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Mali : Kidal, une ville-clé pour l'armée française

Des soldats français arrivant du Tchad à l'aéroport militaire de Bamako, le 14 janvier dernier.

Des soldats français arrivant du Tchad à l'aéroport militaire de Bamako, le 14 janvier dernier. - -

Trois jours après la prise de Tombouctou, l'armée française s'apprête à sécuriser la ville de Kidal. Quelles sont les conditions de cette avancée et pourquoi est-ce un enjeu pour le processus de reconquête de la souveraineté du Mali ?

Le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian l’a annoncé jeudi matin : l’armée française, poursuivant sa progression vers le nord du Mali, tient l’aéroport de Kidal, avant de "sécuriser" la ville. Que représente cette ville, tenue, non plus par les jihadistes d’Ansar Dine, mais par les Touaregs du MNLA ? Décryptage avec Jean-Claude Allard, directeur de recherche à l’Iris, l'Institut de relations internationales et stratégiques.

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> Pourquoi les Français font-ils route vers Kidal ?

Kidal est une ville qui a beaucoup changé de mains. Après avoir été tenue par les Touaregs du MNLA (Mouvement national de libération de l'Azawad) en mars 2012, elle est tombée sous la coupe d'Ansar-Dine, lié à Aqmi. Or, depuis quelques jours, le MNLA a repris le contrôle de la ville. L'entrée dans Kidal pourrait ainsi permettre d'ouvrir des négociations avec les Touaregs. Par ailleurs, Jean-Yves Le Drian l'a précisé jeudi, les otages français se trouveraient dans les montagnes au nord de Kidal.

"C’est ce que prévoyaient déjà les résolutions 2071 et 2085 du Conseil de sécurité de l’ONU", explique Jean-Claude Allard. La stratégie de règlement du conflit comportait trois volets avec, d’une part des discussions nécessaires entre le gouvernement malien et les Touaregs, dans le cadre d'un processus politique de réconciliation.

Elle impliquait aussi une opération de l’Union européenne pour aider l’armée malienne à se structurer afin d’entreprendre la reconquête de la souveraineté sur l’ensemble du territoire. Enfin elle comprenait une opération de la Cédéao pour aider cette armée malienne.

"L’attaque du 9 janvier a mis de côté temporairement ce plan stratégique", analyse Jean-Claude Allard. La première partie de la mission des forces françaises était d'arrêter les jihadistes, la deuxième consistait à défendre Bamako, en empêchant le passage du fleuve Niger, d'où la ligne Diabali-Tombouctou-Gao. "A partir de là, on aide les Maliens à reconquérir la souveraineté, mais en distinguant bien les terroristes islamistes des rebelles touaregs, dont il faut prendre en compte les demandes" commente Jean-Claude Allard.

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> Comment l'armée française va-t-elle prendre Kidal ?

"Y aura-t-il une bataille de Kidal ? Non, à moins que les islamistes ne sortent de leurs montagnes pour revenir attaquer les Français", explique Jean-Claude Allard pour qui "Kidal est l'exploitation d'une occasion".

Prise en mars 2012 par le MNLA, Kidal était ensuite passé aux mains des terroristes islamistes, Mujao ou Aqmi. Or, il y a quelques jours, le MNLA a annoncé être de nouveau maître de Kidal. "Donc, il semblerait que lorsque les troupes françaises sont arrivées dans le nuit là bas, elle avaient déjà pris contact avec le MNLA à Kidal".

L'opération militaire a consisté en une arrivée d’avions et d’hélicoptères. Alors que si une résistance était envisagée, analyse Jean-Claude Allard, il y aurait une combinaison avec des forces terrestres. "On ne peut pas tenir le terrain avec des avions et des hélicoptères", souligne t-il.

> Que demandent les Touaregs ?

Les Touaregs sont un million dans le Nord du Mali (sur 15 millions d’habitants), l’Azawad, qui regroupe d’autres ethnies, comme les Peuls et les Shongaï ou encore les Arabes.

S’il est nécessaire de négocier maintenant avec les Touaregs, la situation est cependant complexe, indique Harold Hyman, spécialiste de géopolitique sur BFMTV. Les Touaregs sont en effet divisés. Certains sont djihadistes et appartiennent au groupe Ansar Dine. D'autres appartiennent au MNLA. Enfin un troisième groupe, appelé MIA, a fait sécession avec Ansar-Dine.

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"Les Touaregs du MNLA revendiquent la reconnaissance de leur identité nationale, qui va de pair avec l'acquisition d'un statut d'indépendance. Les discussions pourraient consister à les mener plutôt vers l'autonomie", analyse Jean-Claude Allard.

Magali Rangin