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Jean-Luc Mélenchon lors de la marche pour la 6ème République

Christophe ARCHAMBAULT / AFP

"La lutte continue": bloqué aux portes du second tour, Mélenchon s'impose comme le leader à gauche

Le député des Bouches-du-Rhône, candidat pour la troisième reprise à l'élection présidentielle, a obtenu 21,95% des voix.

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Un mois après, la sentence est cruelle: "Cette présidentielle, je la sens bien", lâchait Jean-Luc Mélenchon dans un entretien au Journal du dimanche, le 13 mars dernier. Le couperet est tombé ce dimanche à 20 heures. En dépit de la bonne dynamique enregistrée ces dernières semaines, le leader de La France insoumise (LFI) échoue à se qualifier au second tour de la présidentielle.

Avec 21,95% des voix, selon les résultats communiqués par le ministère de l'Intérieur sur la base de 97% des électeurs inscrits, le tribun est tenu en échec aux portes du second tour par le sortant Emmanuel Macron et la candidate du Rassemblement national (RN) Marine Le Pen. "Il ne faut pas donner une seule voix à Mme Le Pen", a-t-il exhorté dimanche soir après l'annonce des résultats.

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Jean-Luc Mélenchon reste donc au pied du podium, dominé par les deux finalistes de 2017. Emmanuel Macron a récolté 27,6% des suffrages (24,01% en 2017) et Marine Le Pen 23,41% (21,3% en 2017). Les appels au "vote efficace" à gauche lancés par les insoumis n'ont pas porté les fruits escomptés. Il y a cinq ans, Jean-Luc Mélenchon était arrivé quatrième avec 19,58% des suffrages, dans un mouchoir de poche avec François Fillon, lui à 20,01%.

Dynamique dans les sondages

"La dernière fois, tout s'est joué en un mois", analysait auprès de BFMTV.com Antoine Léaument, responsable de la communication numérique de Jean-Luc Mélenchon, en février.

De fait, Jean-Luc Mélenchon a connu une hausse régulière dans les enquêtes d'opinion ces derniers mois. Vendredi, à quelques heures de la fin de la campagne officielle, il était donné à plus de 17% d'intentions de vote. Il était autour de 8% début janvier. Il a donc déjoué les dernières tendances.

Maigre consolation pour le candidat déçu, Jean-Luc Mélenchon s'assure par son résultat la place de leader à gauche, s'imposant très largement en tête devant l'écologiste Yannick Jadot (4,58%), la socialiste Anne Hidalgo (1,74%) et les candidats anticapitalistes Philippe Poutou (0,77%) et Nathalie Arthaud (0,57%). Une stature qui ne devrait pas satisfaire l'écologiste et la socialiste, tant ces derniers ont ciblé "l'insoumis" ces dernières semaines, sur sa personnalité, sa capacité à rassembler ainsi que sur ses positions sur la Russie et l'invasion de l'Ukraine.

Auprès de BFMTV la semaine passée, le directeur de campagne de Jean-Luc Mélenchon, Manuel Bompard, soulignait l'importance pour les insoumis d'affermir ce statut de leader incontesté à gauche, tout en tempérant. "Le second tour est vital... Si on n'est pas au second tour, ça sera plus difficile (de prendre le leadership, NDLR)", estimait-il.

"Un seul objectif: être au deuxième tour"

Lancé tôt dans la course à l'Élysée en novembre 2020, la cadence s'est réellement accélérée au cours des dernières semaines. La campagne a été pensée avec une montée en puissance sur le mois écoulé. "Avant, je ne voulais pas trop me montrer", a confié le candidat à BFMTV il y a quelques jours.

C'est mi-janvier que la campagne a réellement démarré pour les équipes, avec le grand meeting "immersif et olfactif" de l'ancien socialiste à Nantes. Une rencontre qui avait marqué les esprits, saluée même à l'opposé du spectre politique - le directeur des événements d'Eric Zemmour, Olivier Ubéda, avait témoigné de son "respect professionnel pour la belle scénographie du meeting-conférence".

"Il est dans sa campagne, tourné vers un seul objectif, être au deuxième tour", déclarait Antoine Léaument mardi.

En fin de semaine, Jean-Luc Mélenchon apparaissait en forme, détendu, mais sans être certain de figurer dans le duo de tête et d'accéder au second tour. "Des millions de gens vont voter pour le programme l'Avenir en commun", retenait-il.

En meeting à Lille mardi, avec le retour de ses hologrammes dans onze autres villes, l'ancien sénateur de l'Essonne a déclaré, à la fin: "Je ne prépare pas une autre élection, j'ai fait le boulot." Rempilera-t-il pour un nouveau mandat de député des Bouches-du-Rhône? Il "n'arrêtera pas", indiquent ses proches, sans vouloir toutefois dire s'il sera candidat aux législatives.

"Un autre monde est possible"

Vendredi, juste avant le premier tour, le leader insoumis a bénéficié d'un soutien de dernière minute: Christiane Taubira, qui a retiré sa candidature il y a quelques semaines faute d'avoir récolté les 500 parrainages requis, a annoncé dans un communiqué que son suffrage irait à Jean-Luc Mélenchon pour "barrer la route" à l'extrême droite, jugeant que l'arrivée au pouvoir de cette dernière devenait "plausible à l'échéance de cette élection présidentielle".

"Un autre monde est possible", avait lancé Jean-Luc Mélenchon le 20 mars, place de la République à Paris à l'issue de sa marche pour la VIe République. "Ne vous cachez pas derrière les divergences, derrière les chefs, ne vous dérobez pas", avait-il exhorté. La France insoumise avait revendiqué 100.000 participants à la marche.

Une démonstration de force qui n'aura pas suffi pour que Jean-Luc Mélenchon parvienne à se hisser, pour la première fois après ses tentatives de 2012 et 2017, au second tour de l'élection présidentielle. "Ne nous cachons pas la violence de la déception", a-t-il dit à propos de son propre score ce dimanche. "La violence de la déception, elle est d'abord en pensant à tout ce qui aurait été entrepris et qui ne le sera pas".

"Mais en même temps, comment se cacher (...), aussi, la fierté du travail accompli? Le pôle populaire existe! Si nous n'y étions pas, que resterait-il? Qu'aurions-nous? Rien! Et nous avons construit cette force", a-t-il estimé.

"Alors bien sûr, les plus jeunes vont me dire: eh bien, on n'y est encore pas arrivé! C'est pas loin...", a lancé Jean-Luc Mélenchon. "Je n'ai bonne mine, ni envie d'être réconforté." Pour le leader insoumis, "la lutte continue".

Perrine Vasque et Clarisse Martin