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Terrorisme

L'avocat Sven Mary à la défense: "Jugez Abdeslam comme vous jugeriez Dupont"

Sven Mary, l'avocat de Salah Abdeslam.

Sven Mary, l'avocat de Salah Abdeslam. - John Thys - AFP

En l'absence de son client, qui refuse de se présenter devant le tribunal de Bruxelles, l'avocat belge a demandé l'annulation des poursuites pour vice de procédure et maintient que l'ADN de Salah Abdeslam n'a été retrouvé sur aucun arme ayant servi dans la fusillade contre des policiers.

Dès le début de son intervention, Me Sven Mary a souhaité se désolidariser de son client. Quand lundi, Salah Abdeslam, jugé pour la fusillade de Forest e Belgique, déclarait "Je n'ai pas peur de vous (...) je place ma confiance en Allah", son avocat a au contraire exprimé son respect au tribunal de Bruxelles et à son jugement: "Au contraire de Salah Abdeslam, je reconnais votre légitimité. Et je la respecte. Elle est pour moi le rempart contre l’abus de pouvoir et la barbarie." Avant d'assurer que les paroles de son client n'avaient rien de "préparé" et que son attitude - Abdeslam a refusé de se lever- l'a profondément "gêné".

"Le seul a priori qui doit être le votre, madame la Présidente, c'est celui de l'innocence", a aussi appuyé l'avocat. "Jugez Abdeslam comme vous jugeriez Dupont. Vous devez vous extraire du contexte."

Pas un acte "terroriste"

Passés ces propos introductifs, Me Sven Mary a plaidé sur des éléments concrets avec une "question pertinente": "qui a tiré" sur les policiers belges et français le 15 mars 2016, venus perquisitionner un appartement conspiratif, censé être vide? "On ne retrouve l'ADN de Salah Abdeslam ni sur les armes ni sur les chargeurs" utilisés lors de la fusillade, note l'avocat. "Il n'y a donc aucun élément scientifique qui montre que Salah Abdeslam a manipulé ces armes." Sa conviction est qu'"une seule personne a tiré, c'est Mohamed Belkaid", logisticien des attentats de Paris tué par les tirs de riposte des policiers. Un seul tireur mais deux armes utilisées et retrouvées, assure l'avocat. 

Dans ce procès qui a débuté lundi, Salah Abdeslam et son coprévenu, Sofiane Ayari, doivent répondre des faits de "tentative d'assassinat" sur plusieurs policiers et "port d'arme prohibée", avec la circonstance aggravante du "contexte terroriste". "Est-ce qu'une fusillade contre des policiers est de nature de porter atteinte à la Belgique?", questionne Me Sven Mary pour remettre en cause la qualification terroriste. L'avocat cite alors une succession de faits divers, qui se sont déroulés en Belgique à la même époque, impliquant des tirs sur des policiers.

"La seule question à se poser est: Lorsque Belkaïd ouvre le feu sur des policiers, veut-il intimider gravement la population?", interroge le conseil. Pour lui, la réponse est non, l'homme a réagi sous l'effet de la "surprise".

Vice de procédure

Enfin, Sven Mary considère que toute la procédure concernant Sofiane Ayouri et Salah Abdeslam, qui a regagné jeudi sa cellule de Fleury-Mérogis, devrait être annulée. Il invoque un vice de procédure propre au fonctionnement de la justice belge. Le doyen des juges antiterroristes en charge de la saisie d'un magistrat instructeur pour le dossier de la fusillade du 15 mars 2016 a rédigé cet acte en français. Or, étant rattaché au tribunal néerlandophone de Bruxelles, ce document aurait dû être écrit en néerlandais. 

"Je demande au tribunal de prendre ses responsabilités quant à cette erreur de procédure sur l'emploi des langues (...), même si la décision est impopulaire. Jugez, madame la juge, non pas pour être populaire mais pour être le dernier bastion de l'Etat de droit", a appelé Me Sven Mary.

Une peine de 20 ans de prison, avec 13 ans de sûreté, soit le maximum pour les faits jugés, a été requise lundi par le parquet fédéral contre les deux prévenus.

Justine Chevalier