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Procès du 13-Novembre: des photos et un enregistrement sonore du Bataclan seront diffusés ce vendredi

Des policiers patrouillent le 8 septembre 2021 à Paris devant la salle d'audience spéciale mise en place pour le procès des attentats du 13-Novembre

Des policiers patrouillent le 8 septembre 2021 à Paris devant la salle d'audience spéciale mise en place pour le procès des attentats du 13-Novembre - Alain JOCARD © 2019 AFP

Un débat a eu lieu devant la cour d'assises spéciale qui juge les attentats de Paris, pour évaluer l'utilité de diffuser des photos et un enregistrement audio de l'attaque du Bataclan.

"Qu'est-ce qu'on aurait fait dans un procès ordinaire? Je ne pense pas qu'on se serait posé autant de questions..." Me Cosima Ouhioun partage l'avis de nombreux de ses confrères sur le banc des parties civiles: oui, il faut diffuser des photos et un enregistrement sonore de l'attaque du Bataclan. La demande a été portée ce jeudi après-midi devant la cour d'assises spéciale qui juge les attentats par l'association de victimes Life for Paris.

"Un procès d'assises, c'est d'abord montrer la scène du crime", rappelle Me Jean-Marc Delas, l'avocat de l'association, qui a plaidé pour la diffusion "d'une cinquantaine de photos" et "de trois bandes audio".

19 photos sélectionnées

Après une vingtaine de minutes, le président de la cour d'assises, en vertu de son pouvoir discrétionnaire, a tranché: "il sera procédé demain vendredi 1er avril, en début d'audience, à la projection de quelques photos et des passages de l'enregistrement tels qu'ils ont été demandés par Me Delas".

À savoir 19 photos, dont certaines en parties tronquées, prises par la police scientifique, ainsi que de trois extraits sonores, l'entrée des terroristes dans le Bataclan, l'échange entre les otages et la police et l'assaut final. Des sons captés par le dictaphone d'une des victimes qui enregistrait le concert quand les jihadistes ont fait intrusion dans la salle de spectacles.

Confronter les accusés à la réalité

Sur le banc des parties civiles, l'heure était au consensus. Visionner ces photos, écouter ces sons est nécessaire. "On ne peut pas faire l’économie de ce fragment de réel, parfois la violence, il faut la voir", soutient une avocate. "Beaucoup de victimes sont venues avec des blessures invisibles, rappelle Me Catherine Szwark. Aujourd'hui, elles veulent que la cour constate, puisse jauger, du côté visible de ces blessures invisibles au nom du procès équitable, utile à la manifestation de la vérité."

Le deuxième enjeu de cette diffusion de photos, sur lesquelles figurent les corps des victimes, qui jusqu'alors n'ont pas encore été montrées lors des débats devant la cour d'assises, répondrait aussi, selon les avocats, à mettre les accusés face à leurs responsabilités, alors que plusieurs avocats regrettent un procès "aseptisé". "Il n'est jamais trop tard pour réagir face à une horreur", note Me Jean-Marc Delas, tandis que trois des quatre accusés qui étaient interrogés un peu plus tôt dans l'après-midi ont gardé le silence et que Salah Abdeslam la veille avait irrité les parties civiles.

"On ne peut pas se passer de cette potentielle réaction", abonde un autre avocat.

"Brides de souvenirs"

Le débat n'était pas seulement celui des avocats. Nombreux sont ceux qui se sont fait la voix de leur client. Il y a ces neufs survivants du Bataclan, ou d'autres qui s'étaient cachés dans le faux-plafond, qui souhaitent pouvoir entendre ces sons. Même le "porte-parole des terroristes", l'otage qui a échangé avec la police au nom des terroristes, et dont la voix est présente sur les enregistrements, souhaite que l'on diffuse ces éléments, fait savoir son avocate Me Coviaud.

"Seuls les images et les sons peuvent nous ramener à ce que nous avons réellement vécu, cite Me Rimailho. Ils passent leur temps à se remémorer ce qu'il s'est passé car ils étaient en état de choc, cela peut peut être permettre d'avoir des brides de souvenirs."

"Délicatesse" et "parcimonie" réclamées à la cour

Me Reinhart indique que parmi ses clients, il y avait autant d'avis que de victimes. "En sa majorité, le conseil de l'association 13onze15 Fraternité et vérité était pour une certaine diffusion mais il y a beaucoup de mais dans cette discussion", note l'avocat de l'association de familles de victimes. Le conseil a plaidé pour "une parcimonie et une délicatesse absolue de la cour". Il redoute notamment qu'il soit porté atteinte à l'intégrité des victimes sur certains clichés.

L'avocat a été entendu. Initialement prévue vendredi en fin de journée, la diffusion des sons du Bataclan et des images, dont 19 ont été sélectionnées par le président de la cour d'assises, sera réalisée en début d'audience. La webradio sera coupée au moment du passage de l'enregistrement et la sécurité sera renforcée pour éviter toute captation et toute diffusion à l'extérieur.

https://twitter.com/justinecj Justine Chevalier Journaliste police-justice BFMTV