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Présidentielle en Tunisie: le camp Essebsi revendique la victoire, Marzouki conteste

Des supporters de Béji Caïd Essebsi célèbrent les premiers résultats de la présidentielle, dimanche 21 décembre, à Tunis.

Des supporters de Béji Caïd Essebsi célèbrent les premiers résultats de la présidentielle, dimanche 21 décembre, à Tunis. - Fethi Belaïd- AFP

"L'avenir proche et lointain nous oblige à travailler ensemble pour la Tunisie", a aussi lancé Béji Caïd Essebsi à l'adresse de son rival et président sortant Moncef Marzouki qui dément pour sa part le résultat proclamé.

Le favori de la présidentielle tunisienne, Béji Caïd Essebsi, a revendiqué dimanche soir la "victoire", immédiatement contestée par le camp du président sortant Moncef Marzouki, dans l'attente des résultats officiels.

"Les indicateurs que nous avons (...) indiquent une victoire de Béji Caïd Essebsi" au second tour de dimanche, a déclaré quelques minutes après la fermeture des bureaux de vote, Mohsen Marzouk, directeur de campagne de ce vétéran de la vie politique tunisienne, sans toutefois avancer d'estimations.

Le camp Marzouki conteste

Face à près de 2.000 personnes rassemblées devant son QG de campagne, Béji Caïd Essebsi, 88 ans, a remercié ses électeurs et salué son rival, bien que l'inimitié entre les deux hommes soit de notoriété publique. "La Tunisie a besoin de tous ses enfants", a-t-il lancé. Mais le camp du chef de l'Etat sortant a immédiatement contesté ces affirmations.

"Ce qu'a déclaré le responsable de la campagne de Béji Caïd Essebsi à propos de sa victoire nette est sans fondement", a estimé le directeur de campagne de Moncef Marzouki, Adnène Mancer, évoquant un écart "très serré" de "quelques milliers de voix" et accusant l'adversaire de "porter atteinte à la paix sociale".

"Que direz-vous à vos partisans si les résultats s'avèrent être contraires à ce que vous avez annoncé?" a-t-il lancé au camp rival.

59% de taux de participation

De son côté, Moncef Marzouki a affirmé qu'il ne ferait "pas de commentaire pour le moment" mais a, dans le même temps, fait état d'indicateurs le donnant en tête. "Je refuse de m'avancer (...) malgré toutes les données et informations qui (...) indiquent que nous sommes vainqueurs", a-t-il dit à ses partisans rassemblés devant son QG de campagne.

"Je vais respecter la loi et je vais respecter les instances indépendantes qui, elles seules, (..) ont le droit de donner les résultats", a-t-il ajouté faisant référence à l'instance électorale, l'ISIE. Cette dernière a indiqué qu'elle ferait son possible pour que les résultats soient annoncés lundi. Pour l'instant, seul le taux de participation est connu: 59% sur l'ensemble de la Tunisie.

Campagne tendue

Béji Caïd Essebsi et Moncef Marzouki ont mené des campagnes très dures, échangeant invectives et insultes. Le président sortant s'est présenté en défenseur de la révolution face au retour des tenants de l'ancien régime, Béji Caïd Essebsi ayant servi le père de l'indépendance Habib Bourguiba puis brièvement Zine El Abidine Ben Ali avant d'assurer plusieurs mois la fonction de Premier ministre après la révolution.

A l'inverse, le chef du parti anti-islamiste Nidaa Tounès s'est posé en homme providentiel malgré son grand âge, se disant à même de réparer les dégâts causés par les islamistes d'Ennahda, au pouvoir de 2012 à début 2014, et leur allié Moncef Marzouki, qualifié "d'extrémiste".

Si la victoire de Béji Caïd Essebsi était confirmée, il réaliserait un doublé moins de deux mois après la victoire de son parti aux législatives. Quel que soit le résultat, il appartiendra à Nidaa Tounès de former un gouvernement et il devra rapidement s'atteler à construire une coalition stable, faute de majorité absolue au Parlement.

Le vainqueur de la présidentielle deviendra le premier chef d'Etat tunisien élu librement depuis l'indépendance en 1956. Habib Bourguiba et Zine El Abidine Ben Ali avaient constamment eu recours à la fraude ou au plébiscite, et Moncef Marzouki a été élu par l'Assemblée constituante à la faveur d'un accord politique avec les islamistes d'Ennahda.

Menace jihadiste

Le cycle électoral de cette fin d'année doit achever la transition en Tunisie, qui, malgré plusieurs attaques attribuées à la mouvance jihadiste et des crises politiques à répétition, a évité de basculer dans le chaos ou la répression, à l'inverse de la plupart des autres pays du Printemps arabe.

Des dizaines de milliers de militaires et policiers avaient été déployés, permettant le bon déroulement du scrutin selon les autorités, malgré une attaque dans la nuit contre l'armée. Une unité a été visée par un "groupe armé" devant une école de la région de Kairouan (160 km au sud de Tunis) où du matériel destiné aux élections était stocké, mais les autorités se sont refusées à évoquer la piste jihadiste. Un assaillant a été tué et trois autres arrêtés, selon le ministère de la Défense.

S.A. et A.S. avec AFP