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Couvre-feu pour les mineurs: quel bilan les maires qui l'ont instauré ces dernières années en tirent-ils?

Couvre-feu (illustration)

Couvre-feu (illustration) - AFP

Avant le maire de Nice, Christian Estrosi, qui a annoncé ce mardi 23 avril qu'il allait réinstaurer un couvre-feu pour les moins de 13 ans pour toute la ville, plusieurs maires français ont déjà testé la mesure pour enrayer la délinquance des mineurs. Avec des bilans différents. Une mesure qui ne peut pas être une réponse de long terme, pour certains syndicats.

Une mesure "efficace". Le maire de Nice, Christian Estrosi, a annoncé ce mardi 23 avril sur BFMTV-RMC son intention de renouveler l'instauration d'un couvre-feu pour les mineurs de moins de 13 ans, après avoir pris un arrêté en ce sens en 2009, qui a "montré son efficacité", selon lui.

"C'est une des bonnes mesures qu'il faut mettre en application", a déclaré l'édile Horizons.

Dimanche, c'était au tour de Robert Ménard d'annoncer un couvre-feu pour les mineurs de moins de 13 ans dans sa ville, dix ans après avoir déjà pris cette mesure au début de son premier mandat.

Quelques jours plus tôt, le Premier ministre remettait le sujet sur la table. Après avoir prononcé un discours consacré à la lutte contre la violence des mineurs pour ses 100 jours à Matignon, jeudi 18 avril, Gabriel Attal avait exprimé sa volonté d'instaurer un couvre-feu pour les mineurs.

Cette idée, déjà testée à Béziers en 2014, a également été instaurée dans d'autres villes en France. À chaque fois, les maires reconnaissent une mesure qui fait ses preuves. Malgré le fait qu'elle ne peut pas être une solution à la délinquance des mineurs sur le long terme.

Des résultats "immédiats"

Le maire de la commune semi-rurale de Montfaucon, dans le Gard, qui compte 1.500 habitants, a instauré en 2022 un couvre-feu pour mineurs de moins de 18 ans de 23 heures à 6 heures, après des dégradations répétées. "Des jeunes s'amusaient à tronçonner systématiquement les arbres que la mairie plantait", raconte Olivier Robelet à BFMTV.com.

"Ca a été immédiat, ça a calmé les ardeurs. L'arrêté pris a eu un effet dissuasif. Ensuite ça a été plus calme", se souvient-il, tandis que deux ans plus tard, le couvre-feu court toujours.

Montfaucon "n'est pas un grand foyer de délinquance" précise l'édile, "mais il y existe une délinquance non résorbable qui coûte très cher à une petite commune comme la nôtre".

"Mettre un coup d'arrêt"

Des quelques semaines de couvre-feu pour les mineurs en 2014 - avant qu'un bras de fer avec la Ligue des droits de l'homme ne l'oblige à suspendre l'arrêté - le maire (DVD) de Béziers dresse un bilan très positif. "Les gens étaient très contents, ils ont trouvé ça très bien", assure Robert Ménard à BFMTV.com.

"On a amené des mineurs qui ne respectaient pas l'arrêté dans des commissariats, que les parents sont allés chercher. Le but, c'était surtout de passer un savon aux parents", développe-t-il. "Ça règle un certain nombre de choses, ça a l'avantage de mettre un coup d'arrêt et évidemment nous n'avons mis aucune amende".

À Cagnes-sur-Mer, un arrêté est pris par le maire depuis vingt ans à chaque début du printemps et pour tout l'été. Il interdit aux mineurs de moins de 13 ans de circuler la nuit dans trois quartiers de cette ville de 53.000 habitants.

Vantant un résultat "très positif", le maire, Louis Nègre, nous explique que le dernier cas de non-respect de l'arrêté enregistré par les forces de l'ordre sur la commune remonte à 2011.

"Pas une mesure de long terme"

L'édile LR reconnaît toutefois que "tant que nous ne traiterons pas les causes, il faudra beaucoup d'arrêtés couvre-feu et de rappels à l'ordre pour gérer".

"Je ne comprends pas pourquoi il est si compliqué pour la loi de sanctionner des mineurs et leurs parents", se désole de son côté le maire de Montfaucon. Olivier Robolet a vu dans l'instauration d'un couvre-feu le seul moyen de faire cesser cette délinquance dans sa petite commune.

"Ce n'est pas une mesure de long terme", considère Robert Ménard. L'élu biterrois aimerait voir être instauré dans les écoles et les cours de récréation un certain nombre de "mesures de bon sens pour récréer du respect". "Il faudrait aussi que les parents soient éduqués, c'est aussi ça le gros problème", soupire-t-il.

Interrogé sur BFMTV, le secrétaire général du syndicat Alternative police nationale, Denis Jacob, insiste sur le fait qu'un couvre feu ne peut pas être la réponse de fond à la délinquance des mineurs.

"Ça peut la faire baisser momentanément" mais "ça ne changera rien sur le fond. Un couvre feu ne peut pas durer éternellement", estime-t-il.

Et de mettre en garde: "Il ne faut pas utiliser cet argument de couvre feu pour répondre à une population inquiète sans que ça ne règle les choses derrière. Attention dans cette période d'échéances politiques à ne pas faire d'annonce électorale".

Hortense de Montalivet