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Russie

Poutine absent aux cérémonies d'Auschwitz pour "crier son désaccord avec l'Occident"

Vladimir Poutine, au sommet du G20, le 15 novembre 2014.

Vladimir Poutine, au sommet du G20, le 15 novembre 2014. - Alain Jocard - AFP

Vladimir Poutine sera mardi le grand absent des commémorations des 70 ans de la libération du camp d'extermination d'Auschwitz-Birkenau, en Pologne. Par-delà ce qui pourrait passer pour un geste d'humeur, quelles sont les raisons de l'absence du président russe?

La justification officielle de l'absence de Valdimir Poutine aux cérémonies du 70e anniversaire de la libération du camp d'extermination nazi d'Auschwitz semble relever d'une grosse ficelle: "Il n'y a pas eu d'invitation officielle" adressée au président russe, indiquait le 21 janvier Sergueï Lavrov, son ministre des Affaires étrangères qui sera, quant à lui, au rendez-vous. Dmitri Peskov, porte-parole du président russe, a récemment invoqué pour sa part un agenda très dense.

Poutine échaudé par l'accueil lors du G20 

En réalité, Tatiana Jean, chercheuse à l'Ifri (Institut français des relations internationales), voit "dans ce refus de Vladimir Poutine plusieurs choses, qui relèvent à la fois de l’attitude russe vis-à-vis de la mémoire historique (et la mémoire de la Grande guerre patriotique est au centre de cet édifice mémoriel russe), ainsi que de la conjoncture politique actuelle, liée à la crise en Ukraine, où le thème de fascisme et de nazisme est activement exploité par les Russes". En juin 2014, un conseiller de Poutine n'avait-il pas traité Porochenko de "nazi"? S'il est exact que des milices ouvertement nazies existent en Ukraine, assimiler le gouvernement pro-européen à cette doctrine relève d'un raccourci douteux. 

Un autre argument pointé par la spécialiste de ce pays et justifiant ce refus est "l’accueil pour le moins réservé à Vladimir Poutine au dernier sommet du G20 où il a rencontré les leaders mondiaux en Australie. Une hostilité qui l’aurait "marqué au point de ne pas vouloir s’exposer dans les conditions politiques qui restent très difficiles".

Volonté de rupture avec les "errements de l'Occident" 

La chercheuse voit aussi ce refus comme "un moyen pour Vladimir Poutine de mettre en exergue les divergences des lectures de l’histoire russe et occidentale, d’accentuer ce qui est perçu comme les 'errements' de l’Occident en matière de mémoire historique, mais aussi de l’actualité". "Le but est de crier par son absence le désaccord sur le traitement de la Russie par l’Occident, à la fois par rapport à l’histoire et dans l’actualité".

Les Russes sont-ils dupes? "Il ne faut pas oublier qu’en Russie les choses ont été présentées d’une manière très orientée", rappelle la chercheuse. "Selon les journaux pro-Kremlin, Vladimir Poutine ne serait pas invité à participer aux cérémonies". De quoi "alimenter la perception négative de l’Occident en Russie, qui est déjà à son pire niveau depuis la chute de l’URSS". "L’un des rares points qui pourraient unir la Russie et l’Occident dans le même geste symbolique est ainsi rejeté", conclut Tatiana Jean. 

Pour preuve que ce dialogue de sourds pourrait encore durer, Vladimir Poutine a, lundi, accusé l'armée ukrainienne d'être la "Légion étrangère" de l'Otan. Accusation que les Occidentaux qualifient, de leur côté, de "non-sens".

David Namias