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Police-Justice

Bassines de Sainte-Soline: des organisateurs des manifestations interdites jugés ce mardi

Des manifestants affrontent des gendarmes mobiles anti-émeutes ce samedi 25 mars 2023.

Des manifestants affrontent des gendarmes mobiles anti-émeutes ce samedi 25 mars 2023. - Yohan Bonnet / AFP

Après une interruption en septembre, le procès reprend ce mardi. Il concerne les organisateurs de la manifestation interdite du 25 mars dernier à Sainte-Soline contre les "bassines", marquée par de violents affrontements avec les forces de l'ordre. Certains d'entre eux devront également répondre de la manifestation du 29 octobre 2022.

Le procès des organisateurs des manifestations contre les "bassines" à Sainte-Soline (Deux-Sèvres), qui avait été interrompu début septembre en raison de la longueur des débats, reprend ce mardi matin devant le tribunal correctionnel de Niort.

La justice reproche à Benoît Feuillu et Basile Dutertre, militants des Soulèvements de la Terre, Benoît Jaunet et Nicolas Girod, représentants de la Confédération paysanne, ainsi qu'à Julien Le Guet, porte-parole du collectif "Bassines non merci" (BNM), d'avoir organisé la manifestation interdite du 25 mars émaillée de violents affrontements avec les forces de l'ordre.

Trois d'entre eux, ainsi que deux syndicalistes CGT et Solidaires dans les Deux-Sèvres, David Bodin et Hervé Auguin, répondent aussi de la manifestation du 29 octobre 2022 contre ces réserves d'eau à usage agricole, elle aussi jalonnée de heurts.

Une "vaste communauté"

Sébastien Wyon, de la Confédération paysanne, et Nicolas Beauvillain de BNM, comparaissent, enfin, pour le vol d'une valve de canalisation pour l'arrosage des céréales, à Épannes (Deux-Sèvres), le 23 mars 2022, qui est également reproché à Basile Dutertre. Ils encourent six mois d'emprisonnement, outre des peines complémentaires pouvant aller jusqu'à la privation des droits civiques.

Le 8 septembre, le tribunal avait suspendu l'audience "pour la sérénité des débats" qui s'étaient éternisés pendant huit heures dans une ambiance surchauffée.

Certains prévenus s'étaient présentés comme des "lanceurs d'alerte" d'une "guerre de l'eau qui a déjà commencé". Ils avaient nié être les organisateurs des manifestations, en mettant en avant la "diversité" du mouvement, "une vaste communauté", "sans chef" ne "reposant pas sur une organisation verticale" ou "militaire".

"Flou total"

Les débats reprendront à partir de 9h avec l'audition des témoins qui n'avaient pu être entendus, avant les réquisitions du parquet et les plaidoiries des six avocats de la défense, qui pointent "la faiblesse de l'enquête".

"Je ne sais toujours pas ce qui est reproché à mon client, poursuivi comme personne physique et non morale", assure Me Alice Becker, conseil de David Bodin (CGT). "On est toujours dans le flou total, sans aucun élément tangible, ce n'est pas un vice procédural, le parquet cherche à faire peur et dissuader".

Comme lors de la première audience, les soutiens des mis en cause ont appelé au rassemblement à partir de 08h "pour revendiquer des relaxes et accompagner les prévenus".

Des tables rondes, projections et retransmissions théâtrales sont également prévues tout au long de la journée dans le centre de Niort, la préfecture des Deux-Sèvres ayant à nouveau interdit toute manifestation aux abords du tribunal.

Seize retenues d'eau destinées à l'irrigation agricole, surnommées "bassines" par leurs opposants, sont programmées dans le Marais poitevin, dont celle de Sainte-Soline. Elles visent à stocker de l'eau puisée dans les nappes en hiver, afin d'irriguer les cultures en été quand les précipitations se raréfient.

"Radicalité violente"

Leurs partisans en font une assurance-récolte indispensable à leur survie face aux sécheresses à répétition; les opposants dénoncent, eux, un "accaparement" de l'eau par l'agro-industrie et réclament un moratoire.

Ils mettent en exergue l'annulation par la justice administrative début octobre de deux projets portant sur la création de 15 retenues d'eau en Poitou-Charentes, pour leur inadaptation aux effets du changement climatique.

Après de premières violences en octobre 2022 à Sainte-Soline, la manifestation de mars avait dégénéré rapidement en affrontements avec les gendarmes, faisant de nombreux blessés. Deux manifestants ont passé plusieurs semaines dans le coma. Dans un rapport, la Ligue des droits de l'homme a dénoncé un "usage disproportionné" des armes (grenades lacrymogènes, LBD) par les forces de l'ordre.

Une commission d'enquête parlementaire sur les violences en manifestations a conclu pour sa part mi-novembre à la "responsabilité écrasante des trois organisateurs" à Sainte-Soline.

Les Soulèvements de la Terre, Bassines non Merci et la Confédération paysanne, se sont pensés "comme des 'soldats' d'une cause intégrant pleinement l'enjeu et la nécessité de la radicalité violente", estiment les auteurs du rapport.

B.F avec AFP