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"Une logique de vendetta": à Marseille, une guerre sanglante entre deux gangs de narcotrafiquants

Sur fond de trafic de stupéfiants, les gangs Yoda et DZ Mafia s'affrontent à Marseille. Huit personnes sont mortes depuis le début du mois d'août lors de fusillades.

Dans le 14e arrondissement de Marseille, les impacts de balles sont encore visibles. Un homme du trentaine d'années a été tué par balle dans le quartier de Maison Blanche mardi soir, le dernier d'une triste série. Huit personnes sont mortes lors de fusillades dans la cité phocéenne depuis le début du mois d'août, attestant d'une recrudescence des violences sur fond de trafic de stupéfiants.

Une logique de vendetta

Lors d'une rencontre avec la presse, la préfète de police des Bouches-du-Rhône explique que ces morts sont la conséquence de la reprise d'une rivalité entre deux clans très puissants: Yoda et DZ Mafia.

"Nous sommes dans un cycle de conflits entre deux grands clans de trafiquants, dans une logique de vendetta, c'est-à-dire de tuer pour venger la mort d'un des leurs. Une logique aussi de terrorisation du clan adverse", détaille Frédérique Camilleri ce mercredi.

Les membres du clan Yoda et DZ Mafia sont pris dans des mécanismes d'alliance et de trahison qui embarquent donc de nombreuses cités. Frédérique Camilleri mentionne auprès de l'Agence France-Presse (AFP) "un nouveau monde, un changement de paradigme" pour faire peur à l'ennemi.

"Ce sont deux clans extrêment structurés, importants avec des intérêts dans des nombreuses cités à Marseille. On estime qu'ils ont une vingtaine de points. (...) Ces clans sont extrêmement résilients", a-t-elle ajouté lors de son point presse.

Des tueurs de plus en plus jeunes

En plus de cette nouvelle logique de vendetta, les profils des victimes et des tueurs ont évolué. Les premières sont moins connues des services de police, souvent victimes de fusillades à l'aveugle, même si la préfecture reconnaît que les derniers assassinats ont l'air plus ciblés.

Mais les personnes visées ne sont généralement pas forcément haut placées dans la hiérarchie des gangs et leur mort ne change rien à la situation: aucun clan ne prend le dessus, le but est de marquer son territoire.

Quant aux tueurs, ces derniers sont "de plus en plus jeunes". "À peine majeurs, avec des personnes qui manifestement rentrent très vite dans un niveau de violence important et qui sont recrutées parfois pour des sommes dérisoires", explique la préfète de police des Bouches-du-Rhône.

Un jeune de 18 ans a par exemple récemment été interpellé, soupçonné d'avoir tué deux adolescents de respectivement 15 et 16 ans. Il affirme avoir touché 200.000 euros pour ces deux contrats, relate l'AFP.

Une trentaine de morts depuis le début de l'année

Le recrutement des assassins se banalise de plus en plus, affirme la préfecture de police. Si cette dernière n'arrive pas à enrayer la dynamique, elle comptabilise néanmoins une dizaine d'élucidations de meurtres liés au trafic de stupéfiants. Cinq commandos d'assassins ont également été interpellés en flagrant délit depuis le début de l'année, dont le dernier, mardi, après la fusillade dans le quartier de Maison Blanche.

Les enquêteurs signent également un début d'année record avec 740 armes saisies (+24% par rapport à 2022), 1144 trafiquants interpellés (+26%) et 12 millions d'euros d'avoirs criminels saisis. Marseille compte aussi 70 points de deal de moins que l'année dernière.

Ces bons résultats n'annihilent pas le sentiment que la violence n'a jamais été aussi présente à Marseille. Plus de 30 personnes sont mortes dans des fusillades liées aux trafics de stupéfiants depuis janvier, un chiffre d'ores et déjà supérieur à celui de l'année dernière.

Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, a annoncé ce jeudi le déploiement de la CRS 8 pour mener des opérations ciblées contre les trafics de drogue. L'unité devrait y stationner environ une semaine, a indiqué l'entourage du ministre à l'AFP.

Marine Langlois avec Francesco Carvelli