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Syriza, le parti de la gauche radicale remporte les législatives en Grèce

Des militants et sympathisants de Syriza célèbrent leur victoire devant leur leader, Alexis Tsipras.

Des militants et sympathisants de Syriza célèbrent leur victoire devant leur leader, Alexis Tsipras. - Aris Messinis - AFP

Le parti de gauche radicale anti-austérité devance largement le parti de droite au pouvoir. Syriza obtiendrait au moins 149 sièges au Parlement, 151 marquant la majorité absolue. "C'est un signe important pour l'Europe qui change", s'est félicité Alexis Tsipras.

"Le peuple grec a écrit l'Histoire, il laisse l'austérité derrière lui." Syriza, le parti de gauche radicale, a remporté à une large majorité ce dimanche les élections législatives en Grèce. Son leader, Alexis Tsipras, pourrait devenir lundi le premier dirigeant à rejeter la cure d'austérité imposée par l'Europe depuis la crise.

"C'est un signe important pour l'Europe qui change", a déclaré le leader de Syriza devant des milliers de personnes rassemblées sur l'esplanade de l'Université d'Athènes.

"Le verdict du peuple grec signifie la fin de la troïka", cette structure de supervision de l'économie grecque conduite par l'UE, la BCE et le FMi et qui s'est engagée depuis 2010 à lui prêter quelque 240 milliards d'euros en échange d'une austérité drastique.

Antonis Samaras reconnaît sa défaite

Les Grecs "ont parlé" et "nous respectons" leur décision, a indiqué peu avant lui son adversaire Antonis Samaras, le Premier ministre sortant, en reconnaissant sa défaite.

"Je rends un pays, qui est en train de sortir de la crise, qui est membre de l'Union européenne et de la zone euro et j'espère que le prochain gouvernement va maintenir ces acquis", a-t-il souligné.

Selon les derniers résultats partiels officiels, vers 23h15 heure de Paris (00h15 à Athènes) après le dépouillement de 70,72% des bulletins, Syriza comptait 36,03% des voix et Nouvelle Démocratie d'Antonis Samaras 28,15%. La gauche radicale totalisait alors 149 sièges sur 300 au Parlement. Mais savoir s'il aura en définitive la majorité absolue de 151 sièges relevait du "thriller", selon le responsable de la société informatique chargée du dépouillement.

Un message "qui résonne dans toute l'Europe"

"Cela semble être une victoire historique" et c'est "un message qui n'affecte pas seulement les Grecs mais qui résonne dans toute l'Europe", a aussitôt déclaré Panos Skourletis, le porte-parole de Syriza.

La victoire a été saluée par une explosion de joie au QG de campagne de Syriza, une tente dressée dans le centre ville d'Athènes. Des centaines de personnes, venues de toute l'Europe, ont chanté Bella Ciao, agité des drapeaux. Certaines pleuraient. Le scrutin était attendu anxieusement par les partenaires européens d'Athènes, inquiets de la volonté de Syriza de "fermement" renégocier l'énorme dette grecque et défier de manière inédite les programmes d'austérité imposée par l'Union européenne.

Le "programme est mort"

La première réaction d'un des principaux économistes de Syriza, Yannis Milios, dimanche soir, était claire. Interrogé par l'agence grecque ANA, il a lancé que le "programme (représenté par l'actuel ministre des Finances Guikas Hardouvelis) est mort". 

Les analystes de la banque allemande Berenberg ont évoqué "une victoire de la colère sur la peur, de l'imaginaire sur la raison". Ils ont décrit Alexis Tsipras comme "un insurgé populiste". Mais l'Europe "ne lui épargnera pas d'accepter la réalité : on ne peut pas dépenser un argent qu'on n'a pas", ont-ils souligné.

Le quotidien allemand Bild titrait de son côté dans son édition de lundi : "Peur sur l'euro, Tsipras triomphe". En Italie, Sandro Gozi, secrétaire d'Etat aux Affaires européennes, a pris acte de la victoire de Syriza. "Nous pensons qu'après ce vote nous aurons de nouvelles opportunités pour poursuivre le changement en Europe en faveur de la croissance, des investissements et de la lutte contre le chômage".

Un grand espoir pour la gauche radicale européenne

Le succès de Syriza, s'il est confirmé, va donner en revanche un grand espoir aux autres formations de gauche radicale en Europe.

Avant la clôture du scrutin en Grèce, Pablo Iglesias, le dirigeant de Podemos en Espagne, avait lancé : "L'espoir arrive, la peur s'en va. Syriza, Podemos: nous vaincrons". 

En France, le leader du parti de gauche Jean-Luc Mélenchon a évoqué "une lame de fond", "une page nouvelle pour l'Europe".

Le gouvernement d'Antonis Samaras a été sanctionné pour avoir essayé de satisfaire au maximum les exigences de réformes de la troïka des créanciers d'Athènes (Banque centrale européenne BCE, UE, FMI), en échange de 240 milliards d'euros prêtés au pays depuis 2010. En effet, la facture est lourde pour la population victime d'un taux de chômage à 25%, ou de réductions de salaires drastiques.

"Rien à perdre"

Alexis Tsipras, qui souhaite mettre en vigueur des mesures immédiates comme une remontée du salaire minimum de 580 à 751 euros, a déjà prévenu qu'il ne se contenterait pas d'un simple aménagement de la dette (175% du PIB, plus de 300 milliards d'euros).

Prenant exemple sur des concessions faites après la guerre à l'Allemagne - aujourd'hui chantre de l'orthodoxie budgétaire en Europe - il veut une importante réduction du principal de cette dette. Les marchés financiers risquent de ne pas apprécier, même si personne, pas même Alexis Tsipras, ne souhaite voir revenir le spectre du "Grexit", une sortie de la Grèce de la zone euro.

Dans un bureau de vote du Pirée, Vaïa Katsarou, 49 ans, avocate, résumait le sentiment général vis-à-vis de Syriza : "C'est un risque mais les démunis n'ont rien à perdre".

V. R. & Jé. M. avec AFP