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Terrorisme

Confisquer les passeports des présumés jihadistes est-il efficace?

Les frères Kouachi et Amedy Coulibaly.

Les frères Kouachi et Amedy Coulibaly. - Police nationale ; montage BFMTV

Lundi, Bernard Cazeneuve a confirmé que les passeports de six jihadistes français présumés avaient été confisqués, ajoutant qu'une quarantaine d'autres suivrait. Cette mesure est-elle efficace? On fait le point.

C'était une première en France. Six Français qui s'apprêtaient à partir en Syrie ont vu leurs passeports confisqués lors d'une première application concrète d'une mesure inscrite dans la loi antiterroriste, votée en novembre. Une interdiction administrative de six mois renouvelable dont le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, a assuré lundi qu'elle doit "monter en puissance".

La mesure, dont l'honnêteté oblige à dire qu'elle n'est pas la seule, fait assurément sens. A la fois pour prévenir un basculement, principalement des jeunes, vers le jihad, mais aussi pour protéger la société contre le retour de jihadistes aguerris. Si l'intention est bonne, elle ne dispense pas de questionner l'efficacité de cette privation.

Amedy Coulibaly n'était jamais sorti du territoire

Pour Eric Dénécé, directeur du centre français de recherche sur le renseignements, cette interdiction administrative de sortie du territoire est d'ordre "cosmétique". Selon ce spécialiste, les lacunes tiennent à ce que "ces mesures ne touchent en aucun cas trois autres populations de terroristes potentiels: ceux qui sont déjà au Moyen-Orient, ceux qui préparent aussi des passages à l'action sans être allé au Moyen-Orient et il ne faut pas oublier qu'un certain nombre d'individus peuvent quitter le territoire clandestinement pour rejoindre les zones de combat".

Pour revenir sur les attentats de janvier 2015, on peut observer qu'Amedy Coulibaly, tueur d'une policière à Montrouge et de l'Hyper Cacher de la Porte de Vincennes, n'avait jamais quitté la France. La préparation des actes terroristes, l'apprentissage du maniement des armes et la procuration de celles-ci, se sont faits en France.

Les sorties clandestines hors de portée

Quant à ceux qui "sont déjà au Moyen-Orient", l'exemple des frères Kouachi est très parlant puisqu'ils ont séjourné au Yemen. Pire, Chérif y avait rejoint son frère aîné Saïd en juillet 2011 alors qu'il était sous contrôle judiciaire après sa condamnation dans l'affaire de tentative d'évasion de Smaïn Ait Ali Belkacem, figure du terrorisme islamiste condamnée à perpétuité pour l'attentat du RER C en 1995.

Empêcher à coup sûr un individu déterminé à quitter le territoire, qui au besoin se procurera de faux papiers, semble une entreprise vouée à l'échec. D'autant que selon le renseignement, 1.400 personnes seraient impliquées dans des filières d'envoi de jihadistes vers la Syrie et l'Irak.

David Namias avec Rym Bey