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Pourquoi la vente de carburant à perte ne changera rien pour Totalénergies

Le géant français qui bloqué ses tarifs à la pompe à 1,99 euro le litre réalise de copieuses marges sur le raffinage du pétrole et peut donc se permettre de pratiquer des prix de vente plus bas en stations.

Qui va vendre le carburant à perte, comme le souhaite le gouvernement? Si les petites stations-service indépendantes s'alarment déjà de cette possibilité, les géants du pétrole y sont-ils favorables?

Joints par BFM Business, les grands du secteur comme Esso ou Totalénergies ne souhaitent pas commenter cette décision. Du côté du géant français, on se contente de rappeler l'opération de blocage des prix du carburant à 1,99 euro le litre et ce, au-delà de la fin 2023.

"La force du modèle intégré de Totalénergies est qu'il permet d'agir sur toute la chaîne de valeur: raffinage, stockage, transport, distribution (nous ne sommes pas des revendeurs)", indique le groupe.

Autrement dit, Totalénergies explique en substance qu'il n'a pas besoin de coup de pouce législatif pour continuer à proposer des prix bloqués.

Un calcul sur l'ensemble de la production

Le modèle intégré du groupe a permis de mettre en place dès 2022 des remises, puis un plafonnement, sans tomber dans de la vente à perte qui reste à date illégale. TotalEnergies continuera donc à proposer son carburant à prix bloqué dans les mois qui viennent.

L'activité de distribution de Totalénergies est différente de celle de revendeurs indépendants ou des enseignes de grande distribution. Ces derniers -qui ne possèdent par leurs propres raffineries- achètent leur carburant à des pétroliers à un prix donné et ne peuvent donc pas le revendre en dessous de ce tarif.

Pour les groupes comme Totalénergies, la station-service n'est qu'un service parmi d'autres. Le carburant leur est livré et elles n'ont pas besoin de l'acheter. Dès lors le calcul de la revente à perte se fait sur l'ensemble de la production.

Or actuellement, les marges sont très élevées dans l'activité de raffinage et ce, au niveau mondial. Les marges de raffinage, qui sont la différence entre le coût du brut et la valeur de l’essence, du gazole et des autres produits pétroliers, ont atteint des records, en raison de la forte demande combinée au manque de capacité de raffinage.

Selon les estimations de l'association de consommateurs CLCV à partir des données de l'Ufip, la marge sur le raffinage qui était tombée à 25 euros la tonne est montée en flèche ces derniers mois jusqu'à atteindre 122 euros en août. Si elle est depuis retombée à 106 euros en septembre, elle reste néanmoins deux fois plus élevée que la moyenne constatée sur une longue période.

Totalénergies, grâce à son activité de raffinage très lucrative, peut donc se permettre de bloquer ses prix à la pompe. Il est très loin de vendre son carburant à perte.

Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco