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"On doit assumer": le diocèse de Lyon reconnaît "d'énormes dysfonctionnements" dans l'affaire du père Ribes

Invité de BFM Lyon, Mgr Gobillard, évêque auxiliaire et vicaire général du diocèse de Lyon dénonce les actes "abominables" du père Louis Ribes, accusé de pédophilie. Il reconnaît également des "dysfonctionnements" au sein de l'Eglise.

Elles sont 48 victimes à s'être manifestées. Depuis le mois de janvier, la parole se libère autour des agissements du père Louis Ribes. Mort en 1994, ce prêtre ayant officié dans les diocèses de Lyon, Grenoble et Saint-Etienne est accusé de faits de pédophilie.

"J'ai lu les témoignages de ces personnes. Je n'ai jamais rien vu d'aussi abominable", souffle Mgr Emmanuel Gobillard, évêque auxiliaire et vicaire général du diocèse de Lyon, invité de BFM Lyon ce mardi.

"Il muselait leur parole"

Depuis le début d'année, les diocèses ont organisé des réunions publiques pour permettre aux victimes de s'exprimer. Plusieurs d'entre elles ont par ailleurs témoigné publiquement des agissements du prêtre, qui profitait d'une notoriété localement, grâce à ses oeuvres, dont certaines étaient installées dans des églises. "Ce monsieur, ce prêtre, attirait les gens sous prétexte qu'il était artiste. Il les attirait dans un traquenard, il les valorisait, il les agressait", explique avec une certaine émotion l'évêque auxiliaire.

"Après les avoir agressé, il s'inspirait de ces agressions pour ses réalisations picturales et en plus il leur donnait des cadeaux. Il muselait leur parole, les réactions. Il les enfonçait dans une culpabilité contradictoire. C'est abominable", résume l'ecclésiastique qui se dit lui-même "très très secoué" par les témoignages.

Mgr Gobillard s'attend d'ailleurs à ce que d'autres victimes se manifestent. "J'imagine qu'il y en aura beaucoup d'autres. Cet homme a sévi entre 1957 et 1994", rappelle-t-il.

"Je voudrais leur dire solennellement que ce qu'ils ont vécu est épouvantable. Que tout ce qu'ils disent est vrai. Qu'ils sont courageux", appuie Emmanuel Gobillard.

"Bien sûr que les gens savaient"

Comme dans chacun de ces dossiers de pédophilie, se pose la question de la responsabilité de l'institution. Il est dans cette affaire question d'un signalement en 2016 au diocèse de Grenoble. Concernant le diocèse de Lyon, Mgr Gobillard affirme que la première victime identifiée remonte à l'été dernier, "le 31 juillet". Mais avant? Des responsables religieux étaient-ils au courant des agissements du père Ribes? L'évêque auxiliaire n'élude pas la responsabilité de l'Eglise.

"On doit assumer le fait qu'il y a eu des difficultés, des silences. Il y avait des personnes qui savaient, bien sûr. Il faut arrêter de dire que les gens ne savaient pas. Bien sûr que les gens savaient", tranche l'évêque auxiliaire. Mgr Gobillard reconnaît au nom du diocèses d'"énormes dysfonctionnements": "Ca touche trois diocèses ces agressions, donc ce n'est pas une excuse pour nous".

L'évêque auxiliaire explique être en lien avec le parquet. "Dès que je soupçonne soit des complicités soit des infractions connexes, je fais un signalement", indique-t-il.

A l'écoute des victimes

Désormais, Mgr Gobillard se tourne vers l'avenir. Les victimes seront prochainement contactées pour demander une indemnisation. Le diocèse insiste sur sa volonté de collaborer avec la justice. "Peut-être, trop longtemps, on a voulu gérer les choses en interne. Maintenant il faut qu'on fasse confiance à la justice, à la police. Il faut qu'on ait des instances indépendantes", poursuit Emmanuel Gobillard.

L'évêque auxiliaire indique par ailleurs se tenir à disposition des victimes, pour "prendre en charge" d'autres rencontres, avec ou sans la présence de l'Eglise d'ailleurs. "Il faut les écouter", résume le prêtre qui appelle toutes les personnes qui pourraient avoir été victimes du père Ribes à oser parler. Toutes les personnes qui le souhaitent peuvent contacter le collectif des victimes à l'adresse suivante affaire.ribes@protonmail.com

Les oeuvres du père Ribes retirées des églises

Les oeuvres du père Ribes qui se trouvaient dans des églises des diocèses de Lyon, Saint-Etienne et Grenobles ont toutes été déposées à l'exception d'une "monumentale" qui n'a pour l'instant pas pu être retirée. En attendant, celle-ci est provisoirement recouverte. Le reste des oeuvres appartient notamment à des communes (les vitraux).
Le diocèse de Lyon indique avoir pris contact avec ces communes pour faire retirer les oeuvres. "Si ça doit coûter, ça coûtera. L'essentiel c'est qu'elles soient retirées. Ca fait trop souffrir les victimes de les voir exposées", insiste Mgr Gobillard.

https://twitter.com/caroleblanchard Carole Blanchard Cheffe de service BFM Régions