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Police-Justice

Sainte-Soline: magistrats et avocats dénoncent un "maintien de l'ordre qui tue, mutile et blesse"

Après les violents heurts qui ont éclaté lors de la mobilisation contre la construction de bassines à Sainte-Soline, magistrats et avocats pointent du doigt les dérives du maintien de l'ordre contre les manifestants.

Enclenchée par des préoccupations écologistes, la mobilisation contre le projet des "méga-bassines" à Sainte-Soline a été marquée par des affrontements avec les forces de l'ordre, au point d'entraîner de nouvelles critiques virulentes contre les personnes en charge du maintien de l'ordre. Depuis les violentes échauffourées du 25 mars, les organisateurs du rassemblement dénombrent jusqu'à 200 manifestants blessés, dont au moins 40 grièvement, tandis que le parquet de Niort fait état de 47 gendarmes heurtés et de sept manifestants secourus.

Des scènes de chaos qui poussent les députés de La France insoumise à pointer du doigt la brutalité des forces de l'ordre envers les manifestants, tandis que le ministre de l'Intérieur cible "un déferlement de violence inouï" de la part de certains contestataires.

"Armes de guerre"

De tous bord, le cas de Sainte-Soline suscite donc de vives réactions, jusqu'aux métiers de la justice. Ce mardi, le syndicat des avocats de France et le syndicat de la magistrature s'unissent pour dénoncer dans un communiqué "le déploiement démesuré des forces de l’ordre (...) ne visant pas simplement à sécuriser une manifestation mais bien à la réprimer".

"Il n’est plus de doute désormais: la gestion du maintien de l’ordre en France tue, mutile et blesse gravement des centaines de manifestant.es", s'alarment les organisations syndicales.

"Tirs de grenades lacrymogènes, grenades assourdissantes, grenades explosives, tirs de LBD": avocats et magistrats reprochent aux forces de l'ordre l'usage "d'armes de guerre" face à des manifestants mus par leur engagement environnemental.

"Amalgame entre manifestant et délinquant"

Mais Gérald Damarnin a rappelé ce mardi, lors des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, que des "groupuscules" d'une "extrême violence" et "fichés par les services de renseignement" étaient présents samedi à Sainte-Soline. Leurs actions seraient, selon le ministre de l'Intérieur, à l'origine des affrontements violents avec les gendarmes.

L'un manifestants blessés est d'ailleurs fiché S depuis 2010 pour son appartenance à la mouvance d'ultra-gauche, radicale et violente. En cause, sa participation à de nombreuses manifestations, comme à Notre-Dame-des-Landes, et notamment aux côtés des blacks blocs, a appris BFMTV de source policière.

"Le ministre de l’Intérieur dénonce la radicalité des participant.es afin de justifier les violences de la part des forces de l’ordre et favoriser une impunité généralisée (...) faisant encore une fois l’amalgame entre manifestant et délinquant", tancent les syndicats.

Audition du ministre du l'Intérieur

À ce titre, avocats et magistrats réclament l'ouverture d'une commission d'enquête "pour faire toute la lumière sur ces événements". Une attente qui devrait être comblée par l'annonce, ce mardi à l'Assemblée nationale, de la prochaine audition de Gérald Darmanin sur la "gestion du maintien de l'ordre".

La commission des lois étudiera ensuite "la recevabilité de la pétition sur la dissolution de la BRAV-M dans les prochaines semaines", a précisé à l'AFP le président de la commission des Lois, Sacha Houlié. Créées au printemps 2019 lors du mouvement des gilets jaunes, les BRAV-M sont des unités de policiers circulant à moto pour assurer le maintien de l'ordre en manifestation, en étant plus mobiles que les compagnies de CRS ou les gendarmes mobiles. Leur mission est d'aller au contact des casseurs pour faire cesser les dégradations et les interpeller.

Lors d'une journée de mobilisation contre la réforme des retraites, cette brigade a de nouveau été décriée pour ses méthodes d'intervention musclées. Dans un enregistrement sonore révélé par Le Monde et Loopsider, des policiers de la BRAV-M menacent et intimident des jeunes manifestants interpellés et soupçonnés d'avoir participé à des dégradations.

Ambre Lepoivre Journaliste BFMTV