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Syriza: pourquoi le parti grec est soutenu par l’extrême gauche et le FN

Le leader du parti de gauche Jean-Luc Mélenchon, le leader du parti de gauche radicale grec Syriza Alexis Tsipras et le secrétaire national du PCF Pierre Laurent, le 11 avril 2014.

Le leader du parti de gauche Jean-Luc Mélenchon, le leader du parti de gauche radicale grec Syriza Alexis Tsipras et le secrétaire national du PCF Pierre Laurent, le 11 avril 2014. - Pierre Andrieu - AFP

Le parti de gauche radicale anti-austérité d’Alexis Tsipras est en tête des intentions de vote pour les législatives qui se tiendront dimanche en Grèce. Il a reçu les soutiens de plusieurs partis français, du Front de gauche au Front national. Mais chacun pour des raisons différentes.

Stop ou encore? Les Grecs sont aux prises ce dimanche avec un choix crucial: reconduire lors des législatives la coalition conservateurs-socialistes au pouvoir, ou donner les commandes d’un pays plombé par six ans de récession à la coalition de gauche radicale Syriza (en tête des intentions de vote), devenant ainsi les premiers en Europe à élire un parti hostile à la politique d’austérité menée par l’Union européenne.

C’est dire si l’Europe a les yeux tournés vers la Grèce, à deux jours de ce vote décisif. En France, la formation de gauche radicale emmenée par Alexis Tsipras a reçu de nombreux soutiens, de l’extrême gauche à l’extrême droite, en passant par les Verts ou des membres de la gauche du PS. Comment expliquer ces appuis hétéroclites? On fait le point.

> Front de gauche : un modèle pour "desserrer le carcan de l’austérité"

Comme de nombreux mouvements de gauche européenne, le Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon et le Parti communiste français de Pierre Laurent soutiennent Syriza, le premier parti anti-austérité à être aussi proche des portes du pouvoir en Europe. Lundi, aux côtés de Verts et de membres de la gauche du PS, les deux leaders ont tenu à Paris un meeting de soutien à la coalition grecque de gauche radicale, réclamant également une autre politique en France. Pierre Laurent était par ailleurs à Athènes vendredi pour soutenir Alexis Tsipras.

Le communiste voit dans la possible victoire de Syriza “un coup d'arrêt à la troïka” UE-BCE-FMI, et “un encouragement pour toutes les forces de gauche en Europe qui veulent desserrer le carcan de l'austérité". Le leader du parti de gauche (PG) Jean-Luc Mélenchon est sur la même ligne, prédisant un “effet domino” et un “Printemps européen” des peuples pour tourner “la page de cette catastrophe qu'est la politique d'austérité". Le fondateur du Parti de gauche a d’ailleurs assuré mardi "travailler" à une "coalition" avec EELV, le PCF et la gauche du PS, en vue des élections de 2015 et 2017, pour s'atteler à cet objectif en France.

> Ecologistes : un soutien, mais...

Les Verts aussi espèrent voir Syriza l'emporter. L’ex-ministre écologiste Cécile Duflot a participé lundi au meeting “de solidarité” en faveur du parti grec. Selon elle, ce soutien allait de soi depuis que les Verts grecs ont rejoint la coalition Syriza il y a "un bon mois". "Il faut soutenir ce qui peut être une chance pour le peuple grec mais aussi pour les Européens et les Français", a ajouté Cécile Duflot, appelant à "rompre avec une logique financière, voire quasi budgétaire qui nous a amené dans le mur". "Il est très important que l'on puisse dire que c'est une force politique qui peut répondre aux maux de la Grèce aujourd'hui", a renchéri la patronne d'EELV Emmanuelle Cosse, quelques jours après l’adoption par le Conseil fédéral d’une motion de soutien à Syriza.

Pour autant, chez les écologistes français, tout le monde n’est pas d’accord sur la stratégie à adopter. Jean-Vincent Placé, le chef de file du groupe écologiste au Sénat, a ainsi ironisé vendredi sur la présence de Cécile Duflot au meeting de lundi. "Aller dans un meeting de ce type-là donne plus l'impression d'être dans une vision interne à la gauche française, et d'aller soutenir Mélenchon, que d'aller soutenir Tsipras (le leader de Syriza). Moi à sa place, je n'y serais pas allé", a-t-il taclé sur BFMTV et RMC, tout en assurant qu'Alexis Tsipras disposait de "notre soutien".

> A l’aile gauche du PS : des socialistes critiques

Au PS, seuls des membres de l'aile gauche ont publiquement soutenu le parti Syriza en participant au meeting “de solidarité” lundi. Trois socialistes étaient présents: l'économiste Liem Hoang-Ngoc, le député des Français établis à l'étranger et frondeur Pouria Amirshahi, et l'eurodéputé Guillaume Balas. Ce dernier a jugé qu’"une victoire de Syriza serait un élément marquant de la fin de la politique austéritaire. Mais pas suffisant". Interrogé dimanche dernier, le numéro un du PS, Jean-Christophe Cambadélis, a lui juste souhaité "la victoire de la gauche. Parce que Syriza, s'il l'emporte, ce qui n'est pas encore fait, n'aura pas la majorité absolue".

> FN : contre "le totalitarisme de l'Union européenne"

Le Front national espère lui aussi une "victoire de Syriza". "Nous ne sommes pas d'accord avec tout leur programme, notamment sur le plan de l'immigration. Mais nous nous réjouirons de leur victoire", a dit mardi au Monde la présidente du parti d’extrême droite, Marine Le Pen. Ce qui la séduit ? Surtout l’euroscepticisme du parti hellénique. "Il y a une fracture en Europe qui passe par la reprise en main des peuples contre le totalitarisme de l'Union européenne et de ses complices, les marchés financiers", a-t-elle plaidé. "Je veux que Syriza l'emporte" pour qu'on ait un "grand débat" sur l'Europe, a de son côté déclaré Florian Philippot, vice-président du FN sur BFMTV vendredi.

Un soutien contre-nature? Soutenir Syriza "ne fait pas de moi une militante d'extrême gauche", s'est défendue Marine Le Pen dans les colonnes du Monde, assurant être “complètement cohérente”. Pour le quotidien du soir, ce soutien aurait aussi l’avantage pour le FN de brouiller les cartes, et de se démarquer du parti d’extrême droite grec Aube dorée, d’inspiration néonazie. Syriza a en tout cas immédiatement rejeté cet appui. “La ‘sympathie’ alléguée de Le Pen envers Syriza est fausse et dégoûtante", a dénoncé sur Twitter Dimitris Papadimoulis, eurodéputé et cadre du parti.

Violette Robinet