour l'avenir", promet la Première ministre. Reste à savoir si cet avenir s'écrira avec elle à Matignon ou non.

Baptiste Farge