BFMTV
Des voitures abandonnées, incendiées et criblées de balles après l'attaque du Hamas lors du festival de musique "Supernova sukkot"

AFP PHOTO / SOUTH FIRSTS RESPONDERS

"Ils étaient partout": l'attaque du festival en Israël ou le récit d'un matin de fête qui a viré à l'horreur

Près de 260 personnes sont mortes lors de l'attaque d'un festival de musique par les terroristes du Hamas.

Le

Au lever du soleil samedi, la journée s'annonce belle. Grand ciel bleu sans nuages au-dessus du "Supernova sukkot", un festival de musique électronique né au Brésil qui se tient pour la première fois en Israël à l'occasion d'une fête juive. S'il ne fait jour que depuis quelques minutes, la fête bat son plein: certains des 3000 festivaliers ont dansé toute la nuit. Car le festival a démarré la veille au soir.

Au programme: cours de yoga et ateliers de méditation mais surtout deux grandes scènes sur lesquelles doivent se succéder des DJ internationaux au rythme de la trance psychédélique -un genre de musique électronique- jusqu'à la fin de la journée. La musique est assourdissante, l'ambiance entêtante, les participants heureux de faire la fête autour de cet événement qui promeut l'amour et la défense de l'environnement.

Ils ne remarquent pas les points noirs qui grossissent dans le ciel. Ils ne le savent pas encore mais ce sont des terroristes du Hamas en parapentes motorisés: une offensive de grande ampleur est en train d'être lancée sur Israël.

C'est alors que la fête bascule dans l'horreur. Il est 6h30, des explosions se font entendre et des sirènes retentissent. Ce sont les roquettes lancées sur Israël depuis la bande de Gaza, située à moins de 5 km. "J'ai vu des gens se retourner vers la mer et j'ai vu des missiles", témoigne sur BFMTV Eliya Mezrahi, une étudiante en droit.

Vue aérienne après l'attaque en Israël du festival Supernova par le Hamas, le samedi 7 octobre 2023.
Vue aérienne après l'attaque en Israël du festival Supernova par le Hamas, le samedi 7 octobre 2023. © SOUTH FIRST RESPONDERS / AFP

Les organisateurs du festival prennent le micro pour demander aux participants de se rassembler au parking et de rentrer chez eux en voiture. Peu après, un nouveau message: alerte rouge, c'est une fusillade. Il faut fuir au plus vite. Et partir à pied.

"Nous avons commencé à marcher sur la route et les gens de la sécurité nous ont dirigé vers une sorte de grand terrain agricole, des hectares et des hectares avec seulement des citronniers", raconte Eliya Mezrahi. Mais ce n'est que le début du cauchemar.

"Nous sommes allés là-bas. Et c'était le chaos. Les missiles n'arrêtaient pas, des coups de feu tirés partout, on n'arrivait pas à savoir d'où ils venaient (...) c'était la folie."

"OK, je vais mourir"

Des coups de feu. Beaucoup de coups de feu. "Il y avait des coups de feu partout, on n'arrivait pas à savoir d'où ils venaient", continue l'étudiante. Les terroristes, nombreux, sont arrivés à moto sur le site du festival. On court en tous sens, certains se jettent à terre, d'autres tombent touchés par une balle. La situation est confuse; certains festivaliers, au vu de leur tenue et de leurs armes, prennent les terroristes pour des soldats israéliens.

Mais le malentendu est rapidement dissipé: ils tirent sans discontinuer, sans hésiter, sans distinction. "Ils étaient partout, avec des armes automatiques", raconte à la BBC une festivalière rescapée. Par où fuir? Où se cacher alors que le festival se tient dans le désert, sans bâtiment où se réfugier?

Une vue aérienne du site du festival Supernova, attaqué par le Hamas, le samedi 7 octobre 2023.
Une vue aérienne du site du festival Supernova, attaqué par le Hamas, le samedi 7 octobre 2023. © BFMTV

"Les terroristes venaient de quatre ou cinq endroits", poursuit la jeune femme. "J'ai commencé à courir. J'ai vu un endroit avec plein de pamplemoussiers et j'y suis allée (...) j'étais allongée au sol (...) et ils étaient tout autour de moi." Elle se cache derrière un arbre mais elle est convaincue qu'elle va mourir.

"Ils allaient arbre par arbre et tiraient. Partout. Des deux côtés. J'ai vu des gens mourir tout autour (...) Je respirais et je me disais : 'OK, je vais mourir. C'est bon, respire, ferme les yeux'."

"Son corps gisait à terre"

Si d'autres croient trouver refuge, c'est peine perdue face à la fureur des assaillants. Ce que raconte à Franceinfo Tal, une jeune femme de 25 ans qui pensait être en sécurité dans un abri anti-bombes. À ses côtés se trouvaient 69 autres personnes. Mais les terroristes les ont trouvés.

"Ils nous ont dit que tout allait bien, qu'ils étaient des soldats. Et puis, ils ont lancé une grenade et ils ont ensuite tiré à l'intérieur de l'abri. Mon copain est sorti pour aller voir ce qu'il se passait. Ils lui ont tiré dessus. Au même moment, une fille est tombée, son corps gisait à terre."

Pendant de longues minutes, Tal ne bouge pas, immobile au milieu des corps. Une fois le calme revenu, elle s'enfuit, laissant derrière elle son compagnon. L'attaque va durer plusieurs heures.

Un cliché posté par Shani Louk, germano-israélienne, sur son compte Instagram, le 12 juillet 2023. Elle n'a plus donné de nouvelles à ses proches depuis les attaques du Hamas en Israël, le 7 octobre 2023
Un cliché posté par Shani Louk, germano-israélienne, sur son compte Instagram, le 12 juillet 2023. Elle n'a plus donné de nouvelles à ses proches depuis les attaques du Hamas en Israël, le 7 octobre 2023 © Instagram @shanukkk

Deux jours plus tard, de nombreuses familles sont toujours sans nouvelle de leur proche. Comme celle de ce Britannique de 26 ans. Jake Marlowe résidait en Israël depuis deux ans et assurait la sécurité de cet événement musical. Sa mère a affirmé au journal Jewish News qu'il l'avait appelée samedi matin et lui avait décrit les attaques de roquettes.

Une heure plus tard, "il m'a écrit pour dire 'mauvaise connexion, tout va bien, je te tiendrai au courant, je te le promets' et qu'il m'aimait."

Mais depuis, sa mère n'a aucune nouvelle. Est-il mort? A-t-il été pris en otage comme certains jeunes qui participaient à cette fête? C'est vraisemblablement le cas d'une germano-israélienne de 22 ans. Sa mère assure l'avoir identifiée -elle porte des tatouages reconnaissables et de longues dreadlocks noires teintes en blond à la pointe- dans une vidéo brutale et inquiétante circulant sur les réseaux sociaux.

Sur les images, la jeune femme est allongée visage contre terre à l'arrière d'un pick-up. À moitié dénudée et inconsciente. Assis autour d'elle, des hommes armés paradent à travers les rues de la bande de Gaza. L'un lui tire les cheveux, un jeune homme à côté du véhicule crache sur sa tête ensanglantée.

"Je ne veux simplement pas y croire", s'est alarmée la mère de la jeune femme pour l'hebdomadaire allemand Der Spiegel.

Leur dernier échange téléphonique remonte au début des attaques. La mère avait alors imploré sa fille de rejoindre un bunker. Ses parents ont depuis été informés par la banque de leur fille, domiciliée à Tel-Aviv, que sa carte de crédit avait été utilisée à Gaza.

Une Française a elle aussi reconnu son cousin et sa fiancée se faire enlever dans une vidéo. Sur les images, la jeune femme se trouve sur une moto, "avec au moins quatre ou cinq hommes qui la tiennent", a-t-elle confié à BFMTV. "Elle, en train de hurler."

D'après le dernier bilan, quelque 260 personnes ont trouvé la mort lors de l'attaque de ce festival. L'armée israélienne assure avoir repris le "contrôle" des localités du sud du pays attaquées par le Hamas. Et le ministre de la Défense a annoncé le "siège complet" de Gaza.

https://twitter.com/chussonnois Céline Hussonnois-Alaya Journaliste BFMTV