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Gouvernement

L'université d'été de la Défense s'ouvre sous fond d'inquiétudes budgétaires

Emmanuel Macron et François Lecointre, le nouveau chef d'état-major des Armées.

Emmanuel Macron et François Lecointre, le nouveau chef d'état-major des Armées. - Arnold JEROCKI / POOL / AFP

François Lecointre, qui a succédé au général Pierre de Villiers, a appelé ce lundi à redonner de la "marge" à l'armée française. L'exécutif étudie plusieurs pistes pour tenir ses engagements budgétaires.

La quinzième université d'été de la Défense s'est ouverte à Toulon ce lundi et se tient jusqu'à mardi. Pour cette édition organisée autour du thème "5 ans pour la défense: menaces, ambitions, moyens", il sera notamment question de la loi de programmation militaire. L'actuelle, adoptée en 2013, couvre la période 2014-2019 et a constitué la première étape de la mise en oeuvre des orientations contenues dans le Livre blanc de la défense. La prochaine, pour 2019-2025, est marquée par l'objectif de porter le budget de la Défense française à 2% du PIB, soit 50 milliards, en six ans. Elle devrait être soumise au Parlement avant l'été 2018.

Un événement marqué également par la présence de la nouvelle ministre des Armées, Florence Parly, et du nouveau chef d'état-major, François Lecointre. Mais le rendez-vous s'ouvre surtout moins de deux mois après la démission de l'ancien chef des Armées, le général de Villiers, à l'issue d'un bras de fer avec le président de la République sur les coupes budgétaires de 850 millions d'euros prévues par Bercy.

"Les militaires n'ont pas d'états d'âme"

Depuis cette crise inédite dans l'histoire de la Vème République, en plein mois de juillet, l'exécutif veut croire que tout va pour le mieux, mais la tension n'est pas redescendue. Sans doute en partie à cause des récentes déclarations d'Emmanuel Macron sur ce qu'il a qualifié de "tempête dans un verre d'eau" lors de son entretien fleuve au Point. Emmanuel Macron assure ne pas avoir de "regret" et assumer son "je suis votre chef", envoyé aux militaires en plein coeur de l'été. Il va jusqu'à nier l'idée même que cet épisode ait constitué une "crise".

"Il y a eu une tempête dans un verre d'eau car les gens ont perdu le sens de ce qu'est la Ve République et de son fonctionnement. D'ailleurs, si je n'avais réagi comme je l'ai fait, les mêmes auraient dit que j'étais un chef des armées faible. Les armées ne font pas ce qu'elles veulent, elles ne sont pas autopilotées", martèle le chef de l'Etat.
"Les militaires n'ont pas d'états d'âme", estime aussi Jean-Jacques Bridey, le président LREM de la Commission de la défense à l'Assemblée nationale, ce lundi dans Le Figaro. D'après lui, la démission de Pierre de Villiers ne laissera tout simplement pas de traces. 

Redonner de la "marge" à une armée surengagée

Pourtant, une certaine inquiétude transparaît dans les déclarations de François Lecointre lors de la première journée de cette université. Pour son premier discours public depuis sa prise de fonction, il a jugé indispensable que redonner de la "marge" à une armée française surengagée. 

"Il faudra faire des choix entre la régénération nécessaire de nos armées qui sortent d'années très difficiles de contrainte budgétaire accompagnées par le surengagement", a-t-il déclaré, "mais également des choix de renouvellement et des choix de modulation de nos engagements". 

Pour donner des gages aux militaires, l'exécutif a annoncé que le budget de la Défense serait augmenté en 2018, pour atteindre 34,2 milliards d'euros, contre 32,7 milliards en 2017. Parmi la somme finale, 650 millions d'euros seront réservés aux opérations extérieures. "Durant le quinquennat qui vient, nous dépenserons 1,6 milliard de plus chaque année", a précisé Emmanuel Macron dans son interview au Point.

10 milliards d'euros à trouver en 3 ans

Mais cette hausse ne permettra pas d'atteindre l'objectif fixé des 2% du PIB en 2025, rappelé par le président de la République devant les ambassadeurs à la fin du mois d'août. Au rythme d'une augmentation d'1,6 milliard par an, le budget devrait atteindre 40,7 milliards en 2022, à la fin du mandat d'Emmanuel Macron. Il restera donc 10 milliards d'euros à trouver pour atteindre les 50 milliards visés trois ans plus tard, en 2025.

Comme le rapporte L'Opinion ce lundi, l'exécutif pourrait étudier plusieurs pistes pour tenir ces prévisions budgétaires. Comme le laisse entendre François Lecointre en évoquant la "modulation" de certains engagements, il pourrait s'agir de réduire l'ampleur de certaines opérations militaires. Comme par exemple Barkhane au Mali, qui comprend 4.000 soldats. Dans le cadre du G5 Sahel (Mauritanie, Tchad, Mali, Niger et Burkina Faso) la France pourrait être relayée en partie par l'armée locale et les casques bleus déployés dans le cadre de la Minusma, la mission de l'ONU dans le pays.

Refonte de l'opération Sentinelle

Depuis le mois d'août, il est aussi question d'une remise à plat de l'opération Sentinelle. En mai 2016, le Haut comité d'évaluation de la condition militaire notait dans un rapport cité par La Croix que "l'ampleur des effectifs déployés en fait la première des opérations dans lesquelles les armées sont engagées". Le dispositif Sentinelle sollicite en effet 10.000 soldats, dont 3.000 en réserve et aboutit notamment à une réduction du temps d'entraînement pour les militaires. L'armée de terre, qui en est le premier contributeur, souhaiterait passer à nouvelle répartition, avec un tiers des effectifs déployés sur le terrain, un tiers en réserve pour certaines occasions et un dernier tiers à l'entraînement. 

Charlie Vandekerkhove