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États-Unis

Décret Trump anti-immigration: la timide critique des élus républicains

Donald Trump à Philadelphie le 26 janvier 2017

Donald Trump à Philadelphie le 26 janvier 2017 - Nicholas Kamm-AFP

Le décret anti-immigration pris par Donald Trump embarrasse son parti. Si certains élus républicains l'ont timidement critiqué, ceux qui l'ont ouvertement condamné ont été remis à leur place par le président des États-Unis.

Les condamnations internationales sont unanimes. Le haut-commissaire de l'ONU aux droits de l'homme a rappelé que "la discrimination fondée sur la nationalité est interdite par les droits de l'homme". Angela Merkel a estimé que les restrictions à l'immigration n'étaient pas "justifiées". La France a appelé à l'annulation de la mesure. Même Theresa May, la Première ministre britannique soutenue par Donald Trump dans sa campagne pour le Brexit, a fini par désapprouver le décret anti-immigration du nouveau locataire du bureau ovale.

Aux États-Unis, l'opposition démocrate a appelé au retrait du décret au nom des valeurs américaines. Barack Obama a dit son "désaccord fondamental". Des dizaines de manifestations ont eu lieu dans tout le pays, y compris devant la Maison Blanche. Mais du côté des Républicains, le parti du président, ce "Muslim Ban" embarrasse les conservateurs.

De timides critiques

Une poignée d'élus républicains ont critiqué, timidement, une partie du décret. Comme le leader de la majorité républicaine au Sénat, Mitch McConnell, qui s'est dit sur ABC en faveur du renforcement des contrôles aux frontières mais a rappelé que les musulmans représentaient "une des meilleures armes dans la guerre contre le terrorisme". Il a également appelé les autorités à faire preuve de prudence, précisant prudemment que "les tribunaux jugeront s'il est allé trop loin".

Un élu de Californie à la Chambre des représentants a souhaité des ajustement pour les détenteurs de la Green Card (ce qui a été fait) tout comme les étrangers qui ont servi dans l'armée américaine. Le sénateur du Colorado a pour sa part estimé qu'une interdiction globale était "trop large" et allait "trop loin", tout comme celui du Nebraska. La sénatrice du Maine a quant à elle jugé que le décret était "problématique", rapporte le quotidien local Sun Journal.

Même critique hésitante pour le sénateur de l'Ohio Rob Portman, qui a estimé que Donald Trump devait "mettre la pédale douce" et travailler de concert avec les parlementaires.

"Chacun devrait respirer par le nez et trouver quelque chose de sensé" qui respectera le fait que "les États-Unis ont toujours été une terre d'accueil pour les réfugiés et les immigrants".

Certains revoient leur position

Certaines voix, qui avaient dans un premier temps applaudi le décret de Donald Trump, ont revu leur position. Comme un représentant du Texas qui a appelé à des précisions quatre jours après avoir salué "la mise en place de barrières de défense dont nous avions besoin pour que les criminels, trafiquants de drogue et potentiels terroristes restent en dehors du pays".

"À la lumière de la confusion et de l'incertitude créées à la suite du décret présidentiel, de clairs ajustements sont nécessaires", a-t-il déclaré, faisant volte-face.

D'autres se sont montrés plus virulents, comme le représentant du Michigan Justin Amash, pour qui le décret semble plus motivé par des questions politiques que sécuritaires. "Si on s'inquiète du radicalisme/terrorisme, alors qu'en est-il pour l'Arabie saoudite, le Pakistan et d'autres?" a-t-il dénoncé sur Twitter dans une longue série de messages, évoquant "l'arbitraire qui viole la loi".

"Le président Trump et son administration ont raison d'être préoccupés par la sécurité nationale, mais il est inacceptable que même des résidents permanents légaux soient détenus ou renvoyés vers leurs aéroports ou ports d'entrée", a également grondé le sénateur de l'Arizona, détracteur de longue date de Donald Trump.

Le décret pris pour interdire l'entrée aux États-Unis concerne tous les ressortissants d'Irak, Iran, Libye, Somalie, Soudan, Syrie et Yémen, à l'exception des binationaux américains, détenteurs de la Green Card, de visas diplomatiques et officiels qui travaillent pour des institutions internationales. Mais pour les autres binationaux, la nationalité de l'un des pays visés l'emportera (sauf pour le Royaume-Uni et le Canada).

La colère de Donald Trump

Mais lorsque deux ténors du Parti républicain ont haussé le ton et dénoncé sans bémol le décret, la colère présidentielle s'est abattue. John McCain, sénateur de l'Arizona et candidat à l'élection présidentielle en 2008, et Lindsey Graham, un temps candidat à la primaire de 2016 et sénateur de Caroline du Sud, craignent que ce décret "ne nous affaiblisse dans la lutte contre le terrorisme" et favorise le recrutement de jihadistes plutôt que "d'améliorer la sécurité".

"Notre gouvernement a le devoir de défendre nos frontières mais doit le faire d'une manière sûre et qui respecte tout ce que les États-Unis ont d'exceptionnel."

Sur Twitter, Donald Trump a réagi et vivement rabroué les deux sénateurs:

"La déclaration commune des anciens candidats à l'élection présidentielle John McCain et Lindsey Graham est fausse. Ils sont tristement faibles sur l'immigration. Les deux sénateurs devraient concentrer leur énergie sur Daesh, l'immigration illégale et la sécurité aux frontières au lieu de toujours chercher à commencer la troisième guerre mondiale."

Autant de critiques qui ne semblent pas faire changer d'avis Donald Trump. Sally Yates, ministre de la Justice par intérim qui avait été nommée par Barack Obama, a été limogée lundi. Elle avait ordonné aux procureurs de ne pas appliquer le décret anti-immigration.

Céline Hussonnois-Alaya