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Police-Justice

Prisons: un détenu sur quatre fume du cannabis chaque jour

Une étude révèle que près d'un détenu sur deux a déjà consommé du cannabis en prison et qu'un sur quatre en consomme au quotidien.

Le constat est sans appel: l'usage du cannabis est largement répandu dans les prisons françaises, selon une étude de l'Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) publiée ce lundi 6 mai. Cette enquête sur la santé et les substances en prison révèle qu'un détenu sur quatre déclare fumer du cannabis quotidiennement.

Un chiffre "huit fois plus élevé pour les détenus qu'en population générale", précise Guillaume Airagnes, directeur de l'OFDT.

Au total, 49% des détenus déclarent avoir déjà consommé du cannabis au cours de leur détention, quelle qu'en soit la durée.

Il s'agit de la deuxième substance psychoactive la plus consommée en prison derrière le tabac, consommé quotidiennement par six détenus sur dix, et avant l'alcool, consommé au moins une fois par 16% des détenus. Dans la population générale, le cannabis se positionne après le tabac et l'alcool.

"Ce n'est pas vraiment une surprise"

Plus globalement, près de quatre détenus sur cinq (77%) ont déjà consommé au moins une fois du tabac, de cannabis, de l'alcool, de la cocaïne, du crack, de la MDMA ou de l'héroïne.

"Ce n'est pas vraiment une surprise, les études précédentes montraient déjà qu'il y avait de la consommation de tabac et de cannabis. La question était de savoir comment, combien", explique Stanislas Spilka, responsable de l'unité data de l'OFDT.

Les usages de cocaïne, de crack, de MDMA ou d'héroïne sont plus faibles que le tabac et le cannabis: 14% des détenus affirment avoir consommé une de ces quatre substances au moins une fois au cours de leur détention. Les prévalences d'usage de ces quatre drogues s'élèvent respectivement à 13%, 6,2%, 5,4% et 5,1%, sans différence selon la classe d'âge.

Par ailleurs, une grande majorité des détenus qui ont pris des substances psychoactives en détention déclaraient déjà des consommations importantes avant leur incarcération.

"On se rend compte avec les résultats de cette étude que la prison n'est ni un lieu d'initiation, ni un lieu pour l'arrêt, avec des consommations plus élevées qu'en population générale. Cela plaide pour une densification des consultations en addictologie", préconise Guillaume Airagnes.

Livraisons par drones et transmissions au parloir

L'étude montre aussi que les détenus ont une représentation différente de l'accessibilité du cannabis et de l'alcool, le cannabis étant réputé plus facilement accessible que l'alcool.

"La taille des bouteilles d'alcool et son indivisibilité est un argument fréquemment mentionné par les détenus pour expliquer la circulation moins importante de ce produit par rapport au cannabis", pointent les auteurs, qui rappellent les moyens utilisés par les détenus pour introduire des biens interdits en prison.

Ils évoquent les projections par des tiers au-dessus des murs de la prison à l'intérieur des cours de promenade, les livraisons par drones, la transmission grâce à un visiteur au parloir ou par le courrier, ou par un intervenant en prison (surveillant, intervenants, extérieurs cuisine, personnels de santé) en général contre une rétribution financière.

Un second volet de cette étude est prévu en 2025, en étendant son champ d'investigations aux femmes incarcérées, qui représentent 3,4% de la population carcérale, selon les derniers chiffres du ministère de la Justice. Les détenus en Outre-mer feront par ailleurs l'objet d'un volet spécifique.

Enquête réalisée auprès d'un échantillon représentatif de 1.094 hommes majeurs incarcérés depuis plus de trois mois en France métropolitaine.

Emilie Roussey avec AFP