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Emmanuel Macron propose d'élargir le champ du référendum

Devant le Conseil constitutionnel, le chef de l'État a expliqué vouloir élargir le champ du référendum, aux contours actuellement très stricts tout comme à "la simplification" du référendum d'initiative partagée, tout en se gardant d'un mode d'emploi précis.

L'entourage d'Emmanuel Macron avait promis un évènement "particulièrement important" dans le champ des institutions. C'est chose faite. Le président a annoncé, ce mercredi lors d'un discours devant le Conseil constitutionnel, sa volonté de mener "à son terme" l'élargissement du champ du référendum.

"Le champ du référendum doit pouvoir s'ouvrir", a expliqué le chef de l'État ce mercredi matin à l'occasion du 65ème anniversaire de la Constitution.

Ouvrir la porte à un référendum sur l'immigration

En l'état actuel de la loi fondamentale, l'article 11 pose clairement les bases d'une consultation des Français. Elle ne peut porter que "sur l'organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique ou sociale de la nation et aux services publics qui y concourent".

Très concrètement, cette annonce devrait permettre à davantage de sujets d'être soumis au référendum. De quoi faire plaisir à Éric Ciotti (LR) et Jordan Bardella (RN) qui exhortent Emmanuel Macron à consulter les Français sur l'immigration ?

Rien n'est moins sûr: "étendre le champ du référendum ne peut permettre de se soustraire aux règles de l'État de droit", a précisé le dirigeant alors que la droite appelle à l'utiliser pour s'affranchir du doit européen sur la politique migratoire.

Vers une "simplification" du RIP

Autre annonce: le président souhaite "simplifier" la procédure du Référendum d'initiative partagée (RIP), sans plus de détails. Tout juste-a-t-il convenu que ces dispositions "devraient être revus".

Rejetée à deux reprises sur la réforme des retraites, cette disposition institutionnelle est très cadrée et n'a jusqu'ici jamais été appliquée depuis sa création en 2008.

À l'instant T, toute demande de RIP doit d'abord être validée par le Conseil constitutionnel avec un champ d'application très précis. En cas d'accord des Sages, il faut ensuite que cette demande de référendum parvienne à récolter la signature d'un "dixième des électeurs", soit 4,87 millions de personnes dans un délai de 9 mois et celle de 185 députés.

Une fois les paraphes récoltés, le Sénat et l'Assemblée dispose d'un délai de six mois pour examiner la proposition de loi soumise au RIP (ce délai est suspendu entre deux sessions ordinaires). Si la proposition n’est pas examinée par le Parlement, le président de la République est tenu d’organiser un référendum sur la proposition de loi.

Le chef de l'Etat ne veut pas cependant pas remettre en cause l'un des limites du RIP: l'abrogation d'une disposition législative promulguée depuis moins d'un an, ce qui a bloqué la démarche de la gauche sur les retraites.

La main au Parlement

Les mots du président, qui s'est bien gardé d'être précis que ce soit en termes d'agenda ou de contenu précis, peuvent-ils avoir des conséquences concrètes ? Rien n'est moins sûr.

Pour ce faire, il faudrait que le projet de loi qui modifie les termes de la Constitution soit adopté dans les mêmes termes à l'Assemblée nationale et au Sénat avant d'être ensuite soumis au vote des trois-cinquièmes des parlementaires réunis en congrès ou via un référendum devant les Français.

Comprendre: la manœuvre n'est pas gagnée en l'absence de majorité absolue à l'Assemblée nationale pour la macronie et d'un Sénat très à droite. Le président pourrait cependant compter sur un relatif consensus de la classe politique.

Réunis lors des rencontres de Saint-Denis, un accord avait semblé se dégager sur la nécessité d'élargir le champ du référendum. Emmanuel Macron avait d'ailleurs promis dans une lettre aux chefs de partis début septembre qu'il ferait bientôt "une proposition sur ce sujet".

Une première tentative avait déjà échoué

Ses propos devant le Conseil constitutionnel ont en tout cas l'avantage de renvoyer la responsabilité aux oppositions. En cas de blocage, le chef de l'État aura beau jeu de dire qu'il a tout faire pour élargir la possibilité de lancer un référendum, en renvoyant la responsabilité sur les autres camps politiques.

Lors de son précédent quinquennat, Emmanuel Macron avait échoué à faire aboutir la réforme qui voulait introduire une dose de proportionnelle dans l'élection des députés tout en réduisant leur nombre. Le texte n'avait en effet jamais été présenté au Sénat, dans un contexte politique pourtant bien plus favorable. Autant dire que l'atterrissage des annonces présidentielles n'est pas pour demain.

Marie-Pierre Bourgeois